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Prises de position I Maneesh Gobin: du droit aux travers

6 avril 2023, 20:00

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Prises de position I Maneesh Gobin: du droit aux travers

L’Attorney General et ministre de l’Agro-industrie s’est signalé par ses cours de droit qu’il donne gratuitement lors de ses conférences de presse, après l’éclatement de chaque scandale. Même si, la plupart du temps, ses arguments varient de l’habituelle enquête en cours à des menaces à peine voilées.

Juste avant les révélations sur l’affaire Franklin, Maneesh Gobin était connu pour être celui qui se portait volontaire pour défendre le gouvernement et surtout le Premier ministre lors des conférences de presse hebdomadaires au Sun Trust. Si Bobby Hurreeram adoptait le style injurieux et agressif, Maneesh Gobin, lui, usait et abusait du style légaliste. Il faut dire qu’il est avocat, a été magistrat et conseiller juridique de l’Independent Commission against Corruption (ICAC). Et, bien sûr, Attorney General depuis le 14 septembre 2017, après le départ de Ravi Yerrigadoo, empêtré dans le scandale Bet365. C’est en cette capacité qu’il tentera de convaincre qu’il ne faut pas publier le rapport sur la mort de Soopramanien Kistnen, en avançant, entre autres, que cela pourrait nuire à tout procès éventuel contre les responsables du meurtre. On attend toujours le procès…

Bien plus, à la suite de la fuite du rapport de la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath, Maneesh Gobin émet un communiqué, le 16 octobre 2022, où il dénonce cette fuite, et annonce qu’il rencontrera le commissaire de police et même la cheffe juge pour décider d’une enquête et de sanctions sur cette publication. Pour lui, il était plus important de savoir qui a diffusé le rapport que de savoir qui a assassiné Kistnen.

Communiquera ou communiquera pas ?

C’est toujours en voulant défendre les autres et surtout son Premier ministre qu’il organise, au pied-levé, le 9 février 2023, une conférence de presse en solo à son bureau. Il donne le ton dès le début en mettant en garde contre tout «amalgame dangereux» en se basant sur une photo d’un suspect (NdlR, Rikesh Sumboo) avec Pravind Jugnauth. Malheureusement pour lui, les questions des journalistes l’emmenèrent tout aussi dangereusement sur l’affaire de demande de commission rogatoire par les autorités réunionnaises sur le même Franklin.

N’ayant visiblement pas prévu ces questions, il répétera à chaque fois comme un automate qu’il ne pouvait répondre sans l’autorisation des autorités réunionnaises. Ce qui fera éclater de rire beaucoup sur les réseaux sociaux et ailleurs. Il quittera abruptement la conférence de presse lorsqu’il sera questionné après avoir vanté les «grosses saisies» de drogues et la mise sur pied de la commission d’enquête de Paul Lam Shang Leen, décidée en fait par feu sir Anerood Jugnauth.

Maneesh Gobin émet un deuxième communiqué, sous le portefeuille de l’Agro-industrie, le 6 mars 2023, pour tenter de stopper les enquêtes journalistiques en demandant de laisser faire l’ICAC. Ce qui a encore fait rigoler. Si l’on se demandait à l’époque la vraie raison derrière ce communiqué menaçant et parlant de terrain à bail à Jean Hubert Celerine sous la tutelle des services forestiers de l’Agro-industrie, avec recul, on comprend un peu mieux sa démarche, après que l’on a pris connaissance des dépositions de Keegan Etwaroo, où le nom de Maneesh Gobin est cité dans l’affaire de pot-de-vin pour le bail du terrain de Grand-Bassin.

En revanche, aucun communiqué ni de déclaration fracassante ou même modeste de Maneesh Gobin après l’éclatement de l’affaire de singes de JinFei. Des magouilles sont pourtant soupçonnées, visant non seulement l’élevage illégal de singes par Shafeek Jhummun mais aussi et surtout le terrain de Le Val tombant sous le ministère de Gobin et qui allait être accordé à bail à Shafeek Jhummun, mais que ce dernier a déjà commencé à occuper.

L’Attorney General viendra à l’avant-poste encore une fois pour défendre, dans l’affaire sniffing, Pravind Jugnauth et… l’Inde. C’était le 6 août 2022. «Quel est le problème de l’opposition avec l’Inde ?» Cela, après avoir posé le même genre de question le 30 juillet 2022 au Sun Trust à Arvin Boolell concernant Agaléga. «Quel est son problème avec l’Inde ?» Il faut dire qu’il s’était vêtu pour l’occasion d’un costume indien, pour faire plus d’effet.

Vendredi 20 janvier 2023 : Maneesh Gobin convoque la presse, ne pouvant attendre le lendemain samedi. L’affaire est urgente : il venait de découvrir, certes avec un retard de 15 ans, que le Privy Council avait donné raison à Raphael Fishing en 2008 concernant le bail illimité sur St-Brandon. Que faut-il faire ? Nationaliser ces îlots ? Un truc comme ça, puisqu’il met l’opposition devant ses responsabilités, probablement pour un amendement constitutionnel. Pourquoi ? Selon Gobin, «popilasion pa pé profit ditou ek Raphael», tout en omettant de dire que Raphael Shipping, société mauricienne, rapporte des tonnes de poissons au pays, entre autres. Que faire alors, M. Gobin ? «Exploitons le guano.» Depuis ces fières déclarations et engagements, l’enthousiasme de Maneesh est retombé. 

Autre démarche controversée de Maneesh Gobin: l’institution d’un Law Practitioners Disciplinary Tribunal qui visait à discipliner les hommes et femmes de loi et dont le président allait être désigné par la cheffe juge mais après consultation avec l’Attorney General. Un an déjà que le projet de loi a été préparé. Devant la levée de boucliers, il semble que le projet de loi a été discrètement mis dans un tiroir.

Ah, sinon, dans son ancienne vie d’avocat, c’était un apôtre de la liberté d’expression…