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Interview | Michael Sik Yuen: «Mon chouchou et mon aubergine au parlement ce n’était pas pour faire l’intéressant»
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Interview | Michael Sik Yuen: «Mon chouchou et mon aubergine au parlement ce n’était pas pour faire l’intéressant»
Sa chayotte et son aubergine ont fait de lui, le chouchou de la Toile cette semaine. Si le député travailliste aime faire rire pour être entendu, le sujet du coût de la vie, dit-il, n’est pas drôle du tout. Diplômé en marketing, avec une longue expérience du commerce via le supermarché familial à Curepipe, ex-ministre du Commerce, Michael Sik Yuen maîtrise bien la question des prix. Mais évidemment, c’est un politicien et chacune de ses phrases doit passer le test de la démagogie. Va-t-il s’en sortir ?
Je croyais que vous alliez m’accueillir avec des boulettes chouchou ou un kari brinzel !
(Rires) On ne les a pas encore cuisinés. C’est presqu’un luxe, vous savez. J’avais d’autres légumes sous la table ce jour-là. Pommes d’amour, carottes, poivrons, mon pima-kari.
Vous avez vu les mèmes, vous les avez montrés à votre épouse ?
J’en ai vu certains hier, d’autres ce matin. Je n’ai pas encore montré à mon épouse. Je suis satisfait que mon discours ait retenu l’attention. Même des membres du MSM m’ont félicité. Mais le plus important, j’espère, est que le gouvernement réalise à quel point la vie est devenue chère. Durant les débats budgétaires 2020 et 2021, j’en ai beaucoup parlé. Je suis content qu’en 2020, j’avais attiré l’attention sur les masques qui s’importaient à 35 sous et se vendaient à Rs 35. Aujourd’hui un masque coûte entre 2 et 5 roupies, cela me procure une satisfaction. L’année dernière j’avais parlé du prix de l’huile, des grains secs, de certaines conserves, mais je n’avais pas posé ces produits sur la table du Parlement. J’avais songé à le faire déjà. Après quelques mois, ils ont fixé les prix ; c’est bien, c’est positif. Mais ce n’est pas suffisant. Dans mon prochain discours, je m’attaquerai au prix des médicaments.
Même si les légumes «pa plant dan l’Ukraine», n’est-ce pas vrai que le coût des intrants et de toute la production des légumes a augmenté à cause de la situation internationale ? Et l’effet domino des carburants. Cela coûte, par exemple, plus cher de transporter les légumes du champ à l’encan.
Attendez. Je ne vise pas le planteur. Souvent les prix au marché sont raisonnables. Mais certains individus ou supermarchés pratiquent des marges exagérées. Mon discours ne visait pas de montrer les planteurs du doigt. Pour eux aussi, c’est plus cher. Leur travail est dur. Il se lèvent tôt. Si au moins c’était eux qui faisaient ces profits. Sachez que ce sont en fait des planteurs qui m’ont alerté sur les prix au détail. Entre le champ, l’encan et l’étagère, les prix peuvent tripler !
Ça ce n’est pas le coût de la vie. Donc vous avez juste demandé au gouvernement de sévir contre ces escrocs-voleurs !
Non. Mon message au gouvernement était plus profond. Je leur dis : «Vous avez des ministres et décideurs qui manquent d’expérience et n’arrivent pas à résoudre les problèmes.» Problèmes au pluriel. Ces détaillants tir-la-vi sont un gros problème dans un monde en crise économique. Mais ce n’est qu’un problème. Ajoutez-y toute l’incompétence sur la gestion globale du pays. Ça devient catastrophique. Je me demande si les ministres discutent avec et écoutent les stakeholders ? Vont-ils sur le terrain rencontrer ces stakeholders ? Entendent-ils tout simplement leurs mandants ?
Tout le monde ne doit pas faire comme vous et n’est pas showman comme vous. On se souviendra que vous êtes allé, en tant que ministre du Commerce, vérifier le prix des serviettes dans les échoppes du marché central !
Je suis allé dans des boulangeries à 4 heures du matin pour vérifier le poids des pains ! Mais ce n’était pas pour faire le show. Mon discours de mardi n’était pas pour faire l’intéressant mais pour faire réagir le gouvernement.
«Le MSM a tenté de me débaucher»
(On l’interrompt). Attendez, l’ancien ministre du Commerce que vous êtes, l’employé du supermarché Sik Yuen que vous avez été, avec votre connaissance du retail (NdlR : il détient une licence en marketing), votre compréhension de l’économie et de son fonctionnement, n’avoue-t-il pas que le gouvernement ne peut rien faire ?
Jamais ! Au contraire. Quand c’est la crise, quand le peuple souffre, c’est le moment où le gouvernement doit intervenir.
Il y a deux semaines ils ont annoncé quelques subventions…
Ce n’est pas suffisant.
Pourquoi n’est-ce pas suffisant ?
Il y a tout un ensemble de mesures. Par exemple, quand j’étais ministre du Commerce, j’avais fait voter une loi qui donnait au secrétaire permanent le pouvoir de contraindre les importateurs à soumettre leurs factures et toute leur documentation. Surtout pour les produits de base. Or, je n’ai pas l’impression que le ministre soit en train de contraindre son ministère d’user de son droit, voire son devoir légal, pour empêcher des profits exorbitants.
C’est contre la définition même du libre marché, du libéralisme, et du capitalisme auquel adhèrent les gouvernements du monde. Les prix baissent grâce à la compétition.
Non. Avant le libre marché, il y a l’offre et la demande. Et la demande, la vraie, c’est celle d’un peuple qui souffre.
Le gouvernement a subventionné certains produits, fixé certains prix...
Je suis contre le contrôle des prix.
Mais vous venez de souhaiter que le gouvernement intervienne. C’est confus tout ça.
Non. Quand je parle d’intervention du gouvernement, ce n’est pas en contrôlant les prix. Je vais vous expliquer le problème avec le contrôle des prix, si vous le voulez. Ce qu’on devrait faire, c’est imposer un maximum mark-up. On contrôlerait les profits, et pas directement les prix. Parce que vous savez ce qui se passe actuellement ? Certains importateurs vendent à perte avec les prix imposés. Personne ne veut perdre. On ne fait pas du business pou perdi dan pos ! Ce que ces importateurs vont faire, c’est tout simplement arrêter d’importer.
Donc le contrôle des prix accélère le processus qui mène à la disparition de certains produits des étagères. Je vous parle là des produits de base. Surveillez le marché du lait. Je demande au ministre de s’y intéresser. Attention à la rupture de stock. En revanche, si on contrôlait juste les profits, on assisterait à une vraie concurrence, et les prix baisseraient. Ensuite il faut cibler ceux au bas de l’échelle avec des vouchers pour ceux déjà sur le social register. Il faut augmenter leur pension. Il faut qu’ils aient les moyens d’acheter eux aussi. C’est ce qui a créera le volume. Retail is about volume.
Si le pouvoir d’achat poursuit sa chute libre, il y aura moins de consommation, ce qui va faire écrouler tout le système. C’est ce que je demande au gouvernement. Il faut être intelligent. Vous croyez que je devrais bénéficier des subventions sur le gaz ménager ? Mo pa mind péy li so vré prix, si sa kapav permet ed plis dimounn ki bizin.
«Ce sont des planteurs, choqués des prix au détail, qui m’ont alerté»
Tania Diolle a dit ici même que les députés ressentent aussi les effets de la vie chère. Elle touche dans les Rs 250 000. Vous touchez presque deux fois moins, mais vous avez votre business. Votre cuisine souffre aussi ?
Faute de temps je n’ai pas pu tout dire dans mon discours mardi. Parmi ce que je n’ai pas pu dire, c’est qu’il faut immédiatement réduire les salaires des députés et ministres. On demande au peuple de ser sintir, alors que les ministres et députés ont enlevé leur ceinture. Ils la tiennent dans la main. (Il mime une ceinture qu’il tient dans son poing).
Les ministres et députés contribuent au «Covid Fund», non ?
C’est une plaisanterie ça. On ne sait même pas comment ce fonds est géré. Épargnez-nous les fer sanblan. Il faut de vraies mesures. Dans mon cas, je dépense la quasi-totalité de mon salaire de député dans ma circonscription. Je sais que certains parlementaires ne peuvent pas faire comme moi, mais o mwin ser sintir-la ou ousi. Qu’en dites-vous ? Si j’avais pu dire cela dans mon discours, les chouchous n’auraient pas fait la une, non ?
Pas sûr. Donc je déduis que votre cuisine ne ressent pas les effets de la vie chère ?
Je le ressens à la station-service. Jusqu’à tout récemment, je faisais le plein pour Rs 2 000 à Rs 2 200. Aujourd’hui, c’est plus de Rs 3 500 à Rs 3 700.
Certains disent que Sik Yuen est le nom de riches commerçants à Curepipe qui ont fait fortune dans le «retail» ; on s’imagine mal Michael Sik Yuen souffrir du prix du chouchou et de l’aubergine.
Très peu de personnes connaissent mon parcours. J’ai connu des hauts et des bas.
Si je vais dans Cité Atlee, Camp Caval, Cité Malherbes et que je dis : «Michael Sik Yuen inn koné ki apel dan pins», «zot pou riy dan mo figir»…
Ceux qui savent, savent. Je n’ai pas envie d’en faire un drame et en parler dans une interview. Je suis quelqu’un de genuine. (Il sort son portable de sa poche). Regardez ce message que m’a envoyé un habitant de Malherbes, hier. Je ne le connais pas. (Il nous fait lire le texto. L’expéditeur le félicite pour son travail dans la circonscription et contre la vie chère et veut le soutenir politiquement).
Le message se termine par «ansam tou posib». (NdlR : slogan du MSM en 2019). Vous êtes sûr que ce n’est pas un farceur ?
(Rires). Surtout pas. Vous voyez la détresse de ce citoyen dans son message.
«Callychurn ferait un bon «Attorney General», mais il est un piètre ministre du Commerce»
Plus sérieusement, votre «maximum mark-up» ne résoudra pas la crise. Le fret, le taux de change, le prix à la source, tout a augmenté. N’est-ce pas démagogique de faire croire qu’on peut résoudre ça ?
Ça fait partie de l’ensemble des problèmes dont je vous ai parlé et qui est en train d’être géré avec amateurisme. Le gouvernement n’a jamais songé à trouver de nouveaux transporteurs maritimes ; aujourd’hui, c’est le consommateur qui paie. Les décisions de la banque centrale jettent la roupie d’une falaise, et c’est le consommateur qui paie. Le ministre du Transport maritime devrait être en train de passer ses journées au téléphone pour trouver des transporteurs maritimes. Il aurait dû l’avoir fait depuis l’année dernière. C’est son travail. Il doit justifier son gros salaire. Je ne renie pas le problème mondial. Mais c’est le devoir du gouvernement de fournir des efforts. Il faut se battre, s’adapter, penser à des solutions non-traditionnelles pour une crise exceptionnelle.
Ce n’est pas ce que fait le gouvernement ?
Je pense, en toute humilité, qu’il y a trop de novices.
Le ministre Callychurn n’est pas un novice quand même !
Il est novice dans le commerce. Il maîtrise peut-être le droit. Il aurait fait un bon Attorney General, peut-être. Mais en temps de crise, li ankor pé aprann. Kan li pou inn koné dans sink ans, bé pou inn fini fer déga. He’s not the right man in the right place. Il apprendra, mais pour le moment c’est un piètre ministre du Commerce.
Du coup vous regrettez Yogida Sawmynaden.
Non. Mais fondamentalement, il y a trop de jeunes au gouvernement. Oui, la fougue de la jeunesse est importante, mais la maturité et la constance le sont tout aussi. Pour tenter de gagner les prochaines élections, Pravind Jugnauth va encore efase refer en présentant une équipe de novices. Vous pensez qu’on peut affronter la crise comme ça ? Voilà pourquoi il y a aussi ces débauchages de l’opposition.
On a tenté de vous débaucher ?
Oui, mais j’ai toujours fait comprendre que je suis bien là où je suis. Fondamentalement, il serait impossible pour moi de défendre le bilan de ce MSM-là.
Parlons politique. Comment s’est passé la réconciliation avec Xavier-Luc Duval pour les élections de 2019 ? (NdlR : Michael Sik Yuen avait été expulsé du PMSD en 2013 avant de rejoindre le PTR)
On s’est rencontré le jour de la présentation des candidats, on s’est serré la main, on s’est dit bonjour. Il n’y a pas de problèmes à ce niveau.
Vous n’étiez pas «on speaking terms» auparavant ?
En 2013 après mon expulsion du PMSD, je suis resté dans le cabinet de Navin Ramgoolam. On se parlait de temps en temps ; quand le PMSD a rejoint l’alliance Lepep en 2014, disons que Xavier et moi, on ne s’est pas rencontré, c’est tout. En 2019, j’étais un macadam dans la conclusion de l’alliance. Le PMSD avait fait valoir son véto contre ma candidature. À la fin de la journée, la raison l’emporte toujours, non ?
Vous êtes le seul député de l’opposition à Curepipe. Vous avez entendu Steven Obeegadoo et Kenny Dhunnoo après le rejet de la pétition électorale au numéro 17 ?
J’ai écouté une petite partie et j’ai zappé. C’est leur opinion, mais je pense personnellement qu’il y avait maldonne. Je ne parle pas pour d’autres circonscriptions. J’étais à Curepipe. Je connais la circonscription, j’ai une expérience électorale, je comprends la dynamique des électeurs et personne ne peut me convaincre du contraire.
«Moi je suis pour une alliance de l’opposition, mais la question divise au PTr»
Tout en évitant une «contempt» du jugement sur la pétition électorale, quelle est la maldonne ?
Vous savez, le PTr avait fait mettre des scellés sur les urnes au soir du vote. Le jour du counting, six boîtes n’avaient pas de scellés.
C’est aujourd’hui que vous dites ça ?
J’en avais parlé à mon campaign manager. Vous savez, dans une élection il y a la fatigue physique et émotionnelle et à l’instant précis, vous êtes dépassé. Ne pas insister était une erreur. En même temps, vous vous dites que vous devenez parano. On n’imagine pas que les adversaires iraient jusqu’à tricher. Mais on a été naïfs et on ne peut s’en prendre qu’à nous-mêmes. De ce que j’ai vu durant la campagne, le jour du vote, je peux vous dire qu’Adrien Duval et Lindsay Paul ont été élus ! Même les agents du MSM à Curepipe étaient surpris du résultat.
La priorité aujourd’hui, c’est se lamenter de 2019 ou se projeter sur 2024 ?
J’ai toujours dit que je respecterai le jugement de la cour. C’est fait et il revient à Adrien Duval de décider de la marche à suivre. C’est sa pétition électorale.
En revanche, votre leader Navin Ramgoolam a décidé de jouer sa carrière sur sa pétition électorale. S’il perd, il cèdera le leadership du parti. C’est une bonne stratégie ? Vous ne pensez pas qu’il perd son temps dans le rétroviseur de 2019?
Si ti kokin mwa, mwa ousi mo pa ti pou kit zot. Être convaincu d’avoir été victime d’une tricherie est très dur à avaler. Voilà pourquoi je le comprends. En même temps, je vous accorde que chaque circonscription devrait travailler pour gagner les prochaines élections. C’est ce que je fais.
La victoire passe par un Premier ministre qui fait l’unanimité. Elle passe aussi par la décision de faire alliance ou pas. Quand l’opposition est ce qu’elle est aujourd’hui, quand Ramgoolam est considéré comme une «liability», que pense le spécialiste du marketing que vous êtes de ce produit qu’il faudra à un moment emballer et vendre ?
J’ai travaillé avec Pravind Jugnauth comme ministre des Finances. J’ai travaillé avec XLD comme no 2, et j’ai surtout été ministre d’un cabinet dirigé par Navin Ramgoolam. Quand je compare, Ramgoolam est sans conteste un hardworker.
Vous plaisantez !
Les médias n’ont jamais saisi cette facette de lui. Il est sévère et méticuleux avec ses ministres. Il demande des comptes. Li met minis deor si pena rezilta.
Mais il y a la perception qu’il est grillé parce qu’il a abusé de sa position de leader, avec les affaires Soornack, coffres-forts, etc. Vous pouvez argumenter autant que vous voulez, mais ce sera la campagne du MSM ! «The product has been written off the minds of the consumer», pour rester dans votre jargon de retail et marketing.
Personne n’est parfait. Ramgoolam a reconnu ses erreurs, et on doit avancer. C’est tout à son honneur.
Validons. Disons que Ramgoolam est toujours premier-ministrable. Pensez-vous que sans alliance de toute l’opposition, Pravind Jugnauth risque de remporter les prochaines élections ?
C’est une opinion personnelle. Je ne parle pas au nom du parti. Je pense qu’il faudrait une alliance. Je comprends que d’autres membres du parti ne pensent pas comme moi, et j’accepte leurs opinions et arguments exprimés au dernier bureau politique. La majorité décidera. Mais je préfère une alliance à une opposition divisée.
Ramgoolam-Bérenger c’est encore vendable ça ?
C’est le programme le plus important. Tout ne se résume pas au Premier ministre et à son adjoint. Il faut sortir le pays d’un trou.
Un bon produit dans un mauvais emballage va expirer sur l’étagère. Pire, le produit a mauvaise réputation après 2014.
Je n’ai pas parlé de Ramgoolam-Bérenger. C’est vous qui avez mentionné ces deux noms. J’insiste, c’est le programme qui importe. C’est la réponse à la question «comment sortir le pays de ce trou ?» qui sera déterminante. Bien sûr, il faudra un leadership solide, des candidats valables, un cabinet de hardworkers, des personnes compétentes à la tête des institutions et corps paraétatiques.
«Ramgoolam est un «hardworker» et il est toujours premier-ministrable»
Il y aura beaucoup d’aspirants candidats pour 60 investitures. Ce sera invivable.
Que chacun assume ses responsabilités. Les egos ne peuvent pas passer avant le pays.
Sans une alliance, le PTr ne peut pas gagner ?
Si bien sûr. Ce sont des arguments présentés par certains de mes camarades de parti au denier BP. Mais il y a des erreurs à ne pas commettre. Le choix de candidats sera crucial et il ne faut pas les choisir à la dernière minute.
C’est ce qui s’est passé en 2019 ?
Encore une fois cette opinion n’engage que moi. Quand tous les candidats de tous les blocs étaient finalisés et que les journaux avaient publié toutes les photos, j’ai analysé. J’avais vu que cela serait très serré parce que dans certaines circonscriptions on s’était trompé de candidat.
Laissez-moi résumer le paradoxe dans lequel se retrouve l’opposition. Une alliance ressemblerait à 2014. Pas d’alliance conduirait au résultat de 2019. Pile, vous perdez ; face, Pravind Jugnauth gagne.
En 2014, le MMM et le PTr n’étaient pas des alliés naturels parce que nous avions été adversaires trop longtemps. Depuis la cassure du gouvernement de 1995, vous vous rendez compte ? Aujourd’hui ce problème ne se pose pas. Nous combattons tous les deux le MSM depuis 2014 ; après tout, le peuple veut éjecter Pravind Jugnauth. Il faut être juste dans les comparaisons.
Vous êtes membre du PTr, ex-membre et ministre PMSD, élu deux fois à Curepipe. Que pensez-vous du fait que le MMM et le PMSD soient en alliance quand on sait à quel point Curepipe a incarné la férocité entre mauves et bleus ?
Ce n’est pas un problème.
Gaëtan Duval dans sa tombe à St-Jean doit en faire des cauchemars ! Je n’ose pas imaginer la formule qu’il aurait trouvé pour qualifier ça.
Les gens changent. Les contextes évoluent. Il faut avancer.
Il est possible que le résultat de 2019 à Curepipe, avec Obeegadoo, Dhunnoo et vous élus, se répète ?
S’il n’y a pas de tricherie ? No way. Je ne vois pas comment Obeegadoo et Dhunnoo vont se faire élire.
Obeegadoo est ministre du Tourisme. Vous l’avez été aussi. Vous levez sept fois la main au ciel de ne pas avoir eu à gérer le Covid en tant que ministre du Tourisme ?
Les défis et difficultés ne me font pas peur. C’est vrai que le Covid et son impact sur le voyage sont inédits et difficiles. Aujourd’hui qu’il est presque derrière nous, le ministre devrait s’acharner à faire venir des vols, et prioritairement, de gros porteurs. On ne peut plus trop compter sur Air Mauritius déjà retiré de plusieurs routes. Je sais qu’Emirates veut augmenter ses vols. Ce sont des opportunités. Quand j’étais ministre, j’épluchais les statistiques d’arrivées au quotidien. C’est ce qui me permettait de développer une stratégie et de demander à Emirates de travailler plus sur certains marchés. Allez demander à l’AHRIM. À Paul Jones (NdlR : actuel CEO du groupe Lux).
On laisse donc tomber MK ?
Non. Il faut consolider les routes de MK et travailler sur de nouvelles avec d’autres transporteurs. Il faut savoir ménager, négocier, offrir, prendre et surtout une MTPA qui investit intelligemment. Le deal avec Liverpool est une catastrophe ! Un gaspillage incroyable. Liverpool nous avait offert quasiment le même deal pour Rs 50 millions et j’avais refusé. Je vous enverrai la documentation plus tard. (Ce qu’il fera après l’entretien).
Aujourd’hui on paie Rs 400 millions pour quelques secondes de pub et là encore Mauritius est mal écrit. Rs 400 millions était le budget total de la MTPA à mon époque. Zot pé badiné ar larzan lepep sa bann-la. Je suis fan de Liverpool moi-même. Mais là c’est du business. On gère un pays comme son business. L’émotion ne compte pas. Seuls les résultats importent. Le marketing est mon domaine et je peux vous dire qu’Internet, les magazines, et les roadshows restent les meilleures formules. Il faut aussi du joint-marketing. Ce n’est pas normal que ce soit juste la MTPA qui paie. Les tour-opérateurs devraient aussi contribuer. Quand ils auront engagé leur argent, ils fourniront les efforts pour que leur investissement rapporte. Donc le deal avec Liverpool sé lamoné zeté.
Les fans de Liverpool ne voteront pas Pravind Jugnauth parce qu’il a une photo avec Jürgen Klopp ?
(Rires). Je suis moi-même fan de Liverpool.
Les PME ne rient pas ces jours-ci. Vous avez aussi été leur ministre. Là encore, vous avez la solution-miracle ?
D’abord, permettez que je précise que le Self Employed Assistance Scheme et tout ce que le gouvernement a fait pour maintenir l’emploi, ce n’est pas une faveur. C’était la moindre des choses. Aujourd’hui, le contexte est plus difficile pour tout le monde mais c’est encore pire pour les PME. Parce que leur problème de cash-flow et d’accès aux finances qui existait avant la crise n’a jamais été résolue. Les PME devraient bénéficier du MIC !
Vous êtes engagés contre la vie chère. Si on augmente le salaire minimum, les PME vont en souffrir aussi. Que fait-on ?
C’est simple. Tout est dans répartition du marché. Il faut encourager la production locale. Taxer les importations des produits que les PME produisent localement, les meubles par exemple. Si les PME ont accès au marché, s’ils génèrent des revenus, ils pourraient payer une hausse du salaire minimum. Mais dans le contexte actuel, sans mesures d’accompagnement, sans une vision d’ensemble, les PME vont mourir, avec ou sans hausse du salaire minimum.
Mais l’importateur de meubles a aussi des employés, un loyer, des coûts.
Oui. Mais il faut l’encourager à s’approvisionner sur le marché local qui souvent offre des produits de meilleure qualité. La production et la consommation locales ne sont pas qu’un mythe. C’est possible, réalisable et nettement plus rentable dans beaucoup de secteurs. On se protège, on crée de l’emploi et on préserve nos précieuses devises.
Mon ultime question. C’est la soupe de chouchou et d’aubergine qui vous a fait perdre tant de poids ?
(Rires). Non. Effectivement j’ai perdu 40 kilos depuis 2013. Là, j’en ai repris un peu. Fondamentalement, je mange plus sainement. Et je bois une eau spéciale produite par un ioniseur d’eau que je commercialise moi-même.
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