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L’express 60 ans│1975: l’année de tous les malheurs

19 mai 2023, 22:00

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L’express 60 ans│1975: l’année de tous les malheurs
  • Manif estudiantine, cyclone Gervaise, accident meurtrier à Rose-Belle et incendie à Harel Mallac…

Ceux qui avaient dix ans ou plus en 1975, qui sont encore en vie et ont encore toute leur tête, se souviendront, sans doute, de cette année. Une année «soy» pour reprendre une expression en kréol signifiant que c’est une année de malheurs. Les moments les plus tristes ont été l’accident de Rose-Belle, le cyclone Gervaise, l’incendie à Harel Mallac. Moins triste, certes, le soulèvement des étudiants. Même si la majorité d’entre eux ne savaient pas pourquoi ils prenaient part à une manifestation ; le gouvernement d’alors est venu, un an après, avec une mesure historique en décidant de rendre l’éducation secondaire gratuite. Au cours de 1975, il y a eu une vague de grèves. Il y a eu aussi deux évènements sportifs, qui ont marqué l’histoire du sport. D’abord en juillet, un des clubs de football historique de Maurice, les Hindu Cadets, sont sacrés champions pour la première fois de leur histoire. Et en cyclisme, Gabriel Anazor devient le premier Mauricien à avoir remporté le Tour de l’île de La Réunion. L’annonce du décès du chanteur Mike Brant, le 25 avril, à la radio par Jean-Claude Gébert, avait choqué plus d’un à Maurice. 

Les grands évènements de 1975 par mois

Janvier

La production sucrière pour l’année précédente est de 697 065 tonnes. On annonce la construction de l’aéroport du Nord, qui devrait être prêt en 1985. Le port fait face à des confrontations et durant l’année, il y aura plusieurs grèves et des grèves perlées. Il y aura aussi des réformes importantes proposées au Code civil.

Février

Après le cyclone Carol, 15 ans auparavant, Gervaise frappe de plein fouet Maurice. Le bilan est de neuf morts, 59 blessés et 10 000 réfugiés. Pendant la nuit du 6 février, des rafales ont oscillé entre 160 et 200 km/h et à Mon Désert, on a enregistré une rafale de 280 km/h. Ce qui a le plus surpris les Mauriciens, c’est l’accalmie enregistrée. La fourniture électrique était à terre, les Mauriciens avaient l’oreille collée au transistor pour connaître les dernières nouvelles. Il n’y avait pas encore les équipements de pointe à la station météorologique de Vacoas et de nombreux Mauriciens pensaient qu’avec l’accalmie, Gervaise s’éloignait du pays. Or, c’est l’œil du cyclone qui traversait l’île et quelques heures plus tard, de nouvelles rafales se succédaient, causant encore plus de dégâts. Plusieurs pays ont aidé Maurice à se remettre debout. Des soldats britanniques ont même été dépêchés pour prêter main-forte lors du grand nettoyage. Le pays s’est relevé après plusieurs mois. La bonne nouvelle en ce mois de février est que Maurice a pu vendre son sucre à 260 livres sterling la tonne. Des recettes de Rs 2,5 milliards étaient attendues pour le sucre.

Mars

Dans son message à la nation à l’occasion de la célébration du 13e anniversaire de l’accession de Maurice à l’indépendance, le Premier ministre, sir Seewoosagur Ramgoolam, annonce la création de 80 000 emplois. L’avocat Gaëtan Duval devient le président du Bar Council. Un Mauricien, Roger Marot, gagne Rs 125 000 aux Pools Vernon.

Avril

Les boulangers font grève et privent 35 000 écoliers de pain. Grande première médicale à Maurice : un pacemaker est implanté sur un patient de 72 ans à l’hôpital SSRN. Cinq cas de malaria sont détectés. L’Arya Sabha, présidée cette année-là par Mohunlall Mohit, fête son centenaire. Il y a eu une tentative de viol à Londres sur Françoise Pascal, la Mauricienne qui jouait dans la série Mind Your Language. Une délégation chinoise est à Maurice pour la culture du riz. Trois frères Mazarally, des habitants de Port-Louis, meurent noyés à Baiedu-Tombeau alors qu’ils étaient dans un kayak en fibre de verre.

Mai

Dans la matinée du 12 mai, une terrible nouvelle parvient aux Mauriciens. Ils apprennent la nouvelle choquante par la Mauritius Broadcasting Corporation avant qu’ils n’en sachent davantage sur ce terrible accident, le lendemain dans les journaux. Un camion appartenant à Lagesse Frères Ltée, transportant 35 tonnes d’engrais chimique, qui se dirigeait vers Mahébourg, fait une première victime à proximité de la salle de cinéma Capitol à RoseBelle. Ses freins ont lâché et la descente aidant, le camion, qualifié de fou, fauche 25 personnes, écrabouille une auto et démolit deux maisons, balayant des piétons sur son passage. Bilan : 15 morts, dont six enfants qui rentraient à la maison ou en revenaient après avoir déjeuné à la maison durant la récréation. Le lendemain, 50 000 personnes assistent aux funérailles des victimes.

L’autre évènement du mois de mai est la grève des étudiants. Les premiers à faire grève sont ceux du collège Bhujoharry. Deux jours après, des étudiantes du Queen Elizabeth College, pourtant boursières et qui n’ont, par conséquent, pas à payer des frais de scolarité, sont aussi en grève. Les étudiants d’autres collèges leur emboîtent le pas. Cela débouche sur une grande manifestation des étudiants, le 20 mai. Ceux de Port-Louis se dirigent vers les Plaines-Wilhems et ceux des autres villes descendent vers la capitale. Mais ils sont bloqués sur le pont de Grande-Rivière-Nord-Ouest. Il y a des heurts entre les étudiants et la police, qui font plusieurs blessés. Des émeutes sont enregistrées. Dans la foulée, des véhicules sont incendiés, des camions de boissons gazeuses dévalisés. Un camion avec des pull-overs est également dévalisé. Pull-overs que de nombreux étudiants porteront quand ils retourneront en salle de classe quelques jours plus tard! Le ministre de l’Education, Régis Chaperon, fait appel, à plusieurs reprises, aux étudiants pour un retour à la normale.

Juin

Le ministre des Finances, sir Veerasamy Ringadoo, présentant le budget, annonce une réduction sensible de l’impôt sur le revenu. Le Mouvement militant mauricien (MMM) qualifie le budget de «dangereux et démagogique». Radha Poonoosamy, candidate battue du Parti travailliste à Belle-Rose/Quatre-Bornes, est nommée ministre de la Condition féminine, des prix et de la protection des consommateurs. Sa nomination fait suite au décès de Mohabeer Foogooa. Le premier Boeing 747 débarque à l’aéroport de Plaisance avec du cargo.

Juillet

Le ministre de l’Emploi, Alex Rima, démissionne. Joyce et Jean Pierre Durant écrivent un livre sur le MMM. Le Parti mauricien social-démocrate lance sa campagne électorale devant 2 000 personnes à Curepipe. Le juge Jacques Vallet, qui préside le Tribunal d’arbitrage permanent accorde une augmentation de 20 % aux laboureurs de l’industrie sucrière. L’équipe des Hindu Cadets remporte, pour la première fois, le championnat de Maurice. Lors de leur dernier match, ils battent les Muslim Scouts par un but à zéro. L’équipe des Scouts aurait dû être victorieuse pour être sacrée championne. C’est l’annee suivante qu’elle remportera, à son tour, la ligue de football pour la première fois.

Août

La militarisation de l’océan Indien est évoquée par James Mancham, le président des Seychelles, et par Sir Seewoosagur Ramgoolam. Gabriel Anazor, un habitant de Petite-Rivière, remporte le Tour de l’île cycliste de La Réunion et à Maurice, il reçoit un accueil triomphal. King Sweep de l’écurie Henry Ythier, piloté par Joe Byrnes, triomphe facilement dans le Maiden. Quelques jours après, le Mauritius Turf Club ouvre une enquête pour déterminer si des chevaux ont été dopés pour cette importante course. Le National Remuneration Board (NRB) recommande une augmentation de 40 % pour les employés du secteur hôtelier. Sir Seewoosagur Ramgoolam annonce des élections surprises pour l’année 1976 lors d’une réunion du Parliamentary Labour Party. Ces élections auront effectivement lieu en 1976, le 20 décembre plus précisément.

Septembre

C’est l’incendie de l’immeuble d’Harel Mallac, situé à la rue Edith Cavell à Port-Louis, qui fait l’actualité. Cinq étages du bâtiment sont ravagés. Heureusement, il n’y a eu aucun décès mais ce sinistre a fait 57 blessés. C’est une cigarette qui a déclenché l’incendie. Juste qu’avant que le feu ne se propage, trois grandes explosions ont semé la panique parmi ceux qui étaient dans la capitale. Même ceux qui étaient à Plaine-Verte ont entendu lesdites explosions. Des pièces de rechange d’une valeur de Rs 4 millions sont détruites. Le juge Droopnath Ramphul décède à la suite d’une congestion. Il était âge de 54 ans. L’oignon toupie, qui se vendait à 90 sous la livre, passe à Rs 1.15.

Octobre

La princesse Alexandra et son époux Angus Ogilvy sont en visite à Maurice. Ils sont accueillis à Plaisance par le gouverneur général, Sir Raman Osman. Des forages sont effectués sur le banc de Saya de Malha en vue de trouver du pétrole. Quelques semaines plus tard, ils se révèlent négatifs. Et Rs 166 millions sont prévues pour remplacer 10 000 maisons détruites par Gervaise

Novembre

La grève gagne les ouvrières d’usines. Ainsi, 300 ouvrières de Floréal Knitwear décrochent.. Dans la zone franche, une ouvrière gagne Rs 33 par semaine. Gaëtan Duval et Paul Bérenger sont en faveur d’un front commun de l’opposition. La vague de grève gagne également des ouvriers de l’imprimerie, de Coca Cola et de la brasserie de Phoenix. Il y a grève également dans le secteur théier. Le professeur Christian Barnard, pionnier de la transplantation cardiaque chez l’humain, séjourne à l’hôtel St-Géran.

Décembre

63 députés siégeant à l’Assemblée législative votent en faveur du droit de vote à 18 ans. Le gouvernement accorde 23 jours de congés publics en 1976. Le prix Nicolas Lambert est décerné à Jean-Claude de l’Estrac. Un médecin signe près de 10 000 certificats médicaux pour des employés de l’industrie sucrière. Le Tribunal d’arbitrage permanent recommande un boni d’un mois et 13 % d’augmentation aux travailleurs du transport et une augmentation de 10 % aux dockers. On prévoit une production de 800 000 tonnes de sucre pour 1976.

Le Mauricien de l’année est décerné aux étudiants. Il faut noter que selon les promotions de fin d’année dans les hôtels, avec Rs 65, vous pouvez déguster un menu copieux avec du camaron, des fruits de mer, de la salade de palmiste et la traditionnelle bûche de Noël au restaurant de l’hôtel Le Touessrok ! Ce qui équivalait à deux semaines de salaire d’une ouvrière de la zone franche !