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Sattar Hajee Abdoula: une omniprésence qui provoque d’inévitables conflits d’intérêts
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Sattar Hajee Abdoula: une omniprésence qui provoque d’inévitables conflits d’intérêts
Il s’est rendu célèbre pour sa nomination à la tête de plusieurs institutions publiques, engendrant des conflits d’intérêts, depuis l’affaire BAI. À tel point qu’un client de la SBM, le groupe Pabari du Kenya, a mis tout ça sur un affidavit. Son nom revient comme un leitmotiv. Que fait le financier pour être à ce point protégé ?
Il est certain que Sattar Hajee Abdoula (SHA) n’est pas responsable des pertes de Rs 12 milliards de la SBM. Cependant, au lieu de permettre le recouvrement des Rs 4,5 milliards dues par le groupe Pabari, il aurait, accuse ce dernier, tout fait pour les mener à la faillite et ainsi bénéficier, à travers sa firme Grant Thornton, des émoluments de liquidateurs ou administrateurs.
L’autre chef-d’oeuvre de SHA : celui d’administrateur d’Air Mauritius (MK). Ses ventes d’avions à prix soldés auront fait perdre plusieurs milliards à la compagnie. Qui heureusement, a bénéficié de l’aide de la Mauritius Investment Corporation (MIC). Ce qui a fait dire à Raj Ramlugun que l’administration de MK était inutile puisque l’État allait quand même y injecter Rs 25 milliards, chose que SHA ne pouvait ignorer. Mais ce ne fut pas inutile pour Grant Thornton de SHA, qui a récolté officiellement Rs 158 millions comme honoraires. Et d’autres revenus…
Dans une interview accordée récemment à l’express, l’ex-ministre de la Bonne gouvernance Sudhir Sesungkur nous expliquait que le même Sattar Hajee Abdoula cumulait au moins deux situations de conflits d’intérêts lorsque celuici administrait Air Mauritius. SHA était le chairman de SBM Holdings, alors que cette banque était l’un des créanciers de MK. De plus, c’est sa firme Grant Thornton qui avait évalué les actifs d’Air Mauritius avant la mise sous administration qu’il a assurée lui-même.
«Sha» répondait aux ordres de «Pravind»
Il est comme ça, SHA. Les situations de conflits d’intérêts, ça le connaît. On se souvient comment, étant administrateur de feue BAI, il était parti négocier avec Dawood Rawat à Paris. Nommé assesseur à la commission d’enquête sur Britam alors que c’est lui qui avait été l’administrateur de la même BAI. Et l’on ne parle pas de ses énormes frais de Rs 25 millions pour l’administration de BAI. Lorsque le ministre des Services financiers de l’époque, Roshi Bhadain, refuse de les lui payer, celuici est convoqué en janvier 2017 par le ministre des Technologies de l’information de l’époque, Pravind Jugnauth, qui insiste pour que ces Rs 25 millions soient remises au plus vite. Nouveau refus du Conseil des ministres mais, quelques jours après le départ de Bhadain du gouvernement, en février 2017, SHA recevait ses Rs 25 millions. Cet épisode prouverait donc que SHA était très proche de Pravind Jugnauth même avant que ce dernier ne devienne ministre des Finances et PM par la suite. D’ailleurs, la fameuse bande sonore d’une conversation entre Bhai Sattar, dépêché à Paris pour rencontrer Dawood Rawat, démontre que SHA répondait déjà aux ordres de Pravind Jugnauth qu’il appelait «Pravind».
D’autres vous diront que sa proximité avec le clan de Pravind Jugnauth date de 2013, lorsqu’il avait tout fait pour empêcher que l’hôtel Maradiva de la belle-famille premier-ministérielle soit saisi par la SBM. Bhai Sattar nie.
On nous fait savoir aussi que SHA était le recouvreur des dettes attitré des institutions publiques. Et transaction advisor, toujours pour les ventes des actifs de nos canards boiteux. Sa firme Grant Thornton cherche toujours un repreneur pour la National Insurance Company depuis… 2017.
Mais il est aussi consultant, SHA. Comme à Mauritius Duty Free Paradise, où il a fait installer un système informatique à Rs 150 millions qui a connu deux crashes et n’est toujours pas au point, selon un employé.
Lorsque l’hebdo Week-End a fait état de propriétés à Dubaï, y compris au Burj Kalifah, nous lui avions demandé si c’était bien de lui dont on parlait. Pris de colère, il n’a répondu ni par oui ni par non. Et les 400 millions de dollars qui se baladaient entre Dubaï et Maurice ? Réponse de SHA après quelques minutes, «non». Pourtant, c’est bien la Management Company (MC) Trust Qore qui gère ce fonds, MC avec lequel il est lié de plusieurs façons, dont à travers sa firme Morison. SHA nie être lié avec Morison. Connaîtil ce Dr Z, ce Syrien qui serait l’ultime bénéficiaire de cette énorme somme ? «Non». Il dément aussi avoir rencontré le Syrien à l’hôtel Royal Palm en mars. Si c’est son propre cousin avoué qui s’occupe de ce dossier, ce ne serait qu’une coïncidence, cousin qui est également l’un des juristes de la SBM qui a à sa tête le cousin Sattar. On ne sait pas à qui appartiennent ces 400 millions de dollars (Rs 17 milliards) et l’on essaye de nous faire croire que c’est ce Dr Z qui en est l’ultime bénéficiaire. Contacté, ce dernier nous a répondu qu’il existe des «life threatening risks (to myself and my family)…» A-t-on essayé de nous faire peur, à nous aussi, en nous faisant croire que les bénéficiaires seraient proches soit du pouvoir syrien soit de l’opposition islamiste ? Et les lois concernant la lutte contre le financement du terrorisme dans tout ça ? La Financial Services Commission (FSC) nous fait savoir, elle, qu’elle est satisfaite de ne pas connaître l’identité des véritables ultimes bénéficiaires de ces USD 400 millions vu que l’argent provient d’une banque dubaïote. Est-il nécessaire de rappeler que les Émirats arabes unis viennent d’être placés sur la liste grise du GAFI ?
Revenons à SHA. Son nom est cité dans les Pandora Papers et lorsque l‘express lui demande pourquoi il détient, avec Yuvraj Thacoor, des actions au sein de Regula Ltd, une structure basée aux îles Vierges britanniques et qui était soupçonnée de cacher la fortune de milliardaires et de blanchir leur argent, SHA répond que tout ce qu’il a fait avec Yuvraj Thacoor là-bas, c’est «souscrire à une police d’assurance vie que m’a vendue la Deutsche Bank».
Assuré auprès de la Deutsche Bank ! SHA, qui agissait dans l’ombre dès l’arrivée au pouvoir du gouvernement Lepep en 2014, est soupçonné en fait d’être le cerveau financier de Lakwizinn. Ceci explique-t-il l’indifférence ou plutôt la tolérance de nos autorités devant tant de conflits d’intérêts et d’opacité ? SHA gère aussi une Management Company, Annex, qui compterait parmi ses clients de riches Mauriciens, bien placés.
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