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Lowen, 16 ans: «Mo ti anvi bann métié manuels pli valorizé»

28 mai 2023, 20:01

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Lowen, 16 ans: «Mo ti anvi bann métié manuels pli valorizé»

Pourquoi n’offre-t-on pas une bourse à nos ados, nos futurs plombiers, électriciens, maçons, travailleurs manuels ? Pourquoi ces métiers ne sont-ils pas davantage valorisés ? Pourquoi «l’extended programme» présente-t-il un taux d’échec si élevé ? Lowen, 16 ans, est pourtant lauréat de la débrouillardise.

Ce qui frappe chez lui, c’est sa gentillesse ; il est poli comme pas deux, manquerait plus qu’il fasse la révérence à la japonaise. Pour lui, le français c’est un peu du chinois. Ce qu’il aime c’est la biologie, la circulation sanguine, l’origine de la vie, la reproduction. En parlant de ça, on ne vous dira pas s’il a une copine, ses parents vont lire l’article qui suit.

Lowen a 16 ans. Il a le sourire facile, a un air faussement indolent. Cet homme en devenir aspire à de belles choses. Sa silhouette fluette épouse son polo gris griffé, l’ado extraverti mais timide se confie avec assurance, d’une voix posée. Sa discrétion n’a d’égal que ses ambitions. Il est actuellement en Grade 9 + (NdlR, Form III prevoc sous l’ancienne formule).

Est-ce qu’on se familiarise avec des métiers manuels ? Pas au collège. Lowen en tout cas kiffe les maths, l’anglais – sa diction est presque parfaite même s’il bute sur quelques mots – les sciences. Mais ça n’a pas toujours été le cas. Pour le Primary School Achievement Certificate (PSAC), il a eu des 6 partout : il a échoué, avoue-t-il avec un sourire contrit. Mais depuis, l’élève qui fréquente le collège Imperial à Curepipe a repris du poil de la bête. Sauf que le français demeure sa bête noire. «Dernié trimes monn gagn 2 lor 100. Bann verbe-là ki mo gagn problem.»

Son quotidien, il le conjugue entre les études, les cours particuliers et le bricolage, son dada. «Mo kontan monté ek démont bann laparey électrik. Mo kontan konpran koumma sa marsé.» Le MacGyver des temps modernes voudrait plus tard, quand il sera grand, être électricien. Est-il au courant du fait que plus de 95 % des élèves de l’«extended programme» ont échoué ? «Wi mo profeser inn dir nou…» La raison ? «Ena boukou bann zeness pran lekol koumma badinaz. Ena prefer ladrog, fimé, zot latet dan lot zafer...» D’accord, mais le système dans tout ça ?

«Pourquoi les métiers manuels ne sont-ils pas davantage valorisés ? Pourquoi le fait d’être maçon, électricien, plombier ou autre est-il moins bien vu que d’être avocat, médecin ?»
 

 Adossé à la chaise en bois, Lowen triture sa bague multicolore, adopte un air dubitatif. Il poursuit le fil de sa réflexion. Il est d’avis que la réforme a du bon. «Presque tous les collèges sont du même niveau désormais. Gagn lauréat dan bann kolez kot lontan pa ti pe ganyé…» Mais là où le bât blesse, c’est la «promotion automatique». Cela veut dire que «mem si to fail dan enn Grade, to ress monté to alé mem. Boukou zanfan pa konn lir ek ékrir, al konpoz PSAC. Si la base pa bon, be koumma pou fer apré ?»

Son socle à lui, c’est la famille. Tout n’a pas toujours été rose, il y a eu du blanc, du noir et du gris. Mais il s’accroche à l’amour de ses parents «super», veut être un exemple pour son petit frère de neuf ans, marche dans les pas de sa grande sœur qui a 26 ans. Lowen a envie de réussir. Il est sur la bonne voie. Son visage s’illumine soudain, il baisse la tête, montre les dents, affiche un air satisfait. «Je vais vous dire quelque chose, vous n’allez peut-être pas me croire. Parmi les Grade 9 – je suis le seul à avoir réussi en bilogie, j’ai eu 64 sur 100…» Est-ce que le courant passe avec ses camarades du «mainstream» ? «Waiii. Nou tou kamarad, nou mari korek, pena distinksion ant bann zélev extended ek leres.» Poursuivra-t-il les études après la Grade 9 ? «Wi, mo pou trasé parski tout travay demann o mwin Form 5 asterla.» Pour atteindre ses objectifs, Lowen met les bouchées doubles. «Mo pé pran lesson français mo pé amélioré Miss Jena dire…»

Si la phobie de Lowen pour les verbes s’estompe peu à peu, que le présent est parfois houleux académiquement, que le passé n’a pas été toujours simple, le futur, l’ado compte bien le conjuguer au plus que parfait.