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Extradition vers La Réunion: Franklin se retourne contre le gouvernement… enfin, légalement
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Extradition vers La Réunion: Franklin se retourne contre le gouvernement… enfin, légalement
Jean Hubert Celerine ne veut pas être extradé malgré l’assurance obtenue d’un nouveau procès à La Réunion. Il ne croit pas à cet engagement des Réunionnais que Pravind Jugnauth a même cité au Parlement mardi dernier. Toutefois, ce sont les autres points soulevés par Franklin dans son affidavit qui décoiffent.
On se souvient que le Premier ministre (PM) avait, en réponse à la Private Notice Question du 28 mars au Parlement, fait la chronologie de la demande de commission rogatoire et, le 4 avril, de celle de la demande d’extradition, les deux provenant des autorités réunionnaises. Il est bon d’y revenir (voir le timeline).
Dans son affidavit juré le 6 avril 2023, Franklin affirme qu’il a nié être impliqué dans quelque trafic de drogue lors de la commission rogatoire tenue le 18 septembre 2019, mais qu’aucune suite n’y a été donnée. C’est vrai car, selon Pravind Jugnauth lui-même, l’AG attendait toujours la traduction lorsque, six mois plus tard, soit le 29 juillet 2020, les Réunionnais ont adressé une note verbale pour signifier d’oublier la commission rogatoire.
• «Lost in translation» ?
Ce ne sera que le 6 février 2023, soit plus de trois ans après la demande de traduction en date du 14 janvier 2020, qu’un rappel sera envoyé au Master, traduction qui sera enfin reçue le 8 février 2023. On ne comprend pas trop pourquoi ce rappel a été envoyé puisque les Réunionnais les avaient informés, dès le 29 juillet 2020, que le dossier était clos. À quoi cette traduction tant attendue a-t-elle servi ou le serat- elle ? On ne le sait.
Dans son affidavit (nous n’avons pas vu celui de Nono), Franklin jure n’avoir pris connaissance de sa condamnation, prononcée le 2 juillet 2021 par le tribunal correctionnel de St-Denis, que 19 mois après, soit le 7 février 2023. Ce qu’il ajoute est encore plus surprenant : ni les autorités mauriciennes, ni celles de La Réunion ne lui ont signifié ce jugement et qu’il n’est au courant d’aucun mandat d’arrêt émis contre lui. Pourtant, la juge a bien écrit qu’un mandat d’arrêt a été «décerné» contre Franklin (et Nono), et que le jugement devait leur être signifié. Qui a fauté ? Les autorités réunionnaises ou mauriciennes ?
• Ni vu ni connu
Durant l’instruction de l’affaire, un mandat d’arrêt a bien été émis, le 13 juin 2019, par les Réunionnais contre Franklin et Nono. Le mandat d’arrêt était-il international et a-t-il été servi à Maurice aux deux accusés ? En tout cas, au paragraphe 9.17 de son affidavit, Franklin affirme qu’il n’a jamais été informé, même avant, pendant ou après sa comparution devant la Master, le 18 septembre 2019, qu’il était recherché à La Réunion ; il ajoute qu’il n’a jamais été convoqué pour comparaître devant le tribunal correctionnel de St-Denis le 17 novembre 2020 ou le 2 juillet 2021.
Question : s’il est vrai qu’il avait nié, le 18 septembre 2019, devant la Master, comme il le dit, sa participation dans le trafic de drogue en question, on se demande comment peut-il dire qu’il n’était pas au courant, tout au moins, de ce procès ?
• Laissez passer
Au paragraphe 9.18, Franklin affirme qu’il n’a jamais mis les pieds à l’île soeur. Ce qui est tout à fait possible. Cependant, il ajoute qu’il a pu voyager à plusieurs occasions vers Dubaï, la Chine, les Seychelles et Madagascar, entre mai 2018 et janvier 2023, sans jamais être inquiété par les autorités mauriciennes ou étrangères et cela, malgré la commission rogatoire de septembre 2019, a-t-il tenu à souligner. On savait qu’il avait librement passé nos frontières plusieurs fois mais on ne savait pas qu’il allait utiliser cette liberté contre nos autorités !
Au paragraphe 9.20, Franklin enfonce le clou en rappelant au bon souvenir de notre police et autres ce que la présidente du tribunal de St-Denis de La Réunion, Carole Meunier-Lemas, avait déclaré à propos de la «commission rogatoire internationale délivrée aux autorités mauriciennes aux fins notamment de procéder à l’interpellation de Jean Hubert Celerine… En dépit des engagements des autorités policières, aucune suite n’était donnée par les autorités requises…»
• Franklin localisé
Au paragraphe 9.21, Jean Hubert Celerine est encore plus taquin envers ses «protecteurs». Il cite la procureure générale de La Réunion qui a reproché aux autorités mauriciennes de n’avoir rien fait lors de la commission rogatoire délivrée pour amener Franklin à répondre aux accusations de trafic de drogue, cela, «alors même qu’il (NdlR, Franklin) était localisé». Pour rappel, le jugement répète qu’«aucune suite n’était donnée par les autorités requises, de sorte que les deux hommes, manifestement localisés, étaient convoqués aux fins d’interrogatoire de première comparution». On ne peut pas dire que Franklin n’était pas localisé puisqu’on l’a même vu rendre une visite de courtoisie à un policier de la station de Rivière-Noire en compagnie du comique Nico le Mimi.
Toujours dans son affidavit, Franklin achève ses protecteurs en se permettant de supposer que sa déposition devant la commission rogatoire du 18 septembre 2019 n’aurait jamais été communiquée à La Réunion. Bien plus, il déclare que, s’il a été jugé, condamné et a écopé d’une peine de prison, tout cela par contumace, ce n’est point de sa faute mais «by reason of the failures of the relevant authorities and this, in breach of my constitutional rights». En clair, Franklin accuse maintenant les autorités mauriciennes d’avoir violé ses droits constitutionnels. En le protégeant trop ?
La réponse de l’AG – s’il y en a une – est attendue avec impatience.
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