Il avait pris un pari fou. Celui de s’armer d’une pancarte, de déambuler dans les rues, de demander de l’aide… Sur le morceau de carton qu’il tenait entre les mains on pouvait lire : «Homeless, I Need A Job»… Vinessen Savoo marchait dans les rues de Petite-Rivière, lundi, quand il a été aperçu par notre collègue Aurélio Prudence. Depuis que sa photo ainsi qu’une vidéo dans laquelle il s’exprime ont été publiées sur la page Facebook de l’express, la vie du jeune homme a changé… Il raconte son parcours.

«Mo ti lakaz. Mo’nn désid pou pran sa pankart-la, pou bouzé.» Du haut de ses 25 ans, Vinessen Savoo est timide, discret. Comment s’est-il retrouvé dans cette situation ? D’une voix douce, il confie qu’il a effectué sa scolarité au collège Labourdonnais et a étudié jusqu’à la Form IV – Grade 10 désormais – avant que ses parents ne se séparent. Ses deux frères et sa sœur sont mariés et vivent dans leurs maisons.

Vinessen, lui, avait décidé d’arrêter le collège pour venir en aide à sa mère malade. Les deux vivront alors séparément des autres membres de la famille. Vinessen travaillera pour un temps dans les hôtels comme serveur. «Mo ti pé gagn Rs 6 000 par mwa. Pa ti asé ditou sa kas-la…»

Pendant quatre ans, il effectue toutes sortes de petits boulots pour un salaire moyen jusqu’à ce qu’il soit dépassé, qu’il ne puisse plus joindre les deux bouts. «Le coût de la vie est trop élevé. C’est difficile de manger à notre faim, de payer les factures et d’avoir un toit. Tout est trop cher, on ne s’en sort plus…»

Découragé, épuisé, Vinessen a lentement vu son petit monde s’écrouler, aux côtés de sa maman souffrante. C’est là qu’il a eu un déclic. D’où le coup de la pancarte ; il voulait obtenir un emploi stable, un salaire décent, pour ne plus avoir à courir dans tous les sens…

Nombreuses propositions

«Je gardais espoir mais je ne savais pas que ça allait marcher, j’en avais juste assez de rester les bras croisés», avoue Vinessen. Mais depuis que sa photo a été publiée sur notre site, il a reçu de nombreuses propositions de personnes voulant l’aider. Parmi celles-ci, Nathan Julie du groupe En100mble, qui a contacté la rédaction. «Avant d’aider quelqu’un, c’est primordial de comprendre d’où il vient. Raison pour laquelle j’ai rencontré la famille de Vinessen. Quand j’ai vu la situation, j’ai compris», explique Nathan Julie.

Commence dès lors une nouvelle vie pour Vinessen. Avec Nathan Julie, le jeune homme va acheter de nouveaux vêtements. Plus important, il lui propose un travail. «J’ai l’ai assigné comme helper avec un salaire décent. Il a eu un accident où il a perdu trois orteils. Il effectuera des light jobs. Ici, nous valorisons la personne tout en l’aidant à comprendre que la vie est difficile. Nous aidons avec notre équipe mais la personne doit aussi prendre sa vie en main.»

Vinessen signera ainsi contrat en tant que helper et démarre son nouveau job aujourd’hui. Il a aussi reçu des meubles et un endroit décent pour vivre afin qu’il puisse prendre un autre départ…

Le jeune homme se confond en remerciements. «Merci à tous. J’ai envie de dire à tout le monde, ne restez pas immobiles, bougez pour changer les choses», dira Vinessen, les larmes aux yeux…

Nathan Julie : «L’amour vaut plus que l’argent» 

Il n’en est pas à sa première action citoyenne. Nathan Julie n’est pas resté insensible à la situation de Vinessen. Maison, vêtement, nourriture et travail… Il conçoit qu’il a donné le nécessaire à Vinessen mais maintient qu’une chance vaut de l’or et qu’il faut savoir la saisir. «Je ne veux pas que demain mes enfants me reprochent de n’avoir rien fait quand je le pouvais pour changer les choses. Je le dis franchement. Le gouvernement fait des choses pour les gens, pour les jeunes mais il est aussi de la responsabilité de la personne de vouloir changer, d’avancer», explique Nathan Julie. «Une chance vaut plus que gagner Rs 105 millions au loto. L’amour vaut plus que l’argent.»