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Interview | Bissoon Mungroo: «Kistnen? Pravind Jugnauth sait qui a fait ça»

16 octobre 2022, 20:30

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Interview | Bissoon Mungroo: «Kistnen? Pravind Jugnauth sait qui a fait ça»

Un membre du MSM qui a le courage d’affronter nos questions, ça ne court pas les rues. Là où semaine après semaine, les ténors du Sun Trust et de l’hôtel du gouvernement décident de fuir, Bissoon Mungroo accepte le défi. Juste pour ça, il mérite un minimum de considération. Pour le reste, c’est du Bissoon...

Vous avez, cette semaine, été nommé consul honoraire du Suriname. À la rédaction de l’express on s’est dit : «quel juteux business Bissoon Mungroo a-t-il pu encore trouver au Suriname ?»
Laissez-moi vous dire que le Suriname a un incroyable potentiel. Ils ont de l’or, des diamants, du pétrole, du fer et du cuivre. Mais durant des années, le pays a été géré par des têtes brûlées qui ont ruiné le pays. Aujourd’hui, ce pays se remet sur pied. Dans cinq ans, ce sera la référence de l’Amérique latine.

C’est bien ce qu’on se disait. «Kot éna kas éna Bissoon !»
Lés dimounn dir se ki zot anvi. Ce n’est pas une histoire d’argent. C’est une histoire d’amitié. Le président du Suriname élu en 2020 est un très bon ami.

Chan Santokhi est votre ami ?
Bien sûr ! (Il fronce les sourcils). Je l’ai rencontré en 2002 en Inde. J’y accompagnais sir Anerood Jugnauth pour une visite médicale. SAJ (qu’il appelle ‘sir’ tout le long de l’interview) était alors Premier ministre. Pa ti éna bodygard narien pou sa vwayaz la in. Nou nék inn allé, mwa, mo madam, SAJ ek Lady. SAJ so PS mém pa ti koné kot li. Nous étions donc, sur le chemin du retour, en transit à Mumbai, et Chan Santokhi, alors leader de l’opposition du Suriname, y était aussi. Le consul du Suriname à Mumbai offrait ce soir-là une réception. Chan Santokhi a appris que le Premier ministre mauricien était en ville et a voulu inviter SAJ pour commencer une relation.

C’est vers moi que la requête était venue ; j’en ai parlé à SAJ et nous sommes allés à la réception. Lors des présentations, SAJ lui a dit à mon sujet : «Voici mon plus fidèle compagnon.» À la fin de la soirée, après que nous avons sympathisé, il a dit à SAJ : «You’ve got a real good somebody (sic) who is attached to you.» (NdlR : les mots exacts de Bissoon Mungroo). Chan Santokhi m’a mis la main sur l’épaule et s’est adressé à SAJ : «Within the few minutes I’ve spent with him, he appears to be a smart person who knows a lot about your country.» SAJ est rentré à l’hôtel, je suis resté et discuté pendant plus d’une demi-heure avec Chan Santokhi. Nous avons parlé des similarités entre nos deux pays. Le Suriname et Maurice sont des copies parfaites. Que ce soit en termes de communautés, de populations, de culture, de nourriture. Il m’a dit : «Il faudra qu’on collabore et qu’on s’entraide ; nos pays ont tellement de choses en commun.»

Nous avons fait comprendre à Pravind que Ken Arian était un problème.

Vous êtes allé combien de fois au Suriname ?
Plis ki 10 fwa mo kamarad! Depuis que Kamarad Santokhi a été élu en 2020, j’y suis allé cinq fois. Vous vous étonnez qu’il soit mon ami ? Laissez-moi vous dire que j’ai fait campagne pour lui au Suriname.

«Pa badiné !» Que saviez-vous du Suriname pour y faire campagne ?
Mo pé dir ou ! Monn lir. Vous savez, il y a une grande communauté de Surinamais aux Pays-Bas. Je leur ai ouvert les portes de Maurice et beaucoup viennent pour Divali et Holi. Venez avec moi un jour à Amsterdam. Vous n’avez rien à payer. You are taken care from airport to back to airport. Un des neveux de Santokhi qui est médecin vit là-bas. Il m’a dit qu’il allait au Suriname pour la campagne de Bhai Chan et m’a demandé de l’y accompagner pour une semaine pour voir comment est une campagne. Monn alé monn mont lor kamion monn koz an hindi pour convaincre la communauté hindoue que leur intérêt, c’est de soutenir Chan.

Une campagne à la Dulthummun ?
(La remarque le fait tiquer puis il sourit). Alé, nou dir enn kanpayn kouma Dulthummun.  Ce que j’ai fait, c’est convaincre nou kominoté pou vot Chan.

Votre nomination comme consul honoraire du Suriname découle bien du fait que vous êtes dans les bons papiers du gouvernement…
Surtout pas. La recommandation vient d’abord du gouvernement du Suriname. Ensuite, le conseil des ministres l’approuve. Puis le président de la République informe le Suriname que le gouvernement mauricien n’a pas d’objection. Le Suriname confirme alors sa recommandation. Ça a pris 10 mois. Le premier document qu’il m’a fallu soumettre aux deux gouvernements, c’est un certificat de moralité.

Ça ne pose pas problème au Suriname que son consul honoraire à Maurice traîne un procès pour blanchiment d’argent ?
Comment ça ? Quel procès ?

La charge provisoire contre vous Bissoon Mungroo ! Votre compagnie Gitanjali avait fourni des masques au gouvernement et vous avez été arrêté !
Eoula ! Koné ki ou pé dir ! Inn fini sa !

L’accusation a été rayée ?
Bizin dir inn réyé ém sa. Il n’y a plus rien depuis que tout est bloqué avec sa bann makro Permanent Secretaries la, Ganoo so sér la, tousala. J’ai un certificat de moralité. Je vais le chercher. (Et il se met à chercher dans les dizaines de chemises posées sur sa table).

Ce qui agace la vieille garde du MSM, c’est que «bef travay, souval manzé»

Vous chercherez plus tard.
(Il continue de chercher.) Non, attendez, il ne faut pas qu’il y ait une quelconque ambiguïté là-dessus. Là, tenez, regardez ! Prenez une photo.

Mais l’accusation provisoire est toujours là…
Puisque je vous dis qu’elle ne tient pas. L’ICAC fait exprès de ne pas faire avancer l’enquête parce que si elle avance, je serai blanchi et je vais les poursuivre.

Attendez, il n’est pas donné à tout le monde de proposer Rs 8 million de masques au gouvernement et d’obtenir le deal.
Quand le Covid a éclaté, j’étais en Inde. C’était la panique mondiale pour trouver des masques. Un ami, un réel top shot du business indien, m’a dit qu’il avait trouvé un fournisseur en Chine. C’est dans un souci patriotique que je lui demandé de me mettre en contact avec ce fournisseur. Il m’a dit de lui payer des commissions si le deal se fait. Voilà pourquoi ma marge était de 24 %. J’ai fait ma proposition au gouvernement, et comme il y avait un réel risque que nous soyons à court de masques, le gouvernement a accepté.

Allez, il y a quand même eu un petit coup de fil par-ci par-là pour obtenir le deal. Vous êtes Bissoon Mungroo quand même !
Zéro mo dir ou. Zéro. Et on m’accuse de money laundering ? C’est après que mon offre a été acceptée que les autorités ont imposé un plafond de marge à 15 %. Ne me mettez pas dans le même panier que les autres fournisseurs subséquents. (Il prend un air sérieux). Et laissez-moi vous dire – marké gardé – je serai la première personne de ce pays à poursuivre le directeur de l’ICAC pour faute professionnelle. Lui et ses deux enquêteurs. Tout est prêt ; rédigé par feu Yusuf Mohamed.

Vous lui réclamez combien ?
Rs 50 millions, mo pé dir ou.

Voyons, Navin Beekarry c’est l’ami de SAJ.
Je vais vous répondre comme SAJ : «Mo bien pipi.»

L’ICAC de Navin Beekarry a été l’auteur du retournement qui a fait que Pravind Jugnauth remporte son procès dans l’affaire MedPoint au Privy Council. Ce dernier ne sera pas content.
Mo bien pipi ! Il a commis une faute grave à mon égard en m’arrêtant. Je ne blâme pas le gouvernement. Je ne vais pas vous dire que je ne suis pas dans les good books. Jamais ! Je ne vais jamais changer de parti politique. Mo pou saryé lanblem sir Anerood ziska mo mor, mé Beekarry éna boukou pou péyé. J’attends l’issue de l’enquête pour le poursuivre personnellement. Voilà pourquoi l’ICAC n’est pas en train de la boucler. Depuis tout ce temps, vous n’entendez, rien ? Écrivez aux autorités et demandez où en est l’enquête. Comme l’affaire Kistnen. Ekrir dimandé kot inn arivé !

Vous le connaissiez, Kistnen ?
Bien sûr. Je connais tous les agents du MSM. C’est une affaire terriblement attristante. Celui qui a tué ou commandité son assassinat, pou éna boukou pou péyé.

L’enquête judiciaire ne donne pas 10 000 pistes. Il n’y a que trois mobiles possibles : les Kistnen Papers, les contrats de la STC ou l’emploi fictif de Madame Kistnen comme «constituency clerk».
Justement. J’ai ma petite idée. Mais mes soupçons ne valent rien. Il faut se fier au rapport d’enquête judiciaire.

Mais Pravind Jugnauth n’a pas l’air de vouloir savoir qui a tué Kistnen.
Si je sais qui l’a fait, pourquoi dois-je continuer à chercher et montrer que je cherche ? Pravind Jugnauth sait qui a fait ça !

Quoi ?
Il a dû arriver à une conclusion à la lumière des travaux de l’enquête judiciaire. Pour moi, l’enquête judiciaire est claire.

Pravind Jugnauth ne montre aucun respect pour la mort de Kistnen. Il a dit : «Lagazet pé alé mem ar sa, ziska mo ti krwar lagazet-la apel Kistnen».
Il n’est pas en train de prendre des décisions et cela entraînera des répercussions.

Pour vous donc, l’affaire n’est pas complexe ?
À la base de l’enquête judiciaire, des éléments qui en sont sortis, des exhibits, des témoignages, ce n’est pas difficile. Zot pé élisid gran gran krim, bé sa case là ki été sa. C’est arrivé en pleine ville. Pann ariv sa dan kaskad si pa ki.

Les Kistnen Papers expliquent les millions dépensés pour la campagne du no 8. Vous qui avez été le confident de SAJ et à ses côtés durant tant de campagnes, c’est plausible ?
(Il jette son stylo sur la table et s’affale sur sa chaise). Get sa mo frer. Nou tou koné. Ou pa sinwa nef. Mo pa sinwa nef. On sait tous que les dépenses électorales ne se résument pas au chiffre que l’on jure sur le tibout papye ki deklaré apré eleksyon la. Li pa sa !

Tous les députés commencent leur mandat avec un mensonge, donc.
(Rires). Ils commencent leur campagne lamé dan pos. Je me permets de vous donner un chiffre. Un novice qui descend dans l’arène politique, à partir du moment où il reçoit la bénédiction du leader et qu’il commence sa campagne, il lui faut 5 à 10 millions de ses fonds personnels. Per-so-nél mo pé dir ou la. A par saki parti donn li. Li bizin tiré dan so lakaz, ar so fami, so bann kamarad, so bann donater. Oubliez ce qui est donné au leader, au parti et tout.

Si ou péna Rs 10 millions dan pos, ou pa poz kandida.

5 à 10 millions ? «A koz sa ém zot kokin kan zot rant dan gouvernma !»
Vous êtes en train de le dire. Pas moi. Ce que je peux vous dire, c’est que j’ai été aux côtés de SAJ depuis 1984. J’ai suivi beaucoup d’élections. Le carnet de Kistnen – paix à son âme – j’en ai vu 2 ou 3 à toutes les élections depuis 1987. Je peux vous donner toutes les dépenses, circonscription par circonscription. J’ai vu SAJ établir les limites de dépenses pour les circonscriptions. Une fois, un membre influent est venu demander de l’argent pour un meeting à Mahébourg. SAJ m’a demandé de lui remettre Rs 20 000. Il m’a dit, «Rs 20 000 ki mo pou al fer ar sa, mo pa kav fer narien ar sa.» Je lui ai dit, «Ki mo pou fer mwa matlo. Mwa osi mo pa kav fer narien. Swa ou pran swa ou kit la ém».

Rs 20 000 c’était vraiment insuffisant pour lui ?
Bé li bizin péy latab, latant, sonorization lot lot, pé donn manzé, pé donn divin. Il est allé se plaindre de mon attitude auprès de SAJ, qui lui a dit : «Aret persisté. Sa ki Bissoon inn donn ou sa em monn dir donn ou. Ki ou été ou? Ou ki bizin dir mwa komié bizin doné ?» Ça c’était sir Anerood...

Pravind Jugnauth peut remporter les prochaines élections ?
Vous voulez la vérité ? (Il tape du poing sur la table). Sans faire campagne, il gagnera les élections. Ses plus grands agents sont Bérenger et Ramgoolam. Bann la pé travay pou li. Allez dire à tous les rédacteurs chez vous. Ou fer sa ki ou anvi.

Et si on enlève Bérenger et Ramgoolam de l’échiquier ?
Laaaa ! Laaaa les choses vont changer. Sans aucun doute. Mais ça ne va pas se produire. Zot inn fer rasinn. S’ils mettent leur égo de côté, et qu’ils descendent à la hauteur du citoyen ordinaire, pèsent le pour et le contre, tâtent le pouls et se mettent en retrait, là il y aura un match. Il y aurait un vrai match électoral. Mais là, c’est du one-way traffic. Venez avec moi faire le tour de l’île. Venez dans nos réunions. Vous verrez le sentiment des gens. Je vous emmène, je vous dis. Et vous écrirez par la suite.

Moi j’entends l’impopularité de Pravind Jugnauth. Comment arrivez-vous à la conclusion qu’il est aimé ?
Je ne suis pas en train de vous dire dimounn kontan Pravind Jugnauth. On parle de qui va gagner les prochaines élections. Je suis en train de vous dire pourquoi il va continuer à gagner. Maintenant vous me demandez pourquoi les gens aiment Pravind Jugnauth. Premièrement…

(On l’interrompt). Aimez-vous Pravind Jugnauth comme vous avez aimé SAJ ?
Avec plaisir, oui ! Je suis enn zanfan lakaz chez ses parents.

Mais vous avez critiqué sa façon de diriger et son manque d’écoute.
Pas lui. Mais ceux qui l’entouraient. Il y avait certaines personnes à son bureau, et il y a eu un nettoyage. Pa dir mwa ou pa koné. Il y avait certains qui ti a pé tro fer dans son bureau. Ils s’étaient substitués au Premier ministre, zot ti pé aménn rol Pravind Jugnauth.

Je vous donne un nom : Ken Arian ! Votre problème c’était Ken Arian.
Je n’ai pas de problème avec Ken Arian. Jusqu’à présent, il est mon ami. Mais les pieds de Ken Arian ne touchaient pas le sol. Il marchait dans le ciel.

Vous avez raisonné Pravind Jugnauth ?
Je n’ai pas la prétention de raisonner Pravind. Mais nous avons levé la voix pour le lui dire.

Nous, c’est qui ?
Nous c’est moi et mon entourage.

La vieille garde MSM ?
Talér ou pou tandé la. Il y aura un réveil de la vieille garde du MSM. Pensez à tous ceux qui étaient là depuis l’époque de SAJ, hormis ceux qui sont allés rejoindre d’autres partis. Cette vieille garde va bientôt se manifester.

Karné Kistnen ? Monn truv 2-3 pou sak éleksion dépi 1987 !

Qu’est-ce que vous allez faire ?
Nous aurons notre mot à dire. Ce n’est pas possible que ceux qui ne savent rien, arrivent, et dictent tous ceux qui ont apporté leur contribution, leur sueur au MSM depuis sa création.

Pravind Jugnauth est ingrat ?
Comme je vous dis, il est entouré de gens qui ne veulent pas comprendre.

Cette vieille garde du MSM peut mobiliser ou démobiliser un électorat ? Quel est votre pouvoir de négociation auprès de Pravind Jugnauth ?
On n’a pas besoin de négocier quoi que ce soit. Nous ne demandons rien. Il faut juste qu’il comprenne que le MSM… (il réfléchit et reformule). Imaginons que vous entrez au MSM. Si vous M. Chenney, vous entrez au MSM et faites de l’excès de zèle. Il faut vous remettre à votre place. On ne peut pas vous laisser faire ce que vous voulez, comme le faisait Ken Arian. Ken Arian a déjà donné des directives à la MBC pour que certaines têtes, dont la mienne, n’y apparaissent pas. J’ai pris les devants et j’ai discuté avec le Premier ministre. Ça, ce n’est qu’un exemple. Il y a eu beaucoup de choses. Ce qui est bien avec Pravind Jugnauth, c’est qu’il écoute, il analyse et il rectifie.

Mais Ken Arian a obtenu une belle récompense. Il quitte le PMO pour Airport Holdings. C’est une délicieuse sanction.
Laissez-moi vous dire. Au lieu de dire félicitations à Ken, il faut lui dire «sympathies».

Pour sa nomination à Airport Holdings ?
Oui. Mwa ki pé dir ou.

«Bé boukou kass sa Bissoon !»
(Il rit) Kas tou zafer danla vi bhaia ? Non, dir mwa, larzan tou zafer dan lavi ? Aujourd’hui, il doit prendre l’avion pour rencontrer le Premier ministre pour lui parler. Autrefois, il était là, et le Premier ministre était disponible pour lui, gramatin tanto.

Un mot sur Sherry Singh…
Je n’ai jamais fait confiance à Sherry Singh. À moi, sir Anerood m’a déjà dit «matlo ki sa boug la sa ?» Il faisait son one-man show, comme s’il était le propriétaire de l’île Maurice, sir Anerood me dit (il bégaie d’impatience avant de citer SAJ) : «kisanla sa, mo pa konn li, kouma li pé…» Je lui a dit, «sir mwa osi mo pa konn li, mo pa koné». J’ai toujours éprouvé un certain dégoût pour Sherry Singh.

Il a aidé Pravind Jugnauth à remporter les élections. Vous ne niez pas sa contribution, j’espère ?
Non, surtout pas. Je ne nie pas sa contribution. Il est intelligent. Il a fait ce qu’il a fait. Je sais ce qu’il a fait, où et comment, ki travay linn fer.

«Bon travay ou mové travay ?»
Wi bon travay. Pou gagn eleksyon pann fer move travay. Bon travay ki zordi Pravind la, li Premye minis, ena kontribision Sherry Singh dan eleksion. Ça, c’est clair et net. Il faut être honnête. Mais ce qui s’est passé ensuite, ne me demandez pas, je n’en sais rien, je n’étais pas dans le secret des dieux. Je ne le rencontrais pas. Il est arrivé à Mauritius Telecom, et en tant que businessman, je ne suis jamais allé à son bureau. Pourtan zot dir mo kontan travay gayn kas. Il y avait beaucoup de contrats. Depuis 1998, j’assure le transport d’Air Mauritius, AML, ATOL, des hôtels, etc. J’aurais pu aller demander le contrat de transport. Je vous donne la garantie que mon prix aurait été le plus compétitif. Mais je n’ai pas voulu avoir affaire à Sherry Singh.

Pourquoi vous vous méfiez de lui ?
Vous savez, quand quelqu’un est arrogant, fier, gran nwar. Quand quelqu’un se met à marcher sans que ses pieds ne touchent le sol, je m’éloigne. Moi je suis quelqu’un de grassroot level.

Comment va Lady Sarojini Jugnauth ? Vous la rencontrez souvent ?
On s’appelle tous les jours au moins une ou deux fois. Tous les dimanches, je lui rends visite. Je m’assois, on prend un thé ou on déjeune, manz enn gato ouswa manz enn biskwi. Ça c’est la routine. Si vous voulez me rencontrer le dimanche, venez à La Caverne à midi et demi.

Comment va-t-elle ? Elle a fait son deuil ?
Elle mène une vie normale à nouveau mais (il met la main sur le cœur), mais ça fait toujours mal ici. On parle de beaucoup de choses, et au fil de la conversation, parfois il nous arrive de nous rappeler d’un événement touchant, elle pleure. Bé ki pou fer.

Elle reste au fait de l’actualité et la manière dont son fils dirige le pays ?
Pas au jour le jour. Elle ne s’intéresse pas non plus à ce que fait son fils, où il va, quelle est sa stratégie. Loin de là. Mais elle me demande de lui brosser un bref tableau des événements de la semaine ; quelle est la situation politique etc.

Sir Anerood Jugnauth serait fier de son fils ?
Kot li été lao ? (Il pousse un «hein» de dédain). Comment voulez-vous que je vous réponde ? (Sourire)

Face à Ramgoolam, Pravind Jugnauth remportera les élections sans faire campagne.

Vous le connaissiez mieux que quiconque. Vous voyez comment le pays est dirigé aujourd’hui. C’est une question sans arrière-pensée. Si c’est oui, c’est oui ; si c’est non, c’est non.
Avant de mourir, SAJ a dit que Pravind était un meilleur Premier ministre que lui. Qui suis-je pour contredire sir Aneerood ?  It comes from the horse’s mouth. Et je pense sincèrement que c’est un oui. Un papa ne laisserait jamais tomber son fils, n’est-ce pas ? Même si ce fils avait tous les pires défauts du monde, aucun père ne rejetterait son fils, n’est-ce pas ? In this tone I’m telling you that SAJ should be happy that his legacy is being entertained by Pravind.

Lady Macbeth et Lakwizinn, c’est vrai ça? Est-ce vrai que Kobita Jugnauth s’ingère dans les affaires du pays ?
Je ne suis pas dans ce secret. Zamé monn trouv Madam koz ar Misié inzer dan bann zafer. Quand on se voit, on parle de la famille, et c’est tout. Je ne les ai jamais vu parler de politique.

Jamais la vieille garde du MSM ne vous a dit que «Madam-là inn téléfoné pé dir mwa met tel dimunn tel plas» ?
Kozé éna boukou, mé mo pa kapav pran li pou larzan kontan.

Vous allez aider le MSM pour gagner les prochaines élections ?
Oui, bien sûr. Personne ne me changera. Je suis et je reste un MSM. Peut-être le style de l’aide va changer.

Comment et pourquoi ?
Pourquoi, parce que ce n’est pas possible ki bef travay souval manzé.

C’était le slogan de Ramgoolam en 2005 !
Qu’importe. Bef travay souval manze mo dir ou. Ceux qui font de la politique de salon, qui ne sont pas sur le terrain, ne marchent pas les pieds sur terre ! Dimounn ki grat so derier lor koltar, li li pa gagn narien ?

Mais on ne fait pas la politique pour des gains personnels, n’est-ce pas ?
D’accord. Mais ça doit être la règle. Je ne peux pas faire de la politique pour que vous récoltiez, et que quand vous faites de la politique, vous récoltiez encore. Quand les autres font, c’est toujours vous qui récoltez. Kouyon pa aprann !

Un mot sur Sattar Hajee Abdoula. Vous avez un problème avec lui ?
Je n’ai pas de problème avec lui. Mais quand vous dilapidez l’argent des ti-dimounn, là il  y a un problème. SBM doesn’t belong to Mr Sattar Hajee Abdoula or to the government. It belongs to each and every Mauritian. Même au mendiant devant la banque. Celle-ci lui appartient aussi, même si c’est pou enn demi-sou ou enn kar sou ! A cause de Rs 100 000, combien de maisons à Maurice ont été saisies ? Des gens se sont suicidés parce qu’ils n’arrivent pas à rembourser leur emprunt. Ou pé bangolé ar Rs 12 milliards ? Et là il y a une autre affaire à Rs 1 milliard qui arrive ? Mo pou asiz ar li la. Li ousi li pou gayn so zafer. En tant que shareholder, je vais loger une private prosecution contre lui.  Li pou mwa. (Il se tape le torse). Mo tap mo lestoma mo pé dir ou, li pou mwa ! Je lui ai dit à l’Assemblée générale des actionnaires : «paré twa». Et ce ne sont pas des avocats mauriciens que j’ai sollicités ; ce sont des avocats kényans.

Comme Beekarry, Sattar est un ami de Pravind. Vous allez l’embarrasser. C’est lui qui l’a nommé à la SBM.
Pravind Jugnauth ne lui a pas dit de voler.

Oh là ! Attention ! C’est à la limite de la diffamation ça.
Quand vous êtes payés Rs 7 millions sur une année comme board fees, et que vous n’assumez pas vos responsabilités comme il le faut ? N’est-ce pas du vol de ses honoraires ? Et je ne suis pas en train de le poursuivre par méchanceté. J’ai mes preuves.