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Immigration Bill 2022: une autre loi Hofman ?
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Immigration Bill 2022: une autre loi Hofman ?
Un amendement présenté comme une simple sauvegarde contre les mariages de convenance d’étrangers/ères recèle une provision qui donne le pouvoir absolu au PM d’enlever la nationalité mauricienne acquise par un étranger. Un air de déjà-vu…
L’intervention de Reza Uteem, mardi, au Parlement, sur le projet d’amendement de l’Immigration Act a enfoncé le clou. Le dépu- té mauve ne remet pas en question le besoin de lutter contre les mariages blancs ou de convenance. Ce qui l’interpelle, c’est la section 11 de la Mauritius Citizen- ship Act qui sera amendée : «by adding the following new subsection – (8) Notwithstanding subsections (5), (6) and (7), the Minister may, in his ab- solute discretion and without giving any reason, deprive any person of his citizenship of Mauritius, if he has reliable information and is satisfied that it is in the interest of defence, public safety or public order».
Cet alinéa permettra au Premier ministre (PM) de révoquer la nationalité mauricienne acquise par tout étranger sans qu’il n’ait à donner ses raisons pour en décider ainsi. Aucun recours auprès d’un tribunal ou autre autorité ne sera possible. Le PM qui accorde la nationalité et qui la révoque comme bon lui semble ? Reza Uteem a, lors de son discours, rappelé la réponse de Pravind Jugnauth, le 30 mars 2021, faite aux députés Patrick Assirvaden et Shakeel Mohamed, dans laquelle il reconnaît que le pilote Patrick Hofman a été déclaré «Prohibited Immigrant» car, entre autres, le PM s’était senti insulté par ce dernier.
Pour rappel, lorsque Shakeel Mohamed lui avait demandé s’il n’était pas en conflit d’intérêts en s’étant senti personnelle- ment insulté et en décidant du sort du pilote belge, Pravind Jugnauth avait répondu : «If I am conflicted, I must, I think, give up my job and my responsibility as Prime Minister!»
Reza Uteem s’est fait un plaisir de rappeler aussi comment le 16 avril 2019, Alan Ganoo, alors dans l’opposition, s’était opposé avec force à l’amendement à l’Immigration Act qui privait le même ancien pilote d’Air Mauritius de la possibilité d’épouser sa compagne mauricienne avec qui il était en couple depuis 12 ans. Reza Uteem a poussé l’ironie pour rappeler aussi que Ganoo est désormais le ministre des Affaires étrangères.
Enfant séparé d’un parent
Outre cette «discrétion absolue» accordée au PM par cet amendement, le député mauve pointe du doigt que si cet amendement est voté, une personne pourra être déchue de sa nationalité mauricienne et même devenir un apatride si elle ne possède aucune autre nationalité. Il cite l’exemple d’Indiens ayant acquis la nationalité mauricienne par mariage ou autrement et qui doivent abandonner celle d’Indien car l’Inde ne permet pas de double nationalité.
Autre anomalie observée par le député du MMM, aucune considération ne sera donnée à l’enfant qui pourrait se retrouver séparé du père ou de la mère s’il doit suivre l’un d’entre eux à l’étranger.
Reza Uteem craint que cette loi ne soit utilisée contre les membres de l’opposition ou journalistes dont le conjoint ou conjointe est d’origine étrangère. Il a cité un autre exemple, celui de Sherry Singh, d’origine indienne.
En réponse, la ministre Fazila Jeewa-Daureeawoo n’a point rassuré en affirmant que la sécurité nationale sur laquelle se basera le PM pour déchoir quelqu’un de la nationalité mauricienne acquise est primordiale et ne peut de ce fait être discutée devant une cour de justice.
Rendez-vous mardi prochain pour la suite des autres interventions et du summing-up de Pravind Jugnauth. Reviendra-t-il sur sa décision de s’auto-octroyer le pouvoir de révoquer la nationalité à tout étranger et, cela, sans donner de raisons ? Il serait intéressant de voir s’il a appris les leçons des derniers événements.
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