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Rapport de l’enquête judiciaire sur la mort de Kistnen: la magistrate recommande d’autopsier le rôle d’Ananda Sunnassee
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Rapport de l’enquête judiciaire sur la mort de Kistnen: la magistrate recommande d’autopsier le rôle d’Ananda Sunnassee
Mensonges, incompétences, cover-up… Le rapport de l’enquête judiciaire sur la mort de Soopramanien Kistnen est «damning». La magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath conclut à un homicide en balayant la thèse du suicide et, par la même occasion, les arguments du Dr Ananda Sunnassee, qui avait effectué l’autopsie. Elle recommande aussi une enquête séparée sur ce médecin. Pour rappel, ce mardi, cela fera deux ans, jour pour jour, que le corps de Soopramanien Kistnen avait été retrouvé.
Demain, mardi 18 octobre, cela fera deux ans, jour pour jour, que le corps de Soopramanien Kistnen a été retrouvé. La théorie du suicide par le feu de Kistnen a été descendue en flammes par la magistrate Vidya MungrooJugurnath dans son rapport d’enquête judiciaire, diffusé vendredi. Tout d’abord, c’est la position du corps de Kistnen et surtout le fait que le dos de celui-ci n’était pas brûlé qui avait alerté la magistrate quant à l’impossibilité que Kistnen se soit immolé. «The only way that is possible is when the person who is on fire is either already dead or not in a state to try to put out the fire.» La magistrate se demande comment le sergent Mosafeer, qui avait été le premier policier à se rendre sur les lieux, ne s’est pas posé de questions. Elle s’est évertuée alors à démontrer que la conclusion du rapport du Dr Ananda Sunnassee était, pour dire le moins, dure à avaler. Tout en recommandant qu’une enquête soit entreprise «into the obscure manner in which the autopsy was made…»
Le médecin légiste Ananda Sunnassee, qui avait pratiqué l’autopsie de Soopramanien Kistnen le lundi 19 octobre 2020, a, dès le début de l’enquête judiciaire, tenté de faire croire que Kistnen était mort asphyxié par la fumée qu’il aurait inhalée. Pourquoi insistait-il ? Probablement pour appuyer la thèse du suicide par immolation, thèse avancée par la police.
En effet, dans son rapport d’autopsie, Ananda Sunnassee avait affirmé que l’ex-agent orange était décédé d’un œdème pulmonaire «due to inhalation of fumes/products of combustion». La magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath rejette cette thèse car le «histopathology report itself was inconclusive» et aussi en l’absence de traces de lutte ou de désordre aux alentours du corps, tel que l’avait constaté l’agent du Forensic Science Laboratory (FSL) qui s’était rendu sur les lieux. Pour ce témoin, Kistnen était déjà mort ou inconscient lorsque son corps brûlait. Ce qui signifie logiquement que le corps sans vie ou inconscient de Kistnen avait été brûlé par quelqu’un d’autre.
Œdème pulmonaire : Plusieurs causes possibles
D’ailleurs, la médecin légiste Shaila Jankee attribuait, elle, la cause de l’œdème pulmonaire à l’origine du décès à une «strangulation». Le coup de grâce à cette théorie d’immolation volontaire est venu avec la déposition du Dr Satish Boolell, qui affirmera, entre autres, que le taux de 5,2 % de carboxyhémoglobine retrouvé dans le corps de Kistnen était trop bas pour causer la mort. Satish Boolell est d’avis que c’est un homicide en l’absence de traces de perturbation autour du corps.
Kistnen était donc déjà mort à la suite de coups reçus ou avait été étranglé ou/et injecté d’une forte dose de meperidine (péthidine) lorsqu’il fut transporté à Telfair. Ou alors il était à l’agonie mais il n’était pas mort asphyxié par la fumée. D’autres indications ont permis à la magistrate de conclure qu’il y avait eu foul play, notamment le deuxième incendie allumé dans le champ après l’enlèvement du corps. Pour rappel, l’express en avait fait état et rapporté les propos du propriétaire du champ, qui nous avait affirmé qu’il n’avait jamais ordonné ni le premier, ni le second incendie. Second incendie effectué selon la magistrate pour effacer les preuves.
Enquête bâclée par la police et le médecin-légiste
Le témoin numéro 7 avait affirmé qu’un document se trouvait bien dans le poing fermé de Kistnen, impossible à ouvrir, à la suite du phénomène connu comme la rigor mortis, ou rigidité cadavérique. Pourtant, le Dr Ananda Sunnassee affirmera que la main de Kistnen ne contenait aucun morceau de papier et que les traces blanches retrouvées étaient celles de de-gloving (détachement de la peau) dû au feu. Pourtant, le même Dr Ananda Sunnassee, pressé de questions, reconnaîtra que la main de Kistnen n’était pas assez atteinte par le feu pour provoquer un de-gloving.
La magistrate Vidya MungrooJugurnath souligne de plus le retard mis par la police à consulter les images de Safe City pour savoir qui avait transporté le corps à Telfair. Images qui seront effacées automatiquement. Outre la question de la paire de ciseaux, du sac à dos ou des traces de liens sur les chevilles du décédé, il y a le téléphone de Kistnen, retrouvé mais sans les cartes SIM et mémoire. Un fait qui n’a étrangement point interpellé la police, dira la magistrate.
Il faudrait peut-être ici rappeler les images intimes de Simla Kistnen diffusées dans le but manifeste de jeter le discrédit sur la famille Kistnen. On soupçonne fortement que ce fût l’œuvre de la police, tout comme dans le cas d’Akil Bissessur. Ce qui prouverait par la même occasion que cette même police ne serait pas seulement le complice actif du cover-up mais aurait poussé le bouchon plus loin en s’engageant dans des actes malsains. Si la magistrate n’en a pas fait mention dans son rapport, c’est pour la simple et bonne raison que cette diffusion d’images ne fut pas soulevée lors de l’enquête judiciaire. Elle trouvera quand même stupéfiant que la police ait envoyé le téléphone au département IT de la police et non au FSL pour être examiné.
L’ombre du «Chief Police Medical Officer»
La Dr Shaila Prasad Jankee affirmera au tribunal qu’elle a bien donné des instructions pour que le corps de Kistnen soit transporté à l’hôpital de Candos. Or, c’est à l’hôpital Jeetoo que celui-ci a atterri, entre les mains expertes du Dr Ananda Sunnassee, le propre cousin de Jonathan Ramasawmy, l’exdirecteur de la State Trading Corporation, lui-même le beau-frère de Vinay Appanah. «This link appears to be an unlikely coincidence», dira la magistrate. Interrogé, le médecin avouera qu’il exécutait les ordres du Dr Sudesh Kumar Gungadin, dont la signature apparaîtra étonnamment sur le rapport d’autopsie, à côté de la sienne.
Il aura fallu tout l’art des avocats Azam Neerooa, Roshi Bhadain et de la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath pour pousser le Dr Sunnassee à revenir enfin sur ses affirmations et reconnaître qu’il y avait bien eu assassinat. Et au moins une tentative de cover-up. Ce qui fera dire à la magistrate au paragraphe 7.1.2 de son rapport que «the testimony of Witness No 2 (NdlR, le Dr Sunnassee) was so fraught with inconsistencies and illogical that this court had no other option but to disregard certain aspects of his testimony altogether». Tout en recommandant qu’une enquête soit entreprise «into the obscure manner in which the autopsy was made to be carried out by the Witness No 2». Elle assène enfin un coup terrible en demandant une enquête plus générale sur les aptitudes professionnelles du Dr Sunnassee à pratiquer comme médecin légiste. Qui fera ces enquêtes ? «Seules deux institutions, le Medical Council et le ministère de la Santé pourront le faire», nous dit un médecin légiste. «En tout cas, il n’est pas possible que le Chief Police Medical Officer enquête puisqu’il avait co-signé le rapport d’autopsie et c’est lui qui avait demandé au Dr Sunnassee de pratiquer l’autopsie.»
Violation du secret de l’instruction, dites-vous?
<p> Maneesh Gobin s’est montré outré de cette fuite de document. Ce qui a fait réagir Me Rama Valayden. «<em>Premièrement, s’il n’y avait pas eu fuite, je me demande si le rapport ne serait pas resté dans un tiroir à jamais. Deuxièmement, je rappelle à Maneesh Gobin la fuite des images enregistrées par la police vers la presse lors de l’arrestation d’Akil Bissessur. Et je ne parle pas des images intimes se trouvant sur le téléphone. On n’a pas entendu l’Attorney General s’en émouvoir.»</em></p>
<p><strong>Rapport incomplet ?</strong></p>
<p> Il manque certains paragraphes dans le rapport de la magistrate, dont les 2 et 4. On ignore s’il manque aussi d’autres sous-paragraphes. Il semble que la personne qui ait pris en photo ces documents ait soigneusement enlevé certaines parties, sauf s’il y a eu une erreur dans la numérotation. S’il y a bien eu escamotage partiel du rapport, on se demande bien pourquoi le Directeur des poursuites publiques (DPP) ou la magistrate l’aurait fait, comme l’allègue Maneesh Gobin. L’<em>«Attorney General»</em> a, lors de la conférence de presse du MSM samedi, pointé du doigt le DPP, Me Satyajit Boolell, et même la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath par rapport à la fuite du rapport. C’est pourquoi un avocat est d’avis que d’autres personnes auraient pu omettre certaines parties pour ne pas embarrasser une ou des personnalités.</p>
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