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Meurtre d’Afzal Subdar: un amour qui détruit
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Meurtre d’Afzal Subdar: un amour qui détruit
Au quartier de Plaine-Verte, à la rue Maurice Poupard, il suffit de donner son nom, et petits et grands se souviennent encore de l’incident. On frappe à la porte de sa modeste demeure, et son père nous accueille en toute humilité. Neuf mois se sont écoulés depuis que Gorabhye Subdar a dû enterrer son fils Afzal, 31 ans et victime d’un assassinat macabre, après que son corps sans vie et en état de décomposition avancé a été déterré par la police à Pailles.
Le 10 juillet 2022, alors que le pays se rassemblait pour célébrer la fête du sacrifice et de la prière à l’occasion de l’Eid Ul Adha, c’était le choc et un moment qui allait marquer le début d’une souffrance de toute une vie pour une famille entière. Gorabhye Subdar venait d’apprendre que son fils Afzal, dont il avait signalé la disparition à la police le 3 juillet, avait été brutalement assassiné et enterré au pied d’une montagne à Pailles. Les meurtriers présumés n’étaient autres qu’Areefah Mukada, épouse d’Afzal et mère de ses trois enfants, et son cousin, Usaamah Allumsaib.
Il s’avère qu’Afzal et Areefah étaient tombés amoureux quand ils étaient très jeunes. Au fil du temps, le couple s’est marié et s’est installé à l’étage de la maison familiale. Bientôt, ils sont devenus parents de trois enfants, soit des jumeaux et une fille. Cependant, avec le temps, leur relation aurait connu «des désaccords par rapport au comportement d’Areefah… en raison de laquelle Afzal serait inquiet», confie Gorabhye Subdar. Areefah irait alors parfois habiter dans une autre maison, non loin du domicile de son époux. Usaamah Allumsaib, le cousin d’Afzal et habitant SaintPierre, serait par ailleurs tombé amoureux de l’épouse de celui-ci.
On apprend aussi qu’une semaine avant le drame, une dispute aurait eu lieu alors qu’Usaamah avait ramené Areefah à moto dans la soirée. Or, dans la nuit du samedi 2 juillet, alors que Gorabhye Subdar allait assister à une séance de prière, il aurait vu Afzal pour la dernière fois, quand ce dernier serait allé déposer sa fille chez sa femme. Le lendemain, lorsqu’Afzal n’est pas rentré chez lui, la famille est allée porter plainte au poste de police. «Au début, je n’avais pas remarqué qu’il n’était pas là, puisque l’entrée de sa maison à l’étage est séparée. J’ai présumé qu’il était déjà là, dormant… Le lendemain matin, Areefah est venue nous voir, faisant semblant de ne rien savoir, pleurant et demandant où se trouvait Afzal. Usaamah a aussi aidé, ou devrais-je dire, a prétendu nous aider, en le cherchant. Comme nous n’avions aucune idée d’où il se trouvait, nous avons décidé d’aller porter plainte concernant sa disparition.»
Passion meurtrière
Par la suite, au cours d’une enquête menée par la Criminal Investigation Division (CID) de Port-Louis North, Areefah a été interrogée et a fini par avouer avoir commandité le meurtre de son époux Afzal, avec Usaamah Allumsaib, car elle avait une liaison amoureuse avec ce dernier.
Après son arrestation, Usaamah Allumsaib a quant à lui expliqué aux enquêteurs que cette nuit-là, il avait dit à Afzal qu’il avait caché de l’argent au pied de la colline, située à la rue Bonnefin à Pailles. Afzal l’aurait alors suivi à la montagne, où il aurait creusé un trou dans une tentative de découvrir l’argent, et aurait été poignardé et enterré dans ce même trou. Areefah a également dit à la police que son amant Usaamah Allumsaib l’avait appelée après avoir commis le meurtre pour l’informer qu’ils étaient tous les deux «libres maintenant».
Une explication qui ne semble toujours pas convaincre Gorabhye Subdar. «Logiquement parlant, mon fils avait eu une dispute avec Usaamah et était bien conscient de la gravité de la situation concernant sa femme (Areefah), lui-même et ce dernier. Pourquoi, à aucun moment pendant la nuit, l’aurait-il suivi jusqu’au pied d’une montagne ? Et ce, pour de l’argent ? Il n’était pas du genre galoup deryer larzan. Cela n’a aucun sens…. nou pa kone vraman kinn arive.»
Par la suite, l’équipe de la CID, en collaboration avec la Major Crime Investigation Team North, a déterré le corps d’Afzal. L’autopsie a attribué son décès à un «stab wound to the heart». Areefah et son amant Usaamah Allumsaib ont été inculpés provisoirement pour «conspiracy to commit murder» et «murder» pour l’homme.
Par ailleurs, Areefah Mukada avait auparavant porté plainte contre son époux pour violence domestique. Afzal Subdar avait été arrêté et libéré contre une amende. Une allégation qui, selon Gorabhye Subdar, reste infondée. «Il avait l’habitude d’avoir des désaccords et des disputes verbales avec sa femme, mais n’a jamais été physiquement violent. Il ne l’avait jamais été de sa vie. Je réalise maintenant, en réfléchissant à tout cela, qu’il pourrait bien s’agir d’une démarche préméditée de la part de sa femme, afin de couvrir ses arrières et de ne pas être soupçonnée de quoi que ce soit par la suite…», nous confie-t-il. L’incompréhension sur de nombreux aspects qui ont conduit à la fin tragique d’Afzal règne toujours chez la famille Subdar.
Dans l’espoir de justice
Neuf mois plus tard, la souffrance est loin de s’être atténuée. Gorabhye Subdar est inconsolable. Il nous confie qu’il a été pratiquement impossible de retrouver la routine quotidienne «normale». «Ses enfants sont maintenant sous notre responsabilité et ils vivent avec nous au rez-de-chaussée. Nous faisons de notre mieux pour nous assurer qu’ils ne manquent de rien. Mais on ne peut pas remplacer leur père.» Il fond en larmes, prenant quelques minutes pour essayer de nous parler à nouveau. «Au début, c’était dur pour moi. Personn pa kapav kontan enn zanfan plis ki so paran… Je grillais cigarette sur cigarette à peine une semaine après les funérailles d’Afzal. J’ai dû subir une intervention médicale plus tard. Depuis, j’ai arrêté de fumer, parce que je me suis dit que je devais être fort pour subvenir aux besoins de mes petits-enfants.»
De plus, le mois de ramadan et le jour de l’Eïd Ul Fitr ont été particulièrement difficiles, souligne Fareeda, la mère d’Afzal. «Il était notre fils cadet. Cette année fut notre premier ramadan sans lui et c’était difficile à vivre car sa présence joviale nous manquait. Il aimait manger des gâteaux salés. Il aimait aussi venir dans la cuisine et de manger des oignons frits. Alors que nous préparions le repas de l’Eïd cette fois-ci, il était difficile à accepter qu’il ne soit plus…», relatent les parents.
Et les enfants ? «Les jumeaux sont âgés de cinq ans et peuvent comprendre que leur père est décédé. Ils vont régulièrement prier au cimetière. La semaine dernière, quand ils y sont allés, ils ont beaucoup pleuré... Sa petite fille a maintenant deux ans et ne comprend toujours pas. Le jour de l’Eïd, je l’ai emmenée à l’étage (où les enfants vivaient avec Afzal) pour l’aider à prendre son bain. Elle me demanda tout à coup si son père viendrait l’aider, comme il le faisait habituellement. Cela m’a brisé le cœur et je ne savais pas quoi répondre», indique Fareeda Subdar.
Les parents nous confient aussi qu’ils ont été trop épuisés pour même pouvoir s’intéresser à l’évolution de l’affaire sur le plan juridique. «Mo pann rod kone…Monn fini perdi mo garson, zame li pou revini ankor… mais j’ai confiance en la justice pour qu’ils (NdlR : Areefah Mukada et Usaamah Allumsaib) soient punis pour ce qu’ils ont fait. Et pour qu’un jour, mes petitsenfants comprennent ce qui s’est passé. Pour cela, j’ai gardé des copies d’articles de presse concernant le meurtre de mon fils… afin que lorsque ses enfants grandiront et commenceront à poser des questions, ils puissent les lire et avoir toutes les réponses.»
La police nous affirme que l’enquête est bouclée et le dossier envoyé au bureau du Directeur des poursuites publiques. Areefah Mukada et Usaamah Allumsaib sont à présent détenus à la prison.
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