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Stéphane Isautier: «L’avenir se joue sur le continent africain»

11 avril 2023, 21:00

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Stéphane Isautier: «L’avenir se joue sur le continent africain»

Il n'est pas rare d'entendre parler du potentiel de croissance des pays africains au point où certaines entreprises ou groupes d'entreprises mauriciens n'ont pu résister à la tentation d'aller s'en rendre compte sur place. Miwa Sugar, nouvelle entité créée l'an dernier pour gérer les ex-actifs d'Alteo au Kenya et en Tanzanie, est l'une d'entre elles. Stéphane Isautier, CEO de Miwa Sugar, nous dévoile les facettes et autres caractéristiques de ces activités africaines.

Que retenir de la restructuration du groupe Alteo en deux entités, Alteo Limited pour ses opérations locales, et Miwa Sugar pour ses opérations en Afrique ?

Le point à retenir de la restructuration du groupe Alteo réalisée en novembre dernier est qu’elle illustre bien le succès de la stratégie de développement du groupe ces dernières années. Désormais, la nouvelle entité Miwa Sugar assure la gestion des actifs du groupe en Afrique, notamment TPC en Tanzanie et Transmara Sugar Company Limited (TSCL) au Kenya. C’est l’élément qui fait notre force.

En effet, Miwa Sugar est la combinaison d’une entreprise dynamique ayant un fort potentiel de croissance au Kenya, TSCL, et TPC, une société qui, durant ces vingt dernières années en Tanzanie, a démontré son potentiel à maîtriser les facteurs devant lui permettre d’atteindre la maturité recherchée pour ses actifs. D’ailleurs, nos équipes tanzaniennes ont célébré la semaine dernière une performance record de 116 500 tonnes de sucre pour la campagne 2022-23. Pour mettre cette performance en perspective, il suffit de la comparer avec la production de sucre à Maurice en 2022, qui s’élevait à 232 700 tonnes.

Bien sûr qu’il est possible d’avancer comme argument que le contexte est différent puisque nos champs à TPC sont irrigués à 100 %. Cependant, cette situation met clairement en évidence la possibilité d’y réaliser un rendement exceptionnel grâce à la maîtrise technique de nos équipes. Autant de facteurs qui viennent soutenir notre stratégie de placer à la première place de nos principaux objectifs, la nécessité d’accentuer le développement de cette assise régionale en Afrique de l’Est.

Pourrait-on conclure qu’en termes de recherche de potentiels de croissance, il faut désormais compter avec le continent africain ?

Clairement, oui, l’avenir se joue sur le continent africain. La création de notre entreprise nous donne ainsi l’opportunité de nous concentrer uniquement sur nos activités régionales, avec cependant des leviers différents pour investir dans de nouveaux projets. Nous prévoyons d’ailleurs d’injecter, à court et moyen termes, près de USD 80 millions, s o i t q u e l q u e Rs 3,7 milliards au taux de change des derniers jours, Rs 47,70 le dollar américain, dans différents projets à TPC et TSCL pour maximiser le potentiel de ces actifs. Toutes les études techniques sur ces investissements ont été finalisées. Nous finalisons maintenant les modalités de financement et l’obtention des autorisations nécessaires.

En parallèle, nous continuons à prospecter la région pour y repérer l’existence d’autres opportunités d’investissement. Autant d’éléments qui viennent confirmer notre niveau élevé de confiance dans le potentiel du continent. D’ailleurs, nous ne sommes pas les seuls à avoir adopté une telle posture. La direction de Miwa Sugar est parfaitement au courant de leur existence. Elle a mis en place une stratégie dont le principal objectif va consister à se lancer sur la piste de ces investisseurs qui ont dévoilé l’existence d’un appétit pour l’Afrique car ils ont compris que le continent regorge d’opportunités de croissance avec sa population jeune et, de surcroît, une forte croissance de ces pays qui se développent rapidement.

 

«Nous avons pour ambition d’obtenir la certification Bonsucro pour nos activités tanzaniennes et kényanes. Cette certification, dont dispose déjà Alteo Milling à Maurice, est la référence mondiale pour une production de sucre…»

 

Comment le groupe est-il parvenu à s’intégrer au mode opératoire du monde des affaires dans cette partie du continent et se faire accepter ?

Miwa Sugar emploie directement plus de 4 000 personnes sur le continent. La création de richesse est répartie entre les investisseurs, les employés et les partenaires commerciaux et institutionnels. De plus, Miwa Sugar investit continuellement dans l’amélioration des conditions de vie des communautés où elle opère et collabore avec celles-ci depuis plus de 20 ans. En Tanzanie, par exemple, nous améliorons continuellement la qualité des services offerts par l’hôpital de TPC afin de l’aider à fournir les soins nécessaires à tous ceux qui vivent et travaillent sur la propriété et dans la région, soit plusieurs milliers de Tanzaniens. À travers notre fondation FT Kilimanjaro, nous soutenons énormément les villages de la région en construisant des écoles, en offrant des bourses d’études – 42 en 2022 – et en finançant des projets de développement comme le projet de création de jardins potagers partagés sur 180 arpents.

Au Kenya, nous avons aussi massivement investi dans la création de routes reliant les villages voisins. Nous améliorons également l’accès à l’eau et finançons les écoles environnantes. Cet attrait pour l’Afrique se traduit également dans son inclusion dans notre identité, à travers notre logo, nos couleurs et même notre nom. En effet, Miwa est un mot swahili qui signifie tige de canne. La décision d’emprunter un mot au swahili n’est pas anodine. Il s’agit d’une façon de démontrer l’intérêt qui nous incite à manifester notre proximité avec l’Afrique de l’Est et, dans le même souffle, de rappeler que nous sommes physiquement ancrés dans une région swahiliphone. Nous souhaitons nous positionner comme un acteur sérieux et responsable du développement cannier dans cette région.

Aujourd’hui, dès qu’un projet d’envergure prend forme, la question qui se pose est l’importance que son promoteur attachera aux obligations d’un mode de développement durable. Comment cette posture se dévoile-t-elle dans la stratégie de développement de Miwa Sugar ?

De manière générale, on peut dire que notre matière première, la canne à sucre, constitue un véritable atout pour l’environnement. En sus d’être efficace contre l’érosion des sols, la canne à sucre est un puits à carbone extrêmement efficace. La canne est au cœur d’un modèle d’économie circulaire produisant sucre, bio fertilisants et énergie verte ; elle joue un rôle clé à la fois pour l’environnement, l’agriculture et l’industrie. Le développement durable reste l’un des aspects phares de la stratégie de développement de Miwa Sugar.

En Tanzanie, par exemple, nous avons investi dans le traitement des eaux usées grâce à un système de lagunage. Ces bassins aménagés sur 50 hectares permettent de minimiser l’impact de nos eaux usées tout en favorisant le développement de la biodiversité locale, puisqu’ils attirent de nombreuses espèces d’oiseaux. Toujours à TPC, nous avons également créé une réserve naturelle sur notre propriété. Baptisée Namalok, elle s’étend sur plus de 4 700 hectares et accueille une faune très variée, notamment de nombreuses espèces d’oiseaux, des antilopes et, depuis peu, des zèbres et des gnous. À terme, nous avons aussi pour ambition d’obtenir la certification Bonsucro pour nos activités tanzaniennes et kényanes. Cette certification, dont dispose déjà Alteo Milling à Maurice, est la référence mondiale pour une production de sucre qui respecte les obligations du développement durable.

Un autre élément d’un projet de développement qui n’échappe pas à l’attention des autorités est la politique énergétique, qu’elles souhaitent la plus verte possible. Quelle place l’obligation d’une unité de production d’énergie propre occupe-t-elle dans votre projet ?

La question se pose différemment pour Miwa Sugar. Les campagnes sucrières durent plus longtemps en Afrique qu’à Maurice. La coupe dure neuf mois en Tanzanie et 11 mois au Kenya. Cette situation nous permet de produire de l’électricité toute l’année uniquement à partir de la bagasse. En plus d’alimenter l’usine et les habitations de la propriété, notre usine TPC en Tanzanie fournit aussi de l’électricité au réseau tanzanien depuis plusieurs années. Rien qu’en 2022, 13,80 GWh d’électricité ont été exportés sur le réseau national. Au Kenya, nous échangeons avec les autorités pour assurer une fourniture d’électricité au réseau national dans les années à venir. Nous projetons de construire une centrale de cogénération 100 % bagasse d’une capacité de 21MW, dont 100 GWh pourraient ainsi être exportés annuellement. Actuellement, nous transformons la bagasse excédentaire en briquettes de biomasse compressée qui sont utilisées comme combustible par d’autres industries, notamment par les usines de thé voisines de la sucrerie.

Quels éléments ont favorisé la cotation en dollars des titres de la société ?

Les activités de Miwa Sugar sont basées en Afrique de l’Est et les devises utilisées sont les shillings tanzaniens et kenyans. Le dollar américain étant une monnaie de référence, il s’est rapidement imposé comme le meilleur choix pour la cotation des valeurs d’une société sur la place boursière. Nous avons aussi tenu compte des investisseurs qui ne souhaitent pas être exposés au dollar ; ils auront la possibilité d’opter pour une formule qui leur permettra d’obtenir leurs dividendes en roupies mauriciennes. Miwa Sugar est une jeune entité avec une équipe de direction expérimentée et de grandes ambitions. Notre objectif principal est de poursuivre et d’accentuer le développement de notre assise régionale en Afrique de l’Est, un marché dynamique avec un fort potentiel de croissance. Nous croyons fermement que nous allons y accomplir de belles choses avec le concours de tous nos employés.