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Émeutes au Sri Lanka: quand le peuple dit STOP
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Émeutes au Sri Lanka: quand le peuple dit STOP
L’actualité a récemment été dominée par des images de guerre et d’émeutes à travers le monde. Après les troubles à Maurice, il y a eu un soulèvement populaire au Sri Lanka. Comment ces émeutes ont commencé ? Pourquoi tant de colère et de violence ? On te dit tout avec Vijay Makhan, ancien commissaire de l’Union africaine et ex-secrétaire aux affaires étrangères.
Pourquoi un tel soulèvement au Sri Lanka ?
C’est parce que le peuple est en colère. Il n’en peut plus. À un moment, quand la colère s’accumule et que la population a l’impression qu’on ne la prend pas au sérieux, c’est normal qu’elle se retrouve contrainte de descendre dans les rues pour faire entendre sa voix. Le gouvernement sri-lankais ne voulait pas écouter son peuple car celui-ci voyait et sentait venir la crise économique. Au Sri Lanka, il n’y avait plus de médicaments, plus de nourriture, il régnait une immense pauvreté et tout ce qui vient avec. Dans ce genre de cas, le gouvernement aurait dû écouter mais il était contrôlé par une dynastie familiale avec le président Gotabaya Rajapaksa et son frère Mahinda Rajapaksa comme Premier ministre. Ce sont eux que le peuple tenait pour responsable de cette grave crise économique. Du coup, il s’est révolté pour demander la démission du gouvernement et le Premier ministre a dû démissionner.
Est-ce la première fois que ce genre de chose se produit ?
Non, on a déjà assisté à la colère du peuple dans le passé mais le plus récent soulèvement avant celui du Sri-Lanka c’était le printemps arabe. Pourquoi ? Parce que les peuples égyptiens, tunisiens, libyens et syriens se sont révoltés contre leurs dirigeants.
Cette violence aurait-elle pu être évitée ?
Bien sûr. Nous avons vu un peuple qui brûle des pneus pour barrer la route, qui brûle des bâtiments, qui fait des manifestations devant des institutions, des scènes de violence où les partisans du gouvernement au pouvoir, qui ont tenté d’intervenir, sont devenus les cibles de gens en colère. De larges manifestations réclamant la démission du gouvernement ont été organisées et ces manifestations ont mené à de graves affrontements avec la police et entre manifestants pro et antigouvernementaux. Il faut savoir que le Sri Lanka traverse depuis plusieurs mois sa pire crise économique depuis son indépendance en 1948. La Banque centrale sri-lankaise a demandé à sa diaspora qui vit à l’étranger d’envoyer de l’argent au pays, qui était à court de devises, pour importer des produits de première nécessité. Ce pays a subi pendant des semaines d’importantes coupures de courant et des pénuries de nourriture, de carburant et de produits pharmaceutiques. Des millions d’habitants se sont donc retrouvés dans la misère. Oui, c’était évitable. Pourquoi le gouvernement ne l’a pas su ? C’est parce qu’il n’a pas su communiquer avec le peuple mais surtout parce qu’il s’est montré indifférent alors que plusieurs instances internationales et institutions l’avaient averti. Le gouvernement a fait la sourde oreille avec pour résultat que le peuple ne se sentant pas écouté de manière civilisée, n’a eu d’autre choix que de passer ses messages dans les rues.
En sus de manifester, qu’a fait le peuple ?
Des manifestants ont tenté d’envahir la résidence présidentielle à la fin du mois de mars, faisant au moins un blessé grave et entraînant l’imposition d’un couvre-feu dans la capitale Colombo. Ils ont également empêché l’ouverture d’une exposition de fleurs par l’épouse du Premier ministre Mahinda Rajapaksa mais aussi bloqué certaines routes ou encore incendié des voitures. L’exécutif a donc proclamé l’état d’urgence deux fois en cinq semaines, donnant aux forces de l’ordre des moyens et des pouvoirs supérieurs pour arrêter et jeter en prison des manifestants. Le 19 avril, un homme a été tué par la police et 24 personnes ont été blessées lors d’un blocage d’une autoroute à Rambukkana, dans le centre du Sri Lanka. Selon les autorités, ces affrontements ont fait 180 blessés et cinq morts. À Nittambuwa, à une cinquantaine de kilomètres au nord de la capitale, un député du parti au pouvoir, Amarakeerthi Athukorala, s’est suicidé après avoir ouvert le feu sur deux manifestants anti-gouvernementaux, qui bloquaient sa voiture. Des coups de feu ont aussi été tirés à partir de la résidence du Premier ministre après que des manifestants ont enfoncé le portail et mis le feu à un camion garé sur place. Mahinda Rajapaksa a finalement annoncé sa démission avec effet immédiat après les affrontements afin que le peuple puisse nommer un gouvernement multipartite pour sortir le pays de la crise économique actuelle. Le nouveau Premier ministre, Ranil Wickremensinghe, qui assume aussi le portefeuille des Finances, tente d’obtenir un prêt de 4 milliards de dollars avec l’Inde, la Chine et le Japon pour retirer le pays du gouffre.
Que pensez-vous des troubles qui ont eu lieu dans certaines régions de Maurice récemment ?
Écoutez, si vous lisez entre les lignes dans tout ce que je vous ai dit sur la situation au Sri Lanka, vous y verrez des similitudes avec Maurice. À Maurice, il y a récemment eu une hausse des prix des denrées alimentaires, du transport, des carburants. Depuis l’année dernière, plusieurs manifestations citoyennes ont eu lieu dans les rues de la capitale, devant le Parlement et des familles ont dû s’abriter dans des centres de refuge. Des manifestations quotidiennes ne sont que le reflet de la colère du peuple. Quand ils ont recours à la rue, c’est qu’ils ont remarqué que leurs voix ne sont pas entendues de manière correcte. Un peuple en colère décide de descendre dans les rues pour le faire savoir. On parle de manque de médicaments au Sri Lanka alors qu’à Maurice, pour calmer la colère citoyenne, on a régularisé le prix des médicaments. Le gouvernement a agi en conséquence pour éviter que la situation ne dégénère comme au Sri Lanka. Je pense qu’il serait mieux pour nous et surtout ceux qui ont le pouvoir de changer les choses, d’agir et d’écouter le peuple pour éviter ce qu’on appelle une Mob Mentality. C’est la mentalité de foule, qui est également appelée mentalité de troupeau ou de ruche. C’est une tendance qu’ont certains humains à faire partie d’un grand groupe, négligeant souvent leurs sentiments individuels dans le processus, et en adoptant les comportements et les actions des personnes qui les entourent.
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