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À Curepipe: Évitons au jardin botanique de devenir plat et informe
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À Curepipe: Évitons au jardin botanique de devenir plat et informe
Une «plateforme religieuse» est actuellement en construction au jardin botanique de Curepipe. Un projet du ministre de l’Environnement qui n’est pas en odeur de sainteté, car il suscite un tollé. Une pétition en ligne initiée par Géraldine HennequinJoulia circule pour stopper ces travaux. Le jeudi 12 janvier, c’est à travers le regard de Pierre Argo, photographe et peintre, Curepipien dans son enfance et ancien membre du conseil d’administration du jardin de Pamplemousses, que nous avons pris le temps de regarder ce jardin. Réappris à l’apprécier. Pour regretter tout ce qu’il aurait pu être.
Des «fossoyeurs» à l’oeuvre
Au beau milieu du vert, on a retourné la terre. D’un côté des pierres taillées, visiblement les restes d’une ancienne structure qui vient d’être démolie. Ce serait l’ex-abri du gardien du jardin botanique de Curepipe. «Où est-ce que ces pierres taillées de l’époque vont-elles finir ? Il y a des fossoyeurs à l’oeuvre», s’insurge-t-il.
Tout à côté, de la roche basaltique fraîchement découpée délimite un espace. Au centre, deux structures rectangulaires en pierres toujours. Mur de soutènement, «structure religieuse» ?
Jeudi matin, lors d’une visite sur place, les questions que se pose Pierre Argo, artiste, photographe, Curepipien dans son enfance et ancien membre du conseil d’administration du jardin de Pamplemousses, sont nombreuses. Il souligne d’abord qu’en affichant ce projet, «il aurait dû y avoir une maquette qui puisse être consultée par tous». Pourquoi cette opacité ? Alors qu’il semble que même au conseil municipal, tous les conseillers n’auraient pas eu vent de ce projet.
Il se demande aussi si la mairie a bien parmi ses employés, des compétences pour gérer un jardin botanique et son agencement. Si un espace est dédié aux plantes endémiques, pour Pierre Argo, c’est tout le jardin botanique qui aurait dû être dédié aux espèces endémiques. Avec une attention pour la perspective, en alternant des plantes de diverses tailles.
Arrmaan Shamachurn : «Encore un jardin historique pas classé patrimoine national»
Un jardin botanique qui a plus de 150 ans d’existence. «Mais encore une fois (NdlR : comme le jardin de Pamplemousses), il n’est pas classé patrimoine national.»
Mais comparé au jardin de Pamplemousses, qui a un cadre légal à part entière, le SSR Botanic Garden Trust Act – le jardin de Curepipe n’a pas de loi-cadre. Il est géré par la municipalité de Curepipe. «Est-ce que la mairie a l’expertise requise pour s’occuper d’un jardin botanique ?» s’interroge le responsable de SOS Patrimoine en péril. Un jardin botanique nécessite des soins différents de ceux requis pour l’entretien d’un espace vert. Arrmaan Shamachurn propose de rationaliser les services et de regrouper toutes les expertises en gestion de jardin botanique sous une seule entité.
Ce projet – dont on ignore le coût – fait dire au responsable de SOS Patrimoine en péril : «Normalement il n’y a pas d’argent pour le patrimoine culturel. Me la ena.» Il s’étonne aussi de la rapidité avec laquelle tout cela a été mis en place alors que d’autres projets sont en souffrance. Cela va faire trois ans que l’on attend les Assises du Patrimoine.
Arrmaan Shamachurn indique avoir pris contact de façon informelle avec le député de la circonscription Curepipe/Midlands Kenny Dhunoo. Il a été question d’une visite sur place avec des représentants des autorités concernées, la semaine prochaine. Entretemps, il a envoyé un courrier au NHF pour lui demander de faire un relevé des travaux en cours dans le jardin, de confirmer s’il y a effectivement un bâtiment ancien qui a été détruit et en fonction de cela, de prendre les actions qui s’imposent. «L’argument qu’un site n’est pas classé ne tient plus. C’est le devoir du NHF d’intervenir.»
Historique : Plus de 150 ans d’Histoire
La création du jardin botanique de Curepipe se situe entre 1867 et 1870. Dans A New Comprehensive History of Mauritius, Sydney Selvon écrit qu’en 1868, les autorités, voulant créer une source bon marché d’approvisionnement en quinine, ont fait mettre en terre des quinquina, l’arbuste produisant de la quinine au «futur jardin botanique de Curepipe».
Le jardin a une superficie de 56 ½ hectares. C’est en 2020 qu’un budget de Rs 2,5 millions lui a été accordé pour le transformer en zone piétonne. Une plaque commémorative atteste que le 16 janvier 2014, durant le mandat de Mario Bienvenue comme maire, une partie du jardin, au bord de la rivière qui le traverse, est devenue un «espace spirituel». Mais en dehors des marches et d’une rambarde, pas de «plateforme religieuse» à cet endroit du jardin. Il ressort aussi qu’en 2007, suite à l’érosion des bords du lac qui se trouve dans le jardin, un bout de mur de soutènement avait été construit. Mais le projet avait par la suite été classé sans suite.
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