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Sniffing: le PM attend des preuves... qui s’accumulent pourtant contre lui

1 août 2022, 21:07

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Sniffing: le PM attend des preuves... qui s’accumulent pourtant contre lui

Ils sont nombreux, y compris Pravind Jugnauth et ses ministres, à exiger des preuves de Sherry Singh. N’est-ce pas au Premier ministre (PM) de venir prouver le contraire de ce qu’a allégué l’ex-patron de Mauritius Telecom ? Jusqu’à présent, les seuls documents tangibles ne viennent pas du pouvoir et contredisent les déclarations du PM à chaque fois…

Voyons les preuves rendues publiques et l’évolution du discours du gouvernement. Preuves d’ordres venus du PMO Il y a eu les accusations faites par Sherry Singh en public que Pravind Jugnauth l’a obligé à permettre à trois obscurs techniciens indiens d’intervenir sur notre réseau de communication. Après avoir une première fois nié avoir donné ces ordres par téléphone et même nié lui avoir parlé, le PM a fini par avouer qu’il a bien passé un coup de fil et un savon à l’ex-Chief Executive Officer de Mauritius Telecom (MT) le 14 avril, soit à la veille de la visite des Indiens à la station ultra-sécurisée de Baie-du-Jacotet. C’est la première preuve, même si elle est circonstancielle.

Deuxième preuve, on a vu la descente effective des ingénieurs indiens à la landing station du câble SAFE et leur départ 6 heures plus tard. Face à ces images diffusées sur la vidéo live de Radio Plus le 22 juillet, le gouvernement n’a pas démenti cette visite mais a parlé de «survey». Et a nié qu’il y a eu capture de données.

Il y a aussi les lettres du 21 octobre et du 22 décembre 2021, rendues publiques le 19 juillet par Xavier-Luc Duval. L’existence de ces missives et leur contenu n’ont pas été démentis par Pravind Jugnauth au Parlement ce jour-là. Ni après. Pour rappel, lorsque le leader de l’opposition a acculé le PM en lui demandant si ces lettres ne prouvent pas qu’il n’y a jamais eu demande de «survey» venant du Prime Minister’s Office (PMO) mais demande d’informations, Pravind Jugnauth a maintenu que Sherry Singh était au courant qu’il y aurait un «survey».«There are witnesses, there is evidence, but these testimonies, of course, will be taken by the Police, and then you will see!»

La troisième preuve, donc, concernant ces deux lettres (plus une troisième lettre de Sherry Singh en date du 24 décembre) a bien été rendue publique par les soins de Xavier-Luc Duval. C’est la contrepreuve de Pravind Jugnauth qui manque au public, et qu’il a promis qu’elle sera prise par la police. Il venait le 11 juillet de déposer plainte contre l’ex-CEO de MT. D’après sa réponse, la police «prendra ces preuves et témoignages» qu’il lui a déjà communiqués ? Ou que la police recherchera ? On ne le sait pas. Toujours est-il qu’alors que Pravind Jugnauth reproche à Sherry Singh – à tort – de ne pas avoir dévoilé d’autres preuves à Radio Plus et à l’express, voilà que c’est lui qui en fait ne dévoile pas ses preuves, ni dans les médias ni, pire, au Parlement. Il s’en remet à sa police.

Les rapports

«Il n’existe pas de rapport», s’écriait Pravind Jugnauth à l’Assemblée nationale, ce même 19 juillet, tout en demandant à Xavier Duval :«Qu’est-ce qu’il y a dans ce rapport ?» Un «rapport» était apparu opportunément dans le journal Le Mauricien le 18 juillet, à la veille de la Private Notice Question (PNQ). Le rapport en question, une lettre, datée du 2 juillet, dans lequel l’ex-Chief Technical Officer Girish Guddoy semble dire qu’il n’y a eu aucun sniffing le 15 avril à Baie-du-Jacotet.

Des preuves bien précises, comme la baisse de trafic Internet le 15 avril et la «data capture», sur la région de Rose-Hill, sans que Pravind Jugnauth ne présente rien pour démontrer le contraire.

Lors de la même séance parlementaire, Osman Mahomed demandera au PM si ce dernier se base sur ce «rapport» fuité pour dire qu’il n’y a pas eu d’espionnage d’Internet. Et attirera son attention sur le fait que le document n’est pas un rapport technique et n’a pas été rédigé sur un papier à en-tête de MT. Pravind Jugnauth élude la question et n’authentifie pas ce rapport du 2 juillet qui aurait pu pourtant le blanchir puisqu’il avait affirmé qu’il n’y a pas eu de sniffing. Le PM dira que «this is hearsay». C’est donc Pravind Jugnauth qui nous doit un autre rapport, comme le lui demande Osman Mahomed. Mais il nie encore une fois l’existence de cet autre rapport et réfère le député à la police.

Un deuxième rapport en date du 12 juillet est publié lors de la deuxième interview de Sherry Singh sur Radio Plus, le 22 juillet. Ce rapport dont Pravind Jugnauth ne croyait pas en l’existence affirme qu’il y a bien eu sniffing et même data capture. Malheureusement, on n’a pas pu obtenir ses explications à ce sujet au Parlement par la suite car les deux PNQ des 26 et 28 juillet avaient trait à Agalega. Cependant, le ministre Deepak Balgobin, lui, en a parlé le 23 juillet et a demandé que l’on se fie plutôt au rapport du 2 juillet que son propre PM qualifiait pourtant de «hearsay evidence». Le ministre des TIC ne veut pas entendre parler du rapport du 12 juillet qu’il qualifie de «A day at the seaside».

D’autres au gouvernement changent carrément de défense en arguant, selon Le Défi Plus, que «si ce document est authentique, il ne vient en aucun cas mettre le PM dans l’embarras. Il a toujours dit qu’aucun équipement n’a été installé. Si on vérifie sur place, on verra que les techniciens indiens n’ont pas laissé d’équipement».

En conclusion, on peut dire que les preuves contre Pravind Jugnauth sont, valeur du jour, accablantes. Mais grâce aux miracles de la communication, à l’aide de Sooroojdev Phokeer au Parlement et à la police, il a pu dire et dit toujours qu’aucune preuve n’a été produite contre lui.