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Chagos - Expulsé de son île natale en 1973: «Ti zet nou isi kouma pe zet zanimo dan lanklo»
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Chagos - Expulsé de son île natale en 1973: «Ti zet nou isi kouma pe zet zanimo dan lanklo»
Il y a 50 ans, le 27 avril 1973, une cinquantaine d’hommes et de femmes accompagnés de plus de quatre-vingts enfants avaient été placés sur le Nordvaer, un bateau travaillant sous l’administration du Territoire britannique de l’océan Indien. Ce cargo construit en Allemagne en 1958 était utilisé pour transporter des denrées alimentaires, des ouvriers et du coprah. Ce jour-là, quelques derniers Chagossiens, particulièrement de Peros Banhos, ont vu leur vie basculer à jamais. Avec seulement un petit sac rempli de quelques vêtements et de vivres, ils ont été embarqués sur ce bateau, laissant derrière eux leur vie qu’ils n’ont jamais pu oublier. Pour rendre hommage aux Chagossiens qui ont été expulsés de leur île, le groupe BIOT Citizens de l’Île Maurice organise une messe aujourd’hui à l’église Sainte-Croix à 15 heures. Tonton Roger*, qui a vu le jour sur Peros Banhos, se souvient de ce moment comme si c’était hier. En fermant les yeux, il se laisse aller en fredonnant les paroles de Claude Lafoudre Mo tonton so bourik et les événements défilent devant lui. Il revoit le Nordvaer et les gardes qui les ont forcés à monter à bord. Ce jour-là, après qu’ils ont quitté leur île et qu’ils sont arrivés à la rade de Port-Louis, quelques jours plus tard, les Chagossiens ont refusé de descendre du bateau, car ils ne savaient pas à quoi s’attendre. Ils n’avaient rien, ni argent, ni nourriture, ni vêtements. Ils avaient tout laissé sur leur île.
En arrivant, on leur avait proposé un logement aux Dockers Flat, à Port-Louis, avec une petite somme d’argent pour qu’ils puissent survivre. «Nou pa ti kone ki pe atan nou. On ne voulait pas quitter notre île. On vivait bien là-bas. On était comme une grande famille. Personne ne nous avait dit qu’on allait nous expulser de notre maison. Lorsque nous sommes arrivés ici, nous avons eu une vie misérable. Zot inn zet nou kouma pe zet zanimo dan lanklo», raconte un natif. Quelques Chagossiens étaient cependant restés sur leur île et avaient continué à travailler normalement jusqu’à ce que quelques semaines après, on leur ait proposé de choisir le pays où ils voulaient aller vivre, entre l’île Maurice et les Seychelles, se souvient Tonton Roger.
Ce n’est que quelque temps plus tard que certains des Chagossiens avaient reçu une maigre indemnisation, se souvient-il. Les années ont passé, mais notre Chagossien âgé de 76 ans n’a jamais pu oublier sa vie sur Peros Banhos. «Parfois quand je ferme les yeux, mes larmes coulent toutes seules. Je me retrouve sur mon île, ma vie est belle, mes parents sont devant moi, on travaille et mange bien. Je ne connaissais pas la tristesse, le stress ou les problèmes.» Il rêve souvent du moment où il pourra enfin revoir son île natale.
Jean*, un autre natif, avait quant à lui quatre ans lorsque sa famille et lui ont embarqué sur le bateau Nordvaer pour être emmenés à Maurice. Il avance que même s’il a quelques vagues souvenirs de son enfance, il ne méritait pas cela. «Personne ne mérite d’être expulsé de son île. Pendant des années, ce traumatisme m’a collé à la peau. J’ai grandi en entendant des gens crier que j’étais un Zilwa. Je n’ai jamais senti que je pouvais m’intégrer ici. J’ai vu mes parents pleurer, quand nous n’avions pas à manger, que mon père n’avait pas de travail. Avec persévérance, j’ai réussi à sortir de la misère et aujourd’hui j’ai un travail, mais ce n’était pas facile», confie le quinquagénaire.
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