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Port-Louis: l’histoire de la dame qui vole des boîtes de corned mutton
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Port-Louis: l’histoire de la dame qui vole des boîtes de corned mutton
C’est un fait divers qui interpelle. Une dame a été arrêtée mercredi, après avoir volé six boîtes de «corned mutton». Avait-elle faim ? Comptait-elle préparer un bon repas pour sa famille ? Qui est-elle ? Où vit-elle ? Récit.
Au coin d’une petite rue de Camp-Yoloff, sa maison – des escaliers rouges menant à une vieille porte en bois peinte en blanc. «Vini mo rakont ou, so mama mwa.» Bilkis veut nous confier sa part de vérité. Sa fille a été arrêtée mercredi pour avoir volé six boîtes de corned mutton de la marque Watsonia, d’une valeur de Rs 1 044, au supermarché Winner’s de Port-Louis. Un agent de sécurité l’a surprise grâce à la caméra de vidéosurveillance et lui a demandé de lui remettre les produits. La direction a alors alerté la police qui l’a emmenée au poste de Pope Hennessy, l’a arrêtée et détenue au poste de Pailles, avant de la traduire au tribunal. Mais quelle est donc l’histoire de cette dame ?
Bilkis, 51 ans, mère de trois enfants, raconte comment le vol est récemment devenu une habitude pour sa fille aînée âgée de 33 ans, ce qu’elle ne s’explique pas. «Mo pa koné kifer li fer sa. Linn deza kokin avan ek lapolis ti aret li. Linn kokin bann zafer manzé mem, pa lot kitsoz. Li bizin al signé dan stasion tou lézour ek li réfer bann betiz ankor. Li pa ti koumsa avan.»
«Elle avait volé du café et du thon en boîte, je crois», ajoute sa fille de 11 ans. On apprend alors que la présumée voleuse a trois enfants, dont un fils de 16 ans, et deux filles de 11 et quatre ans. Séparée de son époux, elle vit désormais avec sa mère, son frère et ses trois enfants à Camp-Yoloff. Ou, du moins, semble y vivre, dit sa mère. Mais pourquoi vole-t-elle ces denrées ? N’a-t-elle pas de quoi se les offrir ? Aimes-telle le corned mutton, dont le prix a grimpe en flèche, en particulier ? La réponse de Bilkis est plutôt vague. «Elle n’a pas d’endroit précis où habiter. Parfois elle est là, puis elle part et ne revient pas avant plusieurs jours. Elle ne se soucie pas du tout des enfants. C’est moi qui m’occupe d’eux. Pa koné kifer li fer bann betiz parey. Pourtan avan li ti enn bon tifi.»
Bilkis affirme également que sa fille était une enfant modèle, elle avait bon caractère. Mais elle a commencé à avoir des comportements répréhensibles après s’être séparée de son mari. «Après l’école secondaire, elle a travaillé pour une société de transport de bus et il n’y a jamais eu de plainte de mauvaise conduite contre elle. À ma connaissance, cela a commencé après sa séparation de son époux et le problème s’est maintenant aggravé. Actuellement, elle ne travaille pas, ce qui expliquerait pourquoi elle vole», explique Bilkis.
D’autres personnes rencontrées dans le quartier évoquent aussi le curieux cas de cette dame qui vole des denrées. Dans un petit commerce, non loin de la maison de Bilkis, la commerçante nous fait comprendre que nous risquions fort de ne pas rencontrer la dame à cette heure de la journée, tout en précisant que les membres de sa famille sont de bonnes personnes. «Ils traversent des moments difficiles à cause d’elle. Ce n’est pas la première fois qu’elle se met à voler. Quelles que soient ses raisons, ki nou pou dir ou? La famille cependant va bien.» Bilkis, qui dépend du salaire de son fils pour subsister, tient à préciser en outre que sa principale préoccupation demeure l’avenir de ses petits-enfants. «Mes autres enfants sont bien installés. Je suis vieille et je m’inquiète de ce qui va arriver aux enfants de ma fille. Regardez», dit-elle, en nous montrant l’intérieur de sa maison désuète, comprenant un salon qui fait office de chambre, d’une cuisine et d’un coin toilettes salle de bains. «Je n’ai que ça. Mon mari est décédé et ma situation financière n’est pas assez solide pour assurer l’avenir de mes petits-enfants. Je reçois le soutien de mes autres enfants, mais la mère s’en fiche.»
«L’autre jour», partage-t-elle en désignant sa petite-fille de 11 ans, «un professeur l’a aidée à l’école». Elle raconte qu’elle n’avait pas l’argent pour payer le voyage scolaire de l’enfant. «Le professeur a eu la gentillesse de payer le trajet, mais jusqu’à quand il va le faire ? Le père des enfants n’est pas impliqué, leur mère...»
Elle souligne que les enfants ne peuvent bénéficier d’aucune aide sociale car le père n’a pas encore signé les documents requis malgré d’innombrables demandes. «Je vais vous dire la vérité. Les autorités aident. Mais que peuvent-ils faire si les parents eux-mêmes ne s’impliquent pas dans l’éducation, la vie de leurs enfants ? Ma vie est réduite à un cycle d’appels téléphoniques, soit des autorités prêtes à aider mais ne le peuvent pas ou de la police m’informant de la mauvaise conduite de ma fille. Je suis découragée…»
Mais sinon, que fait sa fille des produits alimentaires qu’elle vole ? «Mo pa koné fransman dir ou li kapav inn kwi pou limem mé nou nou pann manzé…»
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