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Meurtre d’Anaïs Jean: une plaie toujours béante pour la famille

30 octobre 2022, 22:00

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Meurtre d’Anaïs Jean: une plaie toujours béante pour la famille

Le 26 octobre 2016, un énième cas de féminicide secoue Maurice. Le corps d’Anaïs Jean, 18 ans, est découvert à son domicile à Résidence Barkly, la tête dans un seau d’eau. Elle a été tuée par Jimmy Neerputh, 23 ans à l’époque. C’était l’homme qu’elle aimait…

Les tubes de Madii Madii, de son vrai nom Madyson Jean, résonnent partout et sont fredonnés par tous. Il est une figure incontournable de la musique locale. Mais malgré son succès, l’artiste de 27 ans vit dans une tristesse immense depuis que sa sœur Anaïs a été assassinée, il y a six ans, presque jour pour jour. Une tristesse qui ne s’estompe pas malgré le temps qui passe. «Anaïs respirait la joie de vivre. C’est elle qui aurait dû chanter mes morceaux. Sa voie était meilleure que la mienne. Nous voulions avancer ensemble dans le monde musical, moi en tant que musicien et elle, comme chanteuse» confie le jeune homme.

Jalousie maladive

Les faits se sont produits en pleine journée. Jimmy Neerputh était le copain d’Anaïs Jean. Il faisait le va-et-vient entre son domicile et celui de l’adolescente. Le jour du drame, il était chez elle à Résidence Barkly. Lors de son interrogatoire, il a expliqué qu’une dispute a éclaté entre eux à la suite d’un appel qu’elle a reçu. L’ancien musicien du groupe ABAIM voulait savoir qui était au bout du fil et insistait pour qu’Anaïs lui donne le code du téléphone. Ce qu’elle refusait. Énervé, le jeune homme l’a menacée avec un couteau et l’a étranglée. La jeune fille s’est débattue pendant cinq minutes alors qu’il avait les mains autour de son cou.

Puis, elle s’est écroulée au sol. Mais elle respirait toujours. Il l’a alors traînée jusqu’à la salle de bains où il lui a plongé la tête dans un seau d’eau. «Elle s’était blessée en se débattant lorsque je l’ai menacée avec le couteau. Il y avait du sang sur mes mains et sur mon short. Je me suis rendu dans sa chambre. J’ai mis des vêtements propres et j’ai pris deux draps. Après j’ai pris la fuite.» a expliquera Jimmy Neerputh aux enquêteurs. C’est le petit frère de la victime et de Madii Madii qui fera la découverte macabre. Il rentrait de ses examens du Certificate Primary Education lorsqu’il est tombé nez à nez avec Jimmy Neerputh, qui dévalait les escaliers à toute vitesse. En voyant son comportement, le petit frère a vite compris que quelque chose ne tournait pas rond. Il a couru vers la maison et vu le corps inerte de sa sœur dans la salle de bains. Les proches et la police ont été alertés.

Jimmy Neerputh a, lui, tenté de se suicider par pendaison avec les draps qu’il avait pris chez Anaïs Jean. Mais il n’a pas pu aller jusqu’au bout de son plan et s’est finalement constitué prisonnier au poste de police de Rose-Hill, où il a avoué les faits. Par la suite, il a été transporté à l’hôpital psychiatrique. Quelques jours plus tard, soit le 10 novembre, il est retourné sur les lieux pour une reconstitution des faits. Selon les proches du couple, Jimmy était connu comme un petit-ami jaloux, voire possessif. D’ailleurs, ils affirment qu’à plusieurs reprises, Anaïs Jean a tenté de mettre une pause à la relation, mais il refusait à chaque fois. Sa jalousie, disent-ils, était maladive.

Pardon impossible

Six ans après, les blessures de Madii Madii sont toujours béantes. Il confie qu’il n’a jamais imaginé que Jimmy Neerputh, qui était son ami, allait commettre un tel crime. «Mo ser ti deza dir mwa li violan. Mo ti gagn enn gro lager ek Jimmy akoz sa. Mo ti aret koz ek li.» Mais sa sœur était amoureuse. La dernière fois qu’il l’a vue, c’était le matin même de son décès. En lui disant au revoir, il ne savait pas que c’était un adieu. Cette scène, il la revit chaque jour dans sa tête, et souvent, il pense à ce qu’il aurait pu faire, ou dire, pour changer le scénario. Son jeune frère, qui a découvert le cadavre d’Anaïs dans la salle de bains, en porte toujours les séquelles. «Cela a bouleversé notre vie. Je n’ai plus confiance en l’humain. Un homme, que je considérais comme un ami, a tué ma sœur qui avait toute la vie devant elle.» Aujourd’hui, c’est avec la musique comme support qu’il avance. Son but est d’accomplir le rêve inachevé de sa sœur avec le soutien du public. En 2020, il compose la chanson Là-bas en hommage à la défunte partie trop tôt.

«Il est du devoir de la justice d’envoyer un signal fort pour que de tels crimes ne soient pas traités avec indulgence.»

Le 10 janvier 2020, Jimmy Neerputh a été condamné à 20 ans de prison après son procès aux assises. «Cette sentence n’est pas suffisante si on prend en considération la souffrance et la douleur de notre famille et d’Anaïs. Je ne l’ai toujours pas pardonné», avance Madii Madii. «J’ai envie de le rencontrer un jour pour comprendre pourquoi il a fait cela. Ce poids est toujours sur mon cœur», poursuit-il, la voix nouée. Dans son jugement, le juge David Chan a déclaré que sa sentence doit être un signal fort. «Les crimes passionnels sont malheureusement courants ces jours-ci. Les cours de justice ne peuvent ignorer cet état des choses. Il est du devoir de la justice d’envoyer un signal fort pour que de tels crimes ne soient pas traités avec indulgence.» Cependant, la sentence de l’asssasin est tout aussi amère que les larmes qui coulent toujours sur le visage de Madii Madii et des autres proches d’Anaïs Jean car «mem lamor tro zoli pou li...»