Publicité

Torture policière: des victimes brisent le silence

5 juin 2022, 22:00

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Torture policière: des victimes brisent le silence

Armées de leur courage, elles ont osé le faire. Près de 50 personnes sont venues de l’avant pour relater leurs mésaventures aux mains de certains hommes en uniforme. Bruneau Laurette et des membres de Linion Pep Morisien ont rencontré ces présumées victimes de brutalité policière, hier, à Rose-Hill. L’exercice avait pour but de recueillir des témoignages et doléances pour décider de la marche à suivre, au cas par cas et de manière générale. «Ce n’est pas normal. La police n’a pas le droit d’infliger des blessures physiques et psychologiques à une personne. Nous allons maintenant canaliser les victimes. Sur le plan légal, certaines seront référées à des psychologues ou hommes religieux ; les Nations unies seront également notifiées dans certains cas. Il n’y a aucun but politique. Il faut arrêter ces abus», affirme Bruneau Laurette. Qui demande au commissaire de police de placarder des affiches dans tous les postes pour interdire les violences et la torture, entre autres démarches.

Yogen Chinnarassen, 28 ans: «J’étais nu et ils m’ont battu»

Il allègue qu’il a souvent des problèmes avec la propriétaire de la maison qu’il loue. Cette dernière lui aurait dit qu’elle était journaliste et qu’elle était intouchable et lui mènerait la vie dure depuis quelque temps. Durant cette semaine, cette dernière aurait fait venir la police au domicile de Yogen Chinnarassen et il aurait reçu des menaces de certains limiers de la CID. «Ils m’ont demandé de me déshabiller, j’étais nu et ils m’ont battu. Zot in devir mo lakaz anba-lao ek zot finn tourn mo lamé. Ziska ler sa pé fermal.»

Samodee Swaleha, 40 ans : «Ils m’ont étranglée devant ma fille»

Les faits se sont déroulés le 16 mars 2016. Mais cette mère de famille peine toujours à oublier le traumatisme vécu. D’ailleurs, à l’époque, la vidéo montrant cet acte de brutalité policière à son encontre avait fait beaucoup de bruit. «Mon mari et moi étions allés chercher notre fille, qui avait 10 ans à l’époque, à ses leçons particulières. En rentrant chez nous, nous avions été arrêtés par deux policiers. La situation s’était par la suite envenimée quand un des policiers avait cru que mon mari le filmait.» Le policier a alors frappé le mari et en allant lui porter secours, Samodee Swaleha a été menacée par l’un d’eux, traînée sur la route devant sa fille. «Puis il m’a étranglée devant elle et traînée de nouveau par les cheveux avant de me passer les menottes autour du cou. Entre-temps, le public s’était massé autour.» Elle s’est rendue à la Human Rights Commission qui l’a référée à l’Independent Police Complaints Commission. Elle attend toujours que justice soit faite.

Muhammad Zaheed Sayhe : «Ils ont fait en sorte qu’un chien me morde»

Il raconte avoir vécu le pire le 13 mai dernier. Il s’était rendu au poste de police de Mahébourg pour «met call» comme chaque jour quand un policier, qui l’avait déjà coffré pour non-port du masque récemment, a demandé un autre collègue de le boucler à nouveau pour le même délit. «Chose que je n’ai pas accepté car je portais le masque. Ils m’ont menotté, battu, arraché les cheveux. Zot in ras mo rasta ek zot finn kas 8 baton mop lor mwa. Puis, il y a un chien noir dans la cour du poste de police, il y est toujours, vous pouvez vérifier mes dires, ils ont fait en sorte qu’il me morde en le provoquant. Puis ils m’ont conduit à l’hôpital. Le médecin a certifié que j’avais des fêlures aux bras. Je suis resté quatre jours à l’hôpital…»

Tristan Marday, 23 ans: «Ils m’ont forcé à entonner l’hymne national»

La vidéo de l’homme, chantant l’hymne national d’une voix tremblotante, à bord d’un véhicule de la police et sous la menace, est actuellement en circulation. Tristan Marday est finalement venu de l’avant pour raconter le calvaire qu’il a vécu entre les mains des officiers la CID de Mahébourg, selon ses dires. Cela s’est passé le 21 octobre 2019. Selon lui, les policiers l’ont frappé dans les côtes et asséné des coups de poing au visage cette nuit-là. Avant de l’obliger à entonner le Motherland. «Finn gagn ousi boukou zouré, boukou maltraité. Zot finn rass mo rasta lor mo latet, pa koupé, zot finn atas mo lamé ek enn sez dibwa apré finn fer mwa fer up-down...» Il dit avoir aussi été agressé à coups de matraque pendant les sept jours où il était en détention. «Ils m’avaient dit que si je racontais ce qui m’était arrivé, mo pou koné ki pou ariv mwa, mo ti pé per, lamem mo pé per...»

Flavia Louis: «Ils ont dit qu’elle était morte du Covid…»

Sa sœur est décédée du Covid-19 à la prison des femmes, à Beau-Bassin. Elle y avait été conduite quelques jours après avoir été arrêtée par la police dans une affaire de drogue. Sauf qu’au moment où sa famille a récupéré son corps pour les funérailles, elle présentait plusieurs blessures sur le corps. «Je veux savoir comment ma sœur est morte. On nous a dit que c’est du Covid. Sauf que quelques jours avant, elle dormait chez notre mère qui a le cancer et celle-ci n’a jamais eu le Covid. Je veux savoir ce qui s’est passé, ce qu’elle a subi entre les mains de la police. Ena tras britalité lapolis. Zot inn ras enn mama 23 an à so zanfan 4 an. Bizin trouv lazistis...»