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Logements: NBCC, l’entrepreneur indien aux 20 projets mauriciens, mis à l’index en Inde

28 février 2022, 18:00

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Logements: NBCC, l’entrepreneur indien aux 20 projets mauriciens, mis à l’index en Inde

700 appartements construits par National Buildings Construction Corporation (India) Limited (NBCC) à Gurugram, dans l’État de l’Haryana, seront, sur la demande des autorités indiennes, démolis en raison de «structural and construction lapses». L’un des occupants du complexe résidentiel se demande comment un bâtiment construit il y a cinq ans a pu se détériorer si vite.

Dès mars 2021, le journal indien The Hindu faisait état de problèmes structurels dans un autre appartement où de larges plaques de ciment se détachaient, exposant les fers de constructions rouillés et des fissures dans la structure. On a aussi découvert que les eaux usées des environs ont infiltré le sous-sol du bâtiment en raison de la mauvaise qualité des travaux d’étanchéité.

La Central Vigilance Commission indienne avait même, dès 2019, déploré la mauvaise qualité des travaux dans ces appartements. Lorsque cette commission a interrogé la NBCC, celle-ci a expliqué que le mauvais état des maisons s’expliquait par le taux élevé de chlorure de sodium dans l’eau et les tremblements de terre qui auraient secoué ces immeubles…

Et à Maurice, où la même NBCC semble jouir de la plus haute estime de nos dirigeants ? Qui vérifie la qualité du travail de cette entreprise indienne sur les chantiers publics de construction ? Pour le projet de Dagotière et Mare-Tabac (voir photo), NBCC agit comme consultant pour un contracteur indien. L’architecte est aussi de la Grande péninsule. C’est donc NBCC qui vérifie le travail du contracteur indien, qui tous deux, ont été choisis par l’Exim Bank of India.

Comment est-ce possible ? «Pour les prêts accordés par l’Exim Bank de l’Inde ou de la Chine, nous dit un banquier, normalement aucune somme n’est versée à Maurice. C’est l’Exim Bank qui choisit le contracteur, le consultant, l’architecte et l’ingénieur. Le paiement est effectué directement par l’Exim Bank à ces derniers. Si l’entrepreneur a besoin par exemple de ciment, il le paiera à Maurice.»

«Qui vérifie la qualité du travail de cette entreprise indienne sur les chantiers publics ?»

Nous avons contacté le député travailliste Osman Mahomed, ingénieur civil qui a travaillé durant plusieurs années au ministère des Infrastructures publiques et dans le secteur privé mauricien et singapourien. Il prend en exemple les maisons de Mare-Tabac que la National Housing Development Company (NHDC) a livrées la semaine dernière. Cet ancien directeur général de la NHDC trouve qu’il n’est pas bon que ce soit le financier qui choisit le consultant, l’architecte et le contracteur, alors que le gouvernement mauricien, qui est le client et qui doit rembourser le prêt, n’a pas son mot à dire.

Le député rouge se demande quels ingénieurs et architectes mauriciens ont examiné le «design» dans un esprit de «check and balance et de watchdog» pour s’assurer que cela soit conforme aux normes MS et BS, d’autant que les professionnels de NBCC ne sont pas enregistrés au professional councils de l’île Maurice.

Osman Mahomed cite l’exemple du centre récréatif de Pointe-aux-Sables et de l’hôpital Bruno Cheong de Flacq, qu’il connaît bien et sur lequel il a dû intervenir en tant qu’ingénieur bien des années après leur construction par des équipes chinoises sous le financement de l’Exim de la Chine. «Beaucoup d’équipements et de méthodes de ces constructions n’étaient pas conformes aux normes MS et BS et cela posait problème au niveau de la maintenance, donc de vrai casse-tête pour les ingénieurs mauriciens, subséquemment.»

Osman Mahomed se demande aussi qui a supervisé les travaux de la New Court House, dont le principal consultant était NBCC. «On ne sait pas vraiment si des ingénieurs et architectes mauriciens étaient impliqués dans ce projet d’envergure. Il semble maintenant qu’il y ait des soucis techniques.»

Depuis son arrivée à Maurice, NBCC travaille sur une vingtaine de projets tels que les logements sociaux de Dagotière et Mare-Tabac, le Civil Service College, les National Archives, la New Court House, la Police Band Academy et plusieurs projets résidentiels du secteur privé et la rénovation de la banque Baroda.

Un ingénieur du privé nous explique : «NBCC n’aime pas payer, ou paye au barème indien. On ne sait pas si les professionnels indiens employés sont qualifiés et capables.» Et de nous parler d’un ingénieur indien qui travaille pour NBCC qui est très jeune et «vert». «Je ne sais combien on le paye. Est-il un stagiaire ?»

Les promesses de Padayachy

Le ministre des Finances avait annoncé en 2020 qu’en dépit de la rigueur, des milliards de roupies seraient investies dans des projets de construction qui seront «le moteur de la croissance». Or, ces projets semblent très peu contribuer à notre croissance, puisque les contracteurs, les ingénieurs, les consultants et même les banques sont étrangers. Ce qui fait ironiser un membre de l’opposition : «Padayachy voulait parler de croissance mais il n’avait pas précisé si c’était la croissance et l’emploi mauriciens ou indiens ou chinois.»