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Orphelins sur l’acte de naissance: Chagossiens, Agaléens ou les deux

11 juillet 2022, 18:00

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Orphelins sur l’acte de naissance: Chagossiens, Agaléens ou les deux

Est-il vrai que des actes de naissance d’Agaléens ne comportent plus les noms de leurs parents ? Ou Rama Valayden s’est-il emmêlé les pinceaux lors de la conférence de presse de Linion Pep Morisien (LPM) à Rose-Hill, vendredi ? 

Brandissant des copies de ces extraits, l’homme de loi-politicien a cité le cas d’un Agaléen né en 1940 dont sur l’acte de naissance «inn rey papa mama». Cette démarche qui ne permet pas de remonter l’arbre généalogique entre, d’après lui, dans une logique de contrôle des îles du Nord et du Sud d’Agalega. Rama Valayden a également pris le soin de préciser que «cette information a été confirmée par des officiers de l’état civil et l’ordre pour effacer du système informatique les données concernant les parents, émane du Prime Minister’s Office». 

Sauf que plusieurs Agaléens ont été pris de court par les dires de Rama Valayden. Arnaud Poulay, artiste engagé, ne cache pas sa surprise. Pour y voir plus clair, il a demandé à ses proches dont sa mère Yeline Poulay, d’aller faire un nouvel acte de naissance dès demain. Car, sur les quelques extraits de naissance d’Agaléens que nous avons pu consulter, les changements dont a fait état Rama Valayden n’y figurent pas. 

Pour une Agaléenne née en 1954, les noms de son père et de sa mère y sont clairement mentionnés tout comme son lieu de naissance, à savoir Agalega. Pour deux jeunes résidentes d’Agalega nées en 2018 et 2019 respectivement, l’identité et l’adresse résidentielle (Agalega) des parents sont apposées sur leurs actes de naissance respectifs. Par contre, comme elles sont nées à Maurice, seul le lieu de naissance, soit l’hôpital Dr A.G. Jeetoo à Port-Louis, y est inscrit, et non leur adresse résidentielle. 

Ce qui fait dire à Arnaud Poulay que, comme pour les enfants nés à l’étranger de parents mauriciens et qui ont droit à la nationalité mauricienne, cela devrait être pareil pour les enfants d’Agaléens nés à Maurice. «Agalega fer parti Répiblik Moris. Bizin péna okenn problem ek enn zanfan agaléen né Moris, bizin kapav dir li enn Agaléen.» 

«Aberrant !» fustige pour sa part Laval Soopramanien. Tout en s’interrogeant sur le fait de savoir si la démarche «constitutionnellement illégale» avancée par Rama Valayden relève d’une «info ou intox», le responsable de l’association Les Amis d’Agalega est remonté. «On doit connaître la vérité certes mais la décence veut que l’avocat aurait pu consulter la communauté avant de faire une conférence de presse. An tan ki juriste responsab, li ti bizin vinn ver nou avan dir sa an piblik ek rod tir enn kapital politik», houspille Laval Soopramanien. 

Sollicité, le Registrar de la Civil Status Division, Mario Ayelou, dément catégoriquement les dires de Rama Valayden. «Je n’ai pas vu les copies montrées lors de la conférence de presse mais je peux dire que ce n’est pas vrai. Comment peut-on faire ça ? C’est illégal et je peux assurer qu’une telle décision n’a pas été prise à l’état civil. Si jamais cela a été le cas, nous avons les moyens de vérifier sur le système et de savoir pourquoi les noms des parents n’y figurent pas.» 

À hier, la seule copie d’acte de naissance brandie par Rama Valayden que nous avons pu consulter est celle d’une Chagossienne née à Peros Banos en 1964. En effet sur la copie qu’il a montrée, les noms des parents ne figurent pas. 

À ce sujet, nous avons fait état du cafouillage rencontré par des descendants de Chagossiens à l’état civil, dans l’express samedi du 25 juin. Ces derniers, qui se préparent pour l’enregistrement afin d’obtenir le passeport britannique, font face à plusieurs obstacles à l’état civil, comme ils y sont éligibles depuis l’amendement à la loi les concernant par la House of Commons le 22 mars. Notamment que l’adresse de leurs ancêtres nés aux Chagos est Maurice sur l’acte de naissance. À ce moment, un préposé de l’état civil interrogé avait parlé «d’erreurs glissées dans les documents par des contractuels lors de l’informatisation des données». 

Nous avons tenté en vain de joindre Rama Valayden durant toute la journée de samedi.