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Interrogations sur la saisie des 100 kg de cannabis du 3 octobre 2022
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Interrogations sur la saisie des 100 kg de cannabis du 3 octobre 2022
Différence de poids après deux jours, «policiers» en fuite, «aveux» de trois personnes arrêtées, images Safe City qui se font toujours attendre, les trois semaines de préparation de la SST… Et le rôle d’un certain M. G. P. Ce sont là quelques incohérences qui interpellent.
Le récit, tel que fait par le commissaire de police (CP), lors de sa conférence de presse du 3 octobre 2022, commence à la route de Rivière-Noire. Et non du bateau présumé avoir transporté la drogue de l’étranger ou d’un autre bateau. La première question qui se pose, pourquoi n’a-t-on pas tenté de savoir le plus important, à savoir qui a livré la drogue de l’étranger et comment ? D’ailleurs, la police a parlé de colis gorgés d’eau et de réseau (voir plus bas).
D’après d’autres explications données sur cette saisie par la police sous le couvert de l’anonymat, un des fuyards a été vu et reconnu au volant d’un véhicule que la même police n’aurait toutefois pas identifié. Trois jours plus tard, on faisait savoir à un site d’information, connu comme étant proche du pouvoir et de la police, qu’il y avait un deuxième fuyard qui était «affecté à une unité d’élite de la force policière», a-t-on précisé, et que les enquêteurs étaient déjà «à ses trousses». Cinq mois plus tard, pas d’arrestation de ces fuyards. Ce qui étonne encore plus, c’est que la police n’a pas encore «fuité» le nom de ces policiers-fuyards-trafiquants de drogue présumés.
L’un des fuyards était-il en fait un certain M. G. P. ? Celui-ci aurait été impliqué dans un accident en novembre 2022 à Médine-Camp-de-Masque mais aurait pris la fuite. C’est une autre personne qui aurait pris la responsabilité de l’accident. On retrouvera deux jours après un peu de cannabis sous un des sièges de la voiture. La grosse cargaison de Rivière-Noire aurait-elle été prise par M. G. P. ? C’est en tout cas les questions que se pose Bruneau Lurette dans son affidavit.
Trois semaines de surveillance pour ça ?
Toujours lors de sa conférence de presse du 3 octobre 2022, le CP affirmait que «cette saisie a nécessité plus de trois semaines de surveillance» et que «nous analysons désormais les informations ainsi que les téléphones… Il doit automatiquement y avoir un réseau». Or, à ce jour, aucun réseau n’a été découvert et encore moins démantelé. Et les sept personnes arrêtées ne semblent pas se connaître entre elles! On ne sait pas si l’analyse de leurs téléphones et de leurs relevés téléphoniques a été faite et, dans l’affirmative, si même un petit réseau de sept personnes a pu être mis au jour.
Concernant le réseau présumé, une seule personne, à part les sept arrêtées le 3 octobre 2022, a été appréhendée le 11 novembre. Il s’agit de Kenny Couronne, qui serait le copropriétaire du véhicule que conduisait Jonathan Rabot. Cependant, il a obtenu la libération provisoire assez vite, soit le 20 décembre. Alors que son complice présumé, Jonathan Rabot, est toujours en détention…
Emballages gorgés d’eau ?
Autre interrogation sur cette saisie : le poids est descendu rapidement de 100 à 58 kg «après une pesée au Forensic Science Laboratory (FSL)». Est-ce que ces 42 kg «manquants» étaient présents lors de la conférence de presse du CP le 3 octobre 2022 ? En tout cas, un policier trouve surprenante l’explication donnée pour cette déflation, à savoir, que c’étaient les emballages «gorgés d’eau» qui auraient pesé 48 kg : «Comment est-ce possible que des emballages pèsent autant ? Ce qui tend à faire croire que la drogue est tombée en mer car il ne pleuvait pas ce jour-là. Et depuis quand les emballages en plastique sontils gorgés d’eau ? Il faudra faire une expérimentation…»
Ce qui est certain, c’est que l’analyse et le pesage ont été faits par le FSL après deux jours. Ce qui est plutôt rapide comparativement aux autres grosses saisies. Au FSL, on nous dit que si l’analyse et le pesage de la drogue saisie à Rivière-Noire ont été faits très rapidement, c’est parce que c’est la police qui en a fait la demande urgente. «La police est notre client. C’est elle qui décide de l’urgence de la demande. Sinon, les drogues saisies sont analysées et pesées suivant le principe First In First Out. Sauf si c’est une grande quantité de drogue dans lequel cas – et que la police le demande ou non - le FSL y accordera priorité.» Bref, il est clair que la police a fait une demande pour une analyse et un pesage express pour la drogue de Rivière-Noire mais pas pour celle saisie chez les Laurette. Et que le FSL ne l’a pas fait promptement et de sa propre initiative pour la drogue présumément retrouvée chez les Laurette et cela en dépit de la demande en ce sens par la défense en cour de Moka. Pourquoi ?
Camion à bétail
Des témoins parlent de camions utilisés pour le transport du bétail qui auraient été vus ce jour-là à Rivière-Noire et qui étaient utilisés pour bloquer la route… Cela n’a pas été confirmé cependant.
Toujours lors de sa conférence de presse du 3 octobre 2022, le CP a affirmé qu’il n’y avait aucun planting dans la saisie de 100 kg devenus 58 puis 54 kg de cannabis, en enlevant la drogue synthétique qui y a été «découverte» par la suite. Tout en ajoutant que la SST en a toutes les preuves. Or, les images Safe City du fameux cortège de transporteurs de drogue, entre autres, et qui constitueraient la preuve, n’ont pas encore été produites. «Espérons qu’elles n’ont pas été effacées», nous dit un proche d’une personne arrêtée. Les images Safe City sont aussi attendues pour démontrer qu’un des suspects n’était pas à Rivière-Noire à l’heure où la police soutient qu’il y était. Selon cette dernière, ce suspect s’y serait rendu dès 3 heures pour faire le guet.
Les aveux démentis
D’après les sources anonymes policières, au moins trois des personnes arrêtées ont fait des aveux. Ainsi, le policier Rabot aurait dit : «Mo enn polisié. Mo pé zis fer sa kours-la. Mo pé gagn zis Rs 5 000 pou sa. Mo pou koopéré» ; Enzo Romeo : «Mo pa pou kapav dir nanyé, éna problem ladan». Et James Laurent L’Entêté : «Misié, mo tant mo sans mwa. Pa pou kapav aksepté sa ‘case’-la. Pou al fer enn long chak sa.» Or, deux avocats contactés nient qu’il y a eu des aveux.
Ces aveux collectifs allégués, qui sont surprenants, semblent cependant servir la thèse que voudrait défendre la police, à savoir qu’une belle saisie, et en flagrant délit, a bien eu lieu le 3 octobre 2022.
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