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La Banque mondiale sollicitée pour la piste de Plaine-Corail
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La Banque mondiale sollicitée pour la piste de Plaine-Corail
Du lourd pour Plaine-Corail. Une délégation de la Banque mondiale, accompagnée des représentants du gouvernement mauricien, a visité Rodrigues hier pour prendre connaissance des détails du projet d’agrandisse- ment de la piste d’atterrissage de Plaine-Corail. Le dossier a été présenté par le chef commissaire Johnson Roussety lors d’une session de travail. Ils ont ensuite visité le site prévu pour cette piste. Les Rodriguais, tout comme les représentants du gouvernement central, sont «très confiants» que la Banque mondiale financera les travaux dont le coût est estimé à environ Rs 4 milliards (85 millions d’euros). L’Union européenne a déjà promis une aide de 16 millions d’euros.
Le gouvernement mauricien a dû chercher un autre bailleur des fonds après que l’Agence française de développement se soit retirée sur la pointe de pieds sans donner de véritable explication au gouvernement. Si officiellement c’est pour raisons environnementales que cette agence a plié bagage, certains affirment qu’il y aurait d’autres raisons que ses dirigeants ne veulent pas rendre publiques pour ne pas froisser les relations entre l’AFD et les autorités mauriciennes.\
Quand l’Independent Review Panel avait statué que c’était une compagnie privée
Au-delà de la question de savoir pourquoi l’Agence Française de développement a annulé le prêt de Rs 3 milliards à ce projet, il serait intéressant de revenir sur une décision de l’Independent Review Panel du 30 septembre 2021, qui porte un coup à la transparence dans la gestion des deniers publics.
Royal Haskoning DHV (Pty) Ltd (RHD), une société de conseil hollandaise, contestait, en septembre 2021, devant l’Independent Review Panel (IRP) l’attribution du contrat de consultancy à Gibb (Mauritius) Ltd pour la construction du nouvel aérodrome de Rodrigues. RHD arguait que Gibb était en conflit d’intérêts, étant déjà bénéficiaire du contrat préliminaire du «Design, cost estimation and preparation of Tender Documents» ; que Gibb avait offert un prix anormalement bas, ce qui devrait soulever des interrogations quant à sa capacité à mener avec succès le projet et, enfin, que Gibb ne satisfaisait pas aux exigences concernant les qualifications et compétences du personnel technique requis.
Cependant, l’IRP ne s’est finalement pas penché sur ces points importants car il a dû trancher d’entrée une objection soulevée par Airport of Rodrigues Ltd (ARL) qu’ARL n’est pas soumise à la Public Procurement Act (PPA) et que donc l’IRP n’avait pas juridiction dans cette affaire.
Ce qu’allait décider l’IRP était important car impliquant un gros projet à Rs 3 milliards mais pouvant aussi concerner potentiellement d’autres institutions, dont les autres subsidiaires d’Airports of Mauritius Ltd (AML). Et concerner la transparence dans la gestion de l’argent public en général, argent qui est parfois mis dans des entités que l’on appelle compagnies gouvernementales ou Special Vehicles. Certes, si ARL n’est pas considérée comme une compagnie gouvernementale, c’est quand même l’argent du gouvernement qui a été utilisé pour sa mise sur pied.
«Ce qu’allait décider l’IRP était important car impliquant un gros projet à Rs 3 milliards mais pouvant aussi concerner potentiellement d’autres institutions.»
D’ailleurs, le défendeur, ARL, avait lui-même cru au début qu’il devait être soumis à la PPA. Ce n‘est que peu après qu’il est venu avec cet argument. Voici ce qu’a décidé l’IRP le 30 septembre 2021 : Airport of Mauritius Ltd (AML) avait en 2018 acquis 99,99 % des actions d’Airport of Rodrigues (ARL) qui est devenue ainsi une de ses filiales. Bien qu’AML soit enregistrée comme une compagnie privée, elle est, elle, bien soumise à la Public Procurement Act, cela par son inclusion dès 2006 par les législateurs dans le schedule à la PPA.
Toutefois, la présidente de l’IRP, J. Ramano, trouve d’emblée qu’AML «is one of the entities having the unusual position […] of being companies run as a private entity, but having been roped into the procurement laws by being included in the Schedule to the PPA». Elle semble donc remettre en question une décision du législatif en 2006 d’inclure, pour des raisons évidentes de transparence dans la gestion de l’argent public, ARL dans le champ d’application de la PPA. Raisons que la présidente, elle-même, cite au début de son ruling : «However, a final species is added for the purposes of procurement laws, those bodies that are not public per se but which Parliament has deemed fit to specify in the Schedule to the PPA - no doubt because it felt that these organisations should be subject to the enhanced scrutiny of the public procurement process. […] we can surmise that Parliament has chosen to bring them within such enhanced scrutiny because of the level of influence the government has in their operations.»
Et, se basant un peu sur ses propres doutes sur le bien-fondé d’une décision parlementaire, J. Ramano se demande pour quelles raisons une des subsidiaires d’AML devrait être elle aussi incluse dans la PPA. C’est vrai, lors de l’achat d’ARL par AML, personne n’a pensé à inclure ARL dans la PPA. Mais cela veut-il dire qu’elle doit en être exclue ?
La présidente pense que oui car pour elle si le législateur voulait qu’ARL tombe sous la PPA, il aurait dû l’avoir inclus comme il l’a fait pour AML (et d’autres entreprises, ditelle) en 2006. «The legislator in 2006 chose to include AML as one of the exceptional entities in the procurement laws but not ARL.» Or, c’est en 2007 qu’ARL a obtenu son statut de compagnie publique responsable du projet d’aérodrome par le rachat par le gouvernement de 99,99 % de ses actions (actions qui seront transférées à AML en 2018), faisant de l’État l’actionnaire principal d’ARL.
«ARL n’est pas soumise à la Public Procurement Act.»
Cependant, il est vrai qu’à partir de 2008 jusqu’à 2018, les différents gouvernements n’ont pas inclus ARL dans la PPA. Pourquoi? On ne le sait. Les personnes contactées ne s’en souviennent pas. Ce qui fait dire à la présidente de l’IRT : «Many a time Parliament has amended the PPA, starting in 2008. Crucially, the Schedule to the PPA which lists eligible entities was also regularly amended since then. The year 2008 also saw the passing of the PPR (NdlR : les fameuses Public Procurement Regulations avant l’allocation du contrat à Betamax).» En fait, ce n’est qu’en 2018 qu’il était encore plus crucial d’inclure ARL sous la PPA car c’est en 2018 qu’ARL est devenue une subsidiaire d’AML. Le gouvernement ne l’a pas fait. Pourquoi ? Pour un avocat qui a travaillé sur ce dossier, c’était délibéré «car il n’aime pas la PPA».
L’IRP a également rejeté les autres arguments de RHD comme le fait que ARL «carries out a public function of sorts and was transferred the undertaking of governement in respect of the aerodrome in Rodrigues». L’IRP rejette aussi le fait qu’ARL ait été ajoutée au schedule de la Statutory Bodies Pensions Funds Act. Rejeté aussi l’argument que le gouvernement central avait racheté 99,99 % des actions d’ARL le faisant le propriétaire de facto d’ARL.
Pour l’IRP, on ne peut non plus assimiler ARL à un corps paraétatique et ainsi le mettre sous le champ d’application de la PPA sinon, dit l’autorité, cela équivaudrait à obliger les collèges secondaires à se soumettre à la PPA. Et l’autorité avance qu’après tout, ARL obtiendra le financement du projet de l’Agence française de développement (AFD) et de l’Union européenne (UE).
On sait cependant qu’AFD a annulé le prêt. Nous attendons la réponse de l’UE. On se demande cependant qui remboursera la dette à l’UE (ou la Banque Mondiale, qui aurait aussi été approchée, voir plus loin). Les revenus d’ARL suffiront-ils ou le gouvernement central devra mettre la main à la poche… du contribuable ?
Et qu’ARL ait elle-même utilisé le qualificatif de «public body» lors de la Request for Proposal au début où elle s’était ouvertement déclarée comme soumise à la PPA et aux PPR, l’IRP trouve tout cela malheureux.
Pour conclure, l’IRP dit n’être pas convaincu qu’ARL doive tomber sous la PPA que ce soit comme corps paraétatique ou comme subsidiaire d’AML.
Si l’on suit le raisonnement de l’IRP, on devrait s’attendre à ce que d’autres entités créées par le gouvernement avec l’argent du gouvernement et pour l’intérêt public échappent aux lois de Procurement.
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