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Ryan Laurette: «Mon père a été menotté dès qu'il est sorti de sa chambre»
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Ryan Laurette: «Mon père a été menotté dès qu'il est sorti de sa chambre»
Qu’est-ce que cela fait de respirer la liberté après plus de deux semaines en détention, tout en sachant que votre père est toujours incarcéré ?
Ça fait mal...extrêmement mal car mon papa, Bruneau Laurette, est un innocent qui est toujours incarcéré. D’avoir recouvré la liberté dans de telles conditions, c’est bien mais j’ai le coeur lourd. Car tant que mon papa ne sera pas un homme libre, je me considère tout aussi prisonnier que lui.
Vous travaillez pour une grande banque commerciale. Avez-vous pu reprendre le travail ou rencontrez-vous des obstacles de ce côté après votre arrestation ?
Je reprends incessamment et je remercie mon employeur pour sa largesse d’esprit car je n’ai rencontré aucun obstacle mais j’ai eu quelques jours de congé pour me reposer.
Pensez-vous pouvoir reprendre un jour le cours normal de votre vie ?
Je l’espère bien car la vérité finit toujours par faire surface. Ce sera peut-être un long combat mais je suis croyant et il y a une seule vérité. Mais ce que j’ai vécu est traumatisant et j’espère pouvoir effacer ce cauchemar.
Est-ce la première fois que vous avez des démêlés avec la police ?
J’ai un Clean record. J’ai toujours eu une vie sans histoire et sans démêlés avec la police
Retour au 4 novembre. Racontez-nous comment votre vie a basculé ce jour-là. D’après ce qui a été rapporté, vous aviez pris un congé maladie. Que s’est-il passé ensuite ?
Je me suis rendu sur mon lieu de travail malgré que j’étais souffrant. Mais finalement, mon superviseur m’a permis de prendre un congé maladie. Aux alentours de 9h30, je suis rentré chez moi pour me reposer. Vers 10 h 30, je suis sorti pour acheter quelque chose à manger et j’ai été de retour vers 11h30. Par la suite, mon papa est rentré à la maison. Il a pris de mes nouvelles et on a parlé brièvement. Je suis ensuite sorti faire une transaction bancaire à un guichet automatique. Cela a duré environ 10 minutes. Quand je suis rentré, il était pratiquement midi et mon papa était dans sa chambre. Je suis parti me reposer dans la mienne. Au bout d’une heure, je commence à entendre des bruits bizarres et insistants...comme si on essayait d’ouvrir la porte et aussi le bruit des clés qui étaient sur la porte qui était verrouillée. Du coup, je sors de ma chambre pour voir ce qui se passe et à peine dans le salon, je vois trois individus encagoulés et qui portaient des gants, qui ont déjà traversé la fenêtre de la salle à manger.
Les agents qui ont débarqué chez vous à Petit-Verger se sont-ils présentés ?
Ils ne se sont ni présentés ni ne nous ont appelés avant. Ils ont envahi la maison. Ils sont passés par une fenêtre pour accéder à l’intérieur et c’est ainsi que je les ai vus ouvrir la porte principale.
Avez-vous été mis devant un mandat en bonne et due forme?
Jamais! Ni entendu ni vu de mandat. Mon papa est sorti de sa chambre au même moment où les policiers, qui étaient en civil, ont ouvert la porte. Je pense que lui aussi a été alerté par le tapage. Il était en boxer et la majeure partie des policiers se sont précipités sur lui. Quatre individus m’ont isolé dans le salon.
Que s’est-il passé ensuite?
Il était peut-être vers les 13 heures. Ces gens-là se sont précipités sur mon père et ils lui ont immédiatement passé les menottes. Ils m’ont tout de suite emmené dans ma chambre, me prévenant qu’il y aurait une fouille, qui a duré environ une heure et demie, je pense.
Ces agents ont-ils parlé de la BMW de votre père à ce moment-là ?
Non, pas du tout.
Avez-vous conduit la voiture de votre père le 4 novembre ou les jours précédents?
Le 4 novembre, non. Par contre, le 2 novembre, oui, je l’ai conduite, comme je l’ai mentionné dans ma déclaration. J’avais accompagné ma grand-mère et ma petite soeur à Odysseo. C’est une voiture datant de 2002, de couleur noire et de par l’année, vous comprendrez aussi les problèmes qui coulent de source. Par exemple, sa télécommande ne fonctionne pas, tout comme le central lock. Pour verrouiller la voiture, il faut fermer chaque portière manuellement de l’intérieur et pour celle du conducteur, il faut enlever la petite clé de la télécommande pour la verrouiller et la dévérouiller. Des fois, il faut faire le mouvement à plusieurs reprises, sinon la voiture ne se verrouille pas...entres autres.
Le jour de votre arrestation, la BMW était-elle garée à l’endroit habituel ?
La voiture était garée à l’endroit habituel.
«Peut-être qu’il est devenu trop gênant de par sa franchise et sa force de persévérer dans le chemin de la vérité.»
A-t-elle été utilisée avant que ne débarquent les agents ?
Si quelqu’un a eu accès à la voiture pendant que mon papa était dans sa chambre, je ne saurais vous le dire...
Avez-vous noté quelque chose de suspect plus tôt, le 4 novembre ou la veille?
Personnellement je n’ai rien aperçu de suspect. Je n’y ai pas fait attention et les voisins non plus ne nous ont pas avisés de quoi que ce soit.
Votre père vous a-t-il confié qu’il est l’une des «cibles» de la Special Striking Team (SST) ?
Il en a déjà fait mention et il était au courant qu’il était la cible de la SST, du gouvernement, entre autres. Je peux vous confier une chose ? Mon papa nous répète constamment : «Fer byen atensyon seki zot fer dans lavi. Mo pe menn enn combat..make sure zot pa fer narnyen qui pou fer mwa perdi pwin. Zot pou rod mwa ek kan pa pou gagnn mwa zot pou rod fer dimounn zett labou lor mwa a traver zot mo bann zanfan.» Donc, il savait, déjà qu’ils cherchaient sa peau mais de là à venir «planter» de la drogue, des armes et des balles, ce n’est pas correct du tout.
Affirmez-vous donc que le haschisch et la drogue synthétique retrouvés dans le coffre de la BMW de votre père ont été «plantés» ?
Oui, c’est sûr que cela a été planté! Mon papa, Bruneau Laurette, est devenu peut être gênant pour certains. Il est devenu victime de son combat. Nous sommes innocents, lui et moi.
Quelles preuves avez-vous de votre innocence et de celle de votre père ?
«Isaiah 55:8-9 reminds us to put our complete trust in God because his ways and plans are always better than our own and to trust that everything included in His plan is for a greater good.»
Ceci pour vous dire que le plan de Dieu est meilleur que leur plan. Et la vérité primera.
Et les pistolets et balles retrouvés, appartiennent-ils à votre père ?
Non, ils n’appartiennent pas à mon père et je ne les ai jamais vus auparavant sauf cet artefact, ce pistolet décoratif, qui est une antiquité. C’est un souvenir de ma défunte mère et qui date des années d’avant 1900 et qu’elle a reçu lors d’un voyage à La Réunion.
Avez-vous pu voir si l’opération était filmée par les policiers ?
Non, à aucun moment, je n’ai fait la remarque que l’opération a été filmée. Mwespere pou ena enn video konplet (rire) pou trouv la verite. Si jamais ils ont une vidéo de l’opération, ils ne vont pas nous la montrer car, par exemple, vous allez voir que mon père a été menotté dès qu’ils l’ont vu. Ils vous montreront uniquement ce qu’ils veulent vous faire croire. La séquence où ils ont attiré mon attention par rapport au pistolet antique, qui était rangé sur le meuble de la télévision, devrait aussi être visible dans la vidéo, s’il y en a une vraiment. D’ailleurs, j’espère qu’ils ont tout filmé, du début à la fin.
Après votre arrestation, avez-vous été bien traité?
J’ai été bien traité mais les conditions de vie en cellule policière sont vraiment affreuses. Questions d’hygiène et des droits humains.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué en détention ?
Difficile à dire. J’ai été détenu au poste de police de Pope Hennessy après mon arrestation. Le fait de se retrouver derrière les barreaux, arbitrairement, et étant une victime collatérale des activités et combat de mon père, qui lui aussi est victime de son combat, me donnait le courage et la rage de la vérité. C’est très douloureux de vivre une injustice, père et fils.
Si votre père et vous parvenez à prouver votre innocence, quels sont, selon vous, les véritables motivations derrière votre arrestation ?
Je vous le répète. C’est simple et clair que mon papa est victime de son combat. Peut-être qu’il est devenu trop gênant de par sa franchise et sa force de persévérer dans le chemin de la vérité, contre l’injustice et les maldonnes, sans oublier sa force de rassembler la population. On veut l’éliminer politiquement. N’oublions pas les manifestations contre le gouvernement, les dénonciations concernant la police telles que le cas des vidéos de torture, le MV Wakashio entres autres, et même encore les éléments montrés au grand public lors de sa dernière manifestation concernant une unité anti-drogue. Il faisait même référence à une affaire de 40 kilos de drogue.
Avec un père nommé Bruneau Laurette, avez-vous déjà été intimidé avant le 4 novembre ou vous attendiez-vous à une pareille descente policière ?
Non, jamais été intimidé dans le passé. Par contre, on était préparé à ce qu’il y ait des répercussions. Mon père en était conscient aussi. Mais, on ne s’attendait vraiment pas à de tels coups bas, surtout que le combat qu’il mène est loyal pour un meilleur lendemain pour le peuple. Comme je l’ai dit plus tôt, mon père ne cessait de nous répéter «pa fer li perdi pwin ek kan pa pou gagnn li pou rod so bann zanfan. Mais, je ne m’attendais pas du tout à une chose aussi monstrueuse.
Un message à votre père ?
Courage Soldat. Dieu n’inflige jamais un fardeau trop lourd à porter. Et pour ceux qui n’ont pas peur de dénoncer les mauvaises pratiques du pouvoir, c’est essentiel pour l’avenir de tout un chacun. Continuons ensemble dans ce combat car en restant silencieux et en ne faisant rien, c’est aussi accepter, comme complices, ces mauvaises pratiques. La vérité primera toujours. Je t’aime papa et tu seras bientôt parmi nous.
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