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Photographie
Ali Soliman: de la mécanique au bloc opératoire…
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Photographie
Ali Soliman: de la mécanique au bloc opératoire…
Immortaliser chaque moment de la vie est sa passion. Pour cette mission quotidienne, Ali Soliman est armé de deux choses : son appareil photo et sa créativité. Aujourd’hui, son nom est associé à divers projets, mais sur les réseaux, c’est toujours son point de vue et sa vision du monde qu’il expose. Qui se cache derrière la caméra ? Rencontre…
Il n’a pas d’histoire féerique associée à ses premiers pas titubants dans ce domaine. Il n’a que des souvenirs. Et une pointe de regret à peine perceptible lorsqu’il parle de cette époque, où il était âgé de huit ans. «Mon père était ingénieur mécanique. Beaucoup de ses clients sollicitaient ses services après les accidents pour se présenter en Cour. Il fallait prendre des photos des voitures accidentées», se souvient-il. Ali a donc commencé à aider son père en prenant des photos. À l’ère de l’argentique, ce n’était pas une mince affaire. Après le passage en chambre noire, il se rendait souvent compte que les photos étaient mal cadrées. Puis est arrivé le numérique, ce qui a facilité sa tâche car il pouvait voir sa photo avant d’appuyer sur le bouton. Les jours s’enchaînent, jusqu’au drame. Lorsqu’il a 13 ans, son père décède et Ali se rend compte que, malgré sa manipulation quotidienne de l’appareil, il n’a pas de photos de lui.
Documenter la vie
À partir de là, documenter chaque scène de la vie, immortaliser des instants éphémères deviendra plus que sa passion. C’est une mission. Presque une saine obsession. «C’est quelque chose que j’aurais souhaité avoir fait du vivant de mon père. Documenter sa vie. Kan mo mank li, mo ti pou kapav get ban foto la ek dir ‘tel zour li’nn fer tel zafer’». Des années après, la lourdeur de la tristesse est présente dans sa voix. Petit à petit, son appareil photo devient une extension de son corps. D’ailleurs, même au collège, il l’a toujours à portée de main. Sa caméra est saisie plusieurs fois par an. Mais comme tous savaient que c’était un souvenir de son père, l’appareil revenait à chaque fois vers lui sans problème.
Puis, sa caméra cèdera la place aux smartphones. «À cette époque, je voulais déjà photographier ce qui se passait autour de moi. La joie et l’innocence de mes amis, par exemple.» Avec le temps qui passe, il se rend compte que ce qu’il souhaite, au fond de lui, c’est vraiment immortaliser un moment passager, qui n’existera plus la seconde d’après. «Comme l’a fait Henri Cartier-Bresson. C’est un de mes modèles. Son travail, c’est la documentation de toutes les sphères de la vie», confie-t-il.
Mais finalement, que veut dire ce mot qui revient si souvent dans la conversation ? «La raison principale de faire une photo est de communiquer. Et cela passe forcément par l’image. Mais cela ne s’arrête pas là. Il faut que la photo soit parlante. Donc, il faut la contextualiser. Il faut que non seulement le sujet, mais chaque objet, même dans le fond, ait son importance et une relation avec le message global», explique Ali. Cependant, il est le premier à raconter, non sans rire, qu’il a eu d’innombrables photos prises sur le vif qui ont été largement appréciées. À l’instar d’une photo de la porte d’entrée de la Loge des francs-maçons à Vacoas, entre autres. «Bon ça, je mets sur le compte du flair. Je me suis dit qu’il y avait une opportunité de photo. La technique n’est pas au point, la lumière non plus, mais le résultat est bien.» Mais ce n’est pas toujours le cas. D’autres fois, il faut de la patience. Comme un lieu qu’il avait dans son viseur mais qu’il lui a fallu attendre quatre ans pour avoir la bonne lumière et le bon passage du public pour qu’il soit satisfait.
Au bloc opératoire
Après avoir fait le tour de sa passion, Ali Soliman marque un temps d’arrêt. Comme pour changer de chapitre. Sans transition, il passe des rues et des instantanés aux blocs opératoires. Que fait un photographe dans un tel lieu ? Des photos médicales. Cela a commencé alors qu’il était Social Media Executive à l’hôpital Apollo Bramwell. À un moment, l’appel de la photo se fait sentir et il bouge vers le patient welfare. «Cela consiste en l’accompagnement des personnes qui vont se faire opérer ou les familles qui viennent de perdre un proche. Une nouvelle connexion avec l’humain, la base des sujets de ma photographie. Un jour, j’ai demandé la permission à des parents de prendre en photo la chirurgie de leur enfant.»
C’était le début de la photographie médicale. «Encore une fois, j’ai été motivé par la volonté de documenter. Dans 10 ans, la manière d’opérer changera. Au moins nous n’oublierons pas comment cela se passait avant.» Toutefois, cela n’a pas été un long fleuve tranquille. «Déjà, dans un bloc opératoire, le photographe est la personne qui est totalement dispensable. Je devais m’intégrer dans une équipe qui n’avait pas besoin de moi.» La préparation est aussi fastidieuse : désinfection, habit de plomb de 12 kg pour se protéger des rayons, travailler sans flash ou autres accessoires, essayer d’avoir une photo convenable avec seule une lumière blanche et dure. Des fois, il a fallu faire 150 clichés pour avoir le bon. Cette première fois, la chirurgie a duré cinq heures. Ali est resté sur place pendant quatre heures. «Mais le plus dur a été de voir un petit corps ouvert, avec des médecins autour. Croyez-moi, cela ramènerait n’importe qui sur terre.»
Il se découvre alors une nouvelle passion pour cette catégorie. Les projets similaires s’enchaînent. Survient alors une succession d’événements, qui commence par un poste dans un corps paraétatique. L’idée était d’avancer dans sa carrière. Il ne s’y plaît pas car son travail était trop administratif et tuait sa créativité à petit feu. Puis, il bouge chez un concessionnaire de voitures. Encore une fois, un mauvais choix. La touche humaine devant son objectif lui manquait.
Ali se met alors au social à Maison Dawah. L’humain est présent dans sa vie créative à nouveau. Puis arrivent le Covid-19 et le confinement. Ali est alors marié et père d’une petite fille. Elle devient son sujet favori d’ailleurs. Mais après, il a fallu recommencer à bouillir la marmite. Cela n’a pas été simple. «Là, c’est la période de ma vie où je peux dire que c’est Dieu qui a répondu à mes prières. Du jour au lendemain, ma situation s’est améliorée.» À côté de cela, il capture toujours des instantanés de la vie quotidienne pour être sûr de ne rien perdre de la vie…
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