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L’ex-Conservateur des forêts Vishnu Tezoo devra s’expliquer…

13 mars 2023, 18:00

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L’ex-Conservateur des forêts Vishnu Tezoo devra s’expliquer…

Le contrat accordant cet immense terrain à bail à Shaan Kumar Choolun a été signé par l’ex-Conservateur des forêts, maintenant casé au Jardin de Pamplemousses, après sa mise à la retraite. Mais qui l’a autorisé à accorder ce bail ?

C’est jeudi dernier que les enquêteurs de l’Independent Commission against Corruption (ICAC) se sont rendus au Registrar pour prendre connaissance du contrat liant The Eco Deer Park Association et les autorités. Mais l’express y était juste avant eux…

À la lecture de ce contrat de bail, on apprend que le terrain en question, appelé State Land Dayot et Mangin, occupe une superficie de 250,76 hectares, soit 734 arpents ! Le contrat a été signé, le 17 février 2022, par Vishnu Tezoo, le Conservateur des forêts de l’époque, et, est-il précisé, il représentait le ministère de l’Agro-industrie. Shaan Kumar Choolun a signé en tant que «lessee» et président de The Eco Deer Park Association. Un certain Vicky Giovanni Juliette y a ajouté sa signature comme vice-président de cette association de «chasseurs». Il semble qu’il soit un associé de Franklin dans la Société centrale de La Gaulette et ce prénom a été cité dans une des lettres de Bruneau Laurette. Mais on ignore s’il s’agit du même Vicky.

Le prix du bail : Rs 2,8 millions pour sept ans, avec paiement d’annuité allant de Rs 340 000 en 2021 à Rs 456 000 en 2028. Si les premières annuités d’une valeur de Rs 700 000 ont été payées par cette association pour 2021 et 2022, on apprend que c’était après de considérables retards et menaces de résiliation.

Selon nos informations, c’est en fait une autre personne, avec l’homonyme d’un ministre et qui habite Port-Louis, qui devait signer le contrat de bail comme président de cette association. Au dernier moment, c’est Choolun qui est apparu sur scène et a signé le bail. On ne sait pas si les autorités ont eu le temps de faire la due diligence sur ce nouveau président. Nous en aurons la confirmation bientôt. Ce qui est sûr, c’est que toutes les procédures n’ont pas été suivies. «Si elles l’avaient été, ce bail n’aurait pas dû être accordé, surtout que l’on savait que des plants de gandia y ont été déracinés en plusieurs occasions et que les gérants E. étaient toujours en embuscade derrière cette association», nous dit-on.

On reproche à Vishnu Tezoo, celui qui a signé le contrat, d’avoir été, au mieux, très négligent sur ce dossier. Il se montrerait très nerveux en ce moment et n’arrête pas d’aller aux renseignements concernant l’enquête de l’ICAC. Sollicité, Vishnu Tezoo nous a référé à l’attachée de presse du ministère de l’Agro-industrie. Celle-ci a bloqué notre journaliste sur son téléphone. Vishnu Tezoo sera convoqué cette semaine mais l’on ne sait pas s’il sera interrogé under warning. S’il est acculé, il devra dire qui l’a autorisé ou ordonné à accorder ce terrain de chasse à Choolun et consorts.

Prescription de forêts

Le rôle d’un arpenteur de l’État est aussi mis à l’index dans cette affaire. Il aurait été le complice du haut placé et d’un autre responsable qui ont autorisé l’allocation de ce bail à Choolun. Cet arpenteur vient d’être muté ailleurs car on a découvert qu’il passait le plus clair de son temps à rechercher des terrains dans la forêt qui se trouve en dehors des State Lands, et qui ne sont pas occupés par les propriétaires, pour ensuite les faire prescrire par ses amis et proches, avec la complicité d’un notaire connu pour ce genre de magouilles.

Nous apprenons que l’arpenteur et l’autre fonctionnaire s’en sont beaucoup enrichis, l’arpenteur possédant une grande maison à Flic-en-Flac. Le train de vie des autres protagonistes dans cette affaire, dont un qui vient de se payer une BMW valant plus de Rs 2,5 millions, fait d’ailleurs jaser. «Nous espérons que l’ICAC, qui enquête justement sur les sources de revenus de Franklin, éplucherales comptes de ces personnes», nous dit une source.

«Tansion gagn kout bal»

On nous parle aussi de la volonté de l’administration précédente des Bois et Forêts de fermer les yeux sur les activités illégales ayant lieu sur le site. Un ancien responsable décourageait les inspecteurs de visiter les lieux et faisait même croire à ces derniers qu’une balle perdue pourrait si facilement atteindre un visiteur. On se rappelle de la balle reçue par un membre de la Special Mobile Force en janvier 2016 et où l’on a parlé de fusil sans tireur! Il faut dire que les gérants E. braquaient souvent leur fusil sur les curieux. Nos journalistes ont même été conseillés de ne pas tourner autour du terrain. C’était juste avant la résiliation du bail.

Avec le recul, on réalise maintenant que cette hostilité armée visait surtout à protéger les plants de cannabis des regards. Et n’avait aucun rapport avec d’éventuels braconniers. On parle, en revanche, de plusieurs dépôts de plainte à la police venant des voisins qui ont vu disparaître leurs cerfs. Mais aucune suite n’y a été donnée. Pourquoi ? On nous raconte comment des hauts gradés de la police venaient souvent y chasser le cerf en portant leur vêtement de camouflage avant de faire la fête sur place.

Il aura donc fallu que l’attention soit attirée sur Franklin et ses sources de revenus pour que l’on découvre ses activités «événementielles» dans ce terrain de chasse. On soupçonne que le pot-de-vin de Rs 4 millions a été financé par Franklin. Pour une fois, il faut reconnaître que c’est grâce à l’ICAC qu’un autre scandale a été mis au jour, celui de l’allocation de baux de terrains de chasse à des prête-noms présumés. «Espérons que l’ICAC ne s’arrêtera pas à mi-chemin…», nous dit une source.

La chasse est ouverte

<p>The Eco Deer Park Association est autorisée dans le contrat de bail à faire de l&rsquo;écotourisme. Or, selon les témoignages recueillis, ce créneau n&rsquo;a pas été exploité. Sauf pour de charmantes Ukrainiennes qui étaient présentes aux rave parties pour entretenir notamment certains invités de marque.</p>

<p><strong>Chasseurs sachant chasser</strong></p>

<p>Si les vrais amateurs de chasse aux cerfs et aux sangliers respectent la nature et nos lois, tel n&rsquo;est pas le cas pour les braconniers, organisateurs de rave parties et de mariages, et autres planteurs de gandia. Et cela, avec la complicité des autorités. Après notre premier article du 8 mars, plusieurs chasseurs nous ont fait part de leurs inquiétudes devant le nombre croissant de forêts qui sont mises à la disposition de <em>&laquo;braconniers&raquo;.</em> Outre les terrains de chasse utilisés pour des concerts avec de la coke à gogo, on nous parle de ces ranchs loués pour les mariages, anniversaires, et fêtes familiales ou de bureau. &laquo;<em>Cela se fait au nez et à la barbe des autorités&raquo;</em>, nous dit un chasseur. <em>&laquo;Même le bruit de ces fêtes qui trouble la tranquillité de la forêt et de ses animaux ne semble pas parvenir aux oreilles de la police de Grand-Bassin&raquo;</em>, écrit le blogueur Paul Lismore.</p>

<p>Un chasseur nous parle de bâtisses grandioses ne respectant pas les normes. Et que dire des arbres abattus, dont certaines essences rares, pour faire place à des parkings et même au pâturage, comme sur le terrain loué à Choolun ? Il semble d&rsquo;ailleurs que ce soit cette violation et celle, bien sûr, concernant l&rsquo;organisation de rave parties qui soient la cause de la résiliation du bail la semaine dernière.</p>

<p>Des baux ont aussi été accordés aux <em>&laquo;chasseurs&raquo;</em> n&rsquo;ayant jamais tiré un seul coup de fusil. En parallèle à ces baux de terrains de chasse, des permis de port d&rsquo;arme auraient aussi été émis promptement, parfois en trois mois au lieu d&rsquo;un an. &laquo;On a créé une véritable milice armée&raquo;, soupire un chasseur.</p>