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Brutalité policière alléguée: vengeance personnelle à l’origine ?

11 novembre 2022, 22:00

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Brutalité policière alléguée: vengeance personnelle à l’origine ?

Même après la diffusion des vidéos de torture policière par Bruneau Laurette et qui ont suscité l’indignation de la population, la brutalité policière persisterait.

Y. D., un habitant de l’Est, allègue avoir été sévèrement «corrigé» en août par des membres du Criminal Investigation Department (CID) dans une station de l’Est. La raison : il avait volé une voiture à Cité Malherbes, à Curepipe. Arrêté avec la voiture par des agents de cette unité, Y.D. aurait, selon ses dires, immédiatement avoué le vol et n’aurait pas résisté à l’arrestation. Malgré cela, Y.D. aurait été si violemment battu qu’il a dû être admis à l’hôpital. 

Après avoir reçu un traitement et alors même que sa blessure n’était pas encore complètement guérie, Y.D. a été emmené de l’hôpital et placé en détention à Vacoas. Là-bas, le même jour, ses souffrances et cris de douleur ont fini par alerter les responsables du centre de détention qui l’auraient alors reconduit à l’hôpital. Où recemment, l’on a découvert que la blessure qu’il avait subie aux mains des policiers et qui n’avait pas été soignée comme il faut, était devenue un cancer. Après ce diagnostic, Y.D. a été admis dans un hôpital spécialisé où l’on a dû procéder à l’ablation d’un de ses testicules. Il a également suivi un traitement de chimiothérapie. 

Que s’est-il passé exactement ? Une proche de Y.D. nous affirme qu’avant de commettre le vol et d’être arrêté, ce dernier travaillait dans une boulangerie à Curepipe. Nous apprenons également qu’il a commis plusieurs délits de vol dans le passé. «Son travail ne générait pas assez de revenus et c’est pourquoi il a volé la voiture. Mo pa dir ou li pann kokin, mais la police a-t-elle le droit de le battre au point qu’il souffre maintenant le martyre?», s’interroge la proche de Y.D. 

Lorsque nous avons visité Y.D. à l’hôpital où il était enchaîné au lit par les chevilles, il nous en a fait dit un peu plus sur son arrestation musclée. Dès qu’il est sorti de la voiture volée, «les policiers m’ont frappé à la tête avec un gros morceau de bois. Et alors que je me couvrais le visage pour me protéger, le policier qui semblait être le chef (et qu’il a reconnu et dont il nous a donné le nom), est allé chercher un plus gros morceau de bois de goyavier de Chine de sa voiture et m’a frappé très fort sur ma partie intime.» Y.D. a ressenti une telle douleur qu’il a failli perdre connaissance. Ce serait ce coup reçu dans sa partie intime qui aurait causé le cancer, dit-il. 

Pourquoi ce déchaînement de violence d’après lui, avons-nous voulu savoir. Y.D. nous raconte alors que son frère est en détention pour le meurtre, commis l’année dernière, d’une employée d’un magasin à Montagne-Blanche. Et toujours selon Y.D., la victime de ce drame – un vol avec violence – n’était autre qu’une proche du responsable de l’équipe de la police qui a procédé à son arrestation. 

«Mo dakor monn fer enn erer, monn kokin enn loto», nous dit Y.D. «Mais est-ce une raison pour me punir eux-mêmes ?» Il nous rappelle qu’ils étaient à huit et qu’il n’a pas résisté à l’arrestation et que de toute façon ils l’avaient maîtrisé physiquement. Y.D. n’est pas très corpulent et est même plutôt maigrichon. Surpris par cette violence, Y.D. a pu trouver le courage entre deux coups de bâtons pour demander au chef de l’équipe pourquoi il était si violent. «Linn dir moi si li ti gagn mwa dan bois, li ti pu touy mwa. Enn sans linn gagn mwa lor simin.» 

Était-ce l’occasion pour un policier de régler des comptes personnels en s’en prenant au frère ? Lors de sa comparution au tribunal de Curepipe le 31 août 2022, il a été placé en détention provisoire jusqu’à fin septembre. Selon Y.D, le jour où il s’était rendu à la Bail and Remand Court de Port-Louis, la police s’est opposée à sa libération sous caution. 

Y.D est toujours détenu à la prison après son opération. Il devra normalement comparaître par visioconférence devant la BRC le 22 novembre. Il n’est assisté d’aucun homme de loi pour le moment.