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Aviation: le «low-cost» FlySafair est-il une bonne chose pour Maurice ?

11 mars 2022, 20:00

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Aviation: le «low-cost» FlySafair est-il une bonne chose pour Maurice ?

Commençons par le prix du ticket. «Il faut faire attention aux annonces publicitaires ou promotionnelles», nous prévient Raj Ramlugun, secrétaire de l’Association des petits actionnaires et ancien employé d’Air Mauritius (MK). «Les taxes et autres frais ne sont souvent pas inclus dans ces annonces.» Il n’a pas tort. Nous avons vérifié auprès d’une agence de voyages qui nous a donné les prix suivants pour un départ vers Johannesburg le 15 mars avec retour le 29. Pour MK, c’est Rs 28 500, FlySafair Rs 23 300 ! Donc, on est loin des «Rs 11 000» martelées dernièrement. 

Ce qui fait dire à Raj Ramlugun : «Il est clair que la différence n’est pas si grande. Rs 23 300 pour un low-cost, ce n’est pas donné. Et les services qui seront bien sûr réduits !» Nous avons constaté aussi que FlySafair n’a pas d’agent à Maurice, sans doute pour tailler dans les coûts. D’où sort le prix de Rs 11 000 ? Il semble bien que l’on ait parlé que du ticket aller seulement ! 

Quand Air Asia revient au bon souvenir des autorités 

Et le tourisme de l’Afrique du Sud ? Le ministre du Tourisme, Steven Obeegadoo, prévoit une hausse car, selon lui, «c’est un marché avec un potentiel de croissance». Raj Ramlugun est sceptique. «Souvenez-vous d’Air Asia ? Il faut savoir que ces compagnies low-cost ne viennent que lorsqu’elles sont assurées de faire le plein. Si le marché flanche, elles disparaissent de la circulation. Comment fait-on alors, surtout pour les touristes ? Pour un ancien directeur de MK, un nouveau concurrent n’est pas une mauvaise chose pour Air Mauritius, qui sera ainsi obligée d’être efficiente et baisser les coûts d’opération et le prix du ticket. Cependant, il faut qu’ils soient ‘on a level-playing field’. Or, comment MK pourra-t-elle concurrencer un low-cost ?» 

Le marché sud-africain a-t-il vraiment un fort potentiel comme le clame Steven Obeegadoo ? En temps normal, nous accueillons 120 000 Sud-Africains annuellement. «A-t-on fait une étude de marché», se demande Raj Ramlugun. Un haut cadre de la MTPA nous fait cette déclaration surprenante : «On n’a pas besoin de faire d’études.» Tout en nous donnant l’exemple du… taxi : «Si vous augmentez le nombre de taxis à la gare du Nord, il y aura plus de passagers qui vont préférer le taxi aux autobus.» 

Comparaison difficile à convaincre, car le nombre de passagers pour les autobus baissera. Mais y auraitil plus de voyageurs ? «L’on doit s’attendre à plus de touristes sud-africains vu que l’Asie est fermée en ce moment.» Et après l’ouverture de l’Asie ? On ne le sait pas. 

Touristes «low-cost» en perspective ? 

Les compagnies low-cost ne transporteront-elles pas de touristes low-cost ? Si oui, est-ce une bonne chose ? À la MTPA, notre interlocuteur nous dit en premier que, pour lui, FlySafair n’est pas un lowcost, pour ensuite nous dire que le low-cost nous permettra de recevoir des touristes moins riches et ainsi démocratiser le secteur de l’hôtellerie, car ces derniers iront dans les petits hôtels. Lorsque nous avons informé le haut cadre de la MTPA qu’en fait le prix du ticket de FlySafair est de Rs 23 300 et non Rs 11 000, et que donc moins de touristes sud-africains choisiront FlySafair, il ne nous a pas présenté d’autres arguments. Il croit ferme en l’ouverture du ciel et pour lui, Emirates a contribué énormément à notre tourisme, sans nous dire si c’était aux dépens d’Air Mauritius. 

Pour un professionnel de l’aviation, si un voyageur choisit le low-cost, c’est pour économiser. «Et s’il ne pense pas à son confort, je crains qu’il ne dépense pas beaucoup à Maurice non plus.» À l’AHRIM, on ne nous pas répondu non plus sur cette stratégie qui privilégierait la quantité à la qualité. 

Pour sa part, Steven Obeegadoo a aussi pensé aux Sud-Africains résidant à Maurice qui profiteront du low-cost pour aller et venir en Afrique du Sud. Qu’est-ce que cela rapportera à l’économie ? «Air Mauritius perdra au profit de FlySafair», nous dit un économiste, «et je ne vois pas les bénéfices qu’en tirera l’économie mauricienne si des centaines de Sud-Africains voyagent plus souvent à l’étranger». Il se demande même combien de ces riches Sud-Africains résidant à Maurice opteront pour un low-cost. 

De son côté, Air Mauritius ne semble aucunement s’inquiéter de l’arrivée de FlySafair qui va voler dans ses ailes. Elle nous a fait la déclaration suivante : «C’est une compétition saine. FlySafair n’est pas dans les mêmes marchés et créneaux que MK. La fréquence des vols n’est pas la même non plus.» Ce qui fait bondir Raj Ramlugun : «Qu’est-ce qu’ils veulent dire par ‘mêmes marchés, créneaux ou fréquences’ ? C’est loin d’être clair ! Sur quoi se base MK pour dire que cette compétition est saine ?» À quel niveau et avec quels stakeholders a-ton discuté avant d’accorder le droit d’atterrissage à FlySafair ? Il semble que même chez MK, plusieurs ont été surpris d’apprendre la nouvelle de l’arrivée de FlySafair. L’on se demande si le gouvernement qui, à travers l’aviation civile, a autorisé FlySafair à atterrir à Maurice, a évalué l’impact sur MK, au sein de laquelle il vient d’injecter plus de Rs 28 milliards de l’argent du contribuable. 

La question se pose : FlySafair apportera-t-elle plus de visiteurs que le manque à gagner éventuel de MK en sera compensé. Toutefois, à en juger par ce qui s’est passé avec Emirates Airlines qui n’a finalement pas apporté de nouveaux touristes mais a, au contraire, mangé grandement dans l’assiette d’Air Mauritius, il y a des raisons d’être sceptique...

 

Achat obligatoire de titres ? 

<p>L&rsquo;Association des petits actionnaires fait toujours de la résistance. Elle a déposé plainte contre la direction d&rsquo;<em>Airport Holdings Ltd </em>pour contester le prix de Rs 5,80 auquel cette dernière veut acheter de force les titres des petits actionnaires restants dans <em>Air Mauritius.</em> Il semble aussi que les <em>&laquo;brokers&raquo;</em> soient réticents à aller de l&rsquo;avant avec cette transaction.</p>