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Notation de Moody’s: Maurice n’a plus le droit à l’erreur
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Notation de Moody’s: Maurice n’a plus le droit à l’erreur
Tout faux pas nous est désormais interdit. Le fait que l’agence Moody’s rétrograde sa notation de notre dette souveraine de Baa2 négatif à Baa3 stable met les institutions chargées de veiller à la stabilité financière du pays dans une situation inconfortable. Car Maurice n’est pas loin de se retrouver parmi les États dont le taux d’endettement est si fort que leur capacité de remboursement s’est amenuisée au point d’ouvrir large la porte à la spéculation financière.
Les institutions gardiennes des ressources financières du pays, que ce soit au niveau de leur utilisation ou des actions devant prises pour en faire l’acquisition n’ont qu’à bien se tenir. Elles n’ont plus le droit à l’erreur. La rigueur est de mise. Car si la situation actuelle qui est caractérisée par une étonnante facilité à alourdir la dette souveraine, il est presque certain que le statut de Maurice risque de basculer dans le junk au niveau de la catégorie des pays qui éprouvent énormément de difficulté à honorer leurs dettes. C’est le message clair et net qui sous-tend la dernière publication des résultats d’analyse de la situation financière du pays effectuée, entre autres, par les agences de notation américaines Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch Rating Ltd. C’est ainsi que la notation de Moody’s passe de Baa2 négatif à la notation de Baa3 stable.
Mauvaise nouvelle en dépit des paroles réconfortantes tant du ministère des Finances que de la Banque de Maurice (BoM) face au verdict de Moody’s. C’est ainsi que pour les analystes de cette agence de notation, le classement de Maurice est passée de Baa2 négatif au Baa 3 stable. En cas d’émergence d’une nouvelle phase de dégradation, le pays passera dans la catégorie Ba1, qui est le cas de ces pays où le taux d’endettement souverain – dettes contractées par l’État – a atteint un niveau où leur remboursement est devenu quasi impossible.
Ces pays sont exposés à un gros risque de spéculation financière, phénomène auquel Gérard Esptein, professeur d’économie à l’université de Massachusetts aux États-Unis et Pierre Habbard, conseiller à la commission consultative de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), ont attribué une effrayante définition dans un ouvrage publié en octobre 2011 sous le titre Dette souveraine et spéculation : une interaction insidieuse. «Au sens large», écrivent-ils, «se qualifie comme spéculation financière, toute activité financière improductive. Les ressources substantielles attribuées au secteur financier, à ses revenus élevés et à ses profits sont autant de ressources soustraites à d’autres secteurs de l’économie dont elles peuvent détruire éventuellement la richesse au passage». Dans une nouvelle définition, insistent ces deux experts, «la spéculation financière englobe toutes les activités dont l’utilité sociale à l’économie dite réelle est proche de zéro et n’incluent pas nécessairement des paris sur les variations à court termes des prix d’actifs et en tout cas ne s’y limitent pas».
En d’autres mots, c’est une situation où il n’y a pas de stabilité financière et où tous les facteurs pouvant potentiellement créer la confiance dans une économie ne sont presque pas palpables, pour ne pas dire inexistants. Qui dit spéculation financière présuppose que l’attention des acteurs du secteur financier est plutôt braquée sur les éventuelles variations des prix. Dans une telle situation, quel investisseur prendra le risque de s’installer dans un environnement où le danger d’une réduction de la valeur de ses actifs est derrière la porte ?
La Banque centrale ainsi que le ministère des Finances tentent de rassurer tant l’opinion publique que les acteurs qui ont l’œil sur leurs sous. Car si le risque est latent, il ne se matérialisera que si rien n’est entrepris pour ne pas succomber à ses tentacules. La volonté de rebondir face aux signaux inquiétants mis en évidence par les analystes de Moody’s est de mise pour ces deux institutions qu’on pointera du doigt si jamais la situation financière du pays se dégrade. Maurice est-elle en mesure de l’éviter? C’est ce que le pays doit démontrer.
En filigrane du coup de massue de ces agences de notation, les observations, on ne peut plus claires, du Fonds monétaire international dont les analystes haussent les épaules devant la vitesse à laquelle l’endettement souverain prend l’ascenseur et face au mécanisme utilisé par certaines institutions pour faire de sorte que la tendance vers l’endettement souverain fonctionne comme une lettre à la poste. Il invite fortement le gouvernement à réduire le niveau de son endettement par rapport à son Produit intérieur brut, dont les paramètres permettent de jauger la capacité de remboursement des dettes d’un État. Il va de soi qu’en aucun cas, la capacité à emprunter ne doit être supérieure à ses revenus.
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