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Narendranath Gopee: «Nous alerterons le Bureau international du travail à propos de la BoM»
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Narendranath Gopee: «Nous alerterons le Bureau international du travail à propos de la BoM»
L’ancien président de l’union des employés de la Banque centrale devra faire face à un comité disciplinaire. Pourquoi ?
C’est la question que je me pose moi aussi. C’est un monde à l’envers à la Banque de Maurice (BoM) pour les relations industrielles. La direction a démantelé le syndicat qui existait depuis 1976. Il y a tant à dire sur ce qui se passe à la BoM. Mais, pour faire court, je dirais qu’elle a récemment et unilatéralement décidé d’entreprendre une révision des conditions de service des employés. Cela implique que toutes les conditions seront revues et, pour qu’elles soient applicables, les employés devront remplir un option form pour accepter ou pas les nouvelles conditions. Conformément à l’article 62 A (4) de l’Employment Relations Act, là où il n’existe pas de syndicat, l’employeur peut formuler une requête aux employés pour réagir par écrit… Ici il faut faire bien attention à la connotation légale de l’exigence «… où il n’y a pas de syndicat». Selon la loi, il faut au moins 30 employés pour constituer un syndicat. Donc, sans ce minimum requis par la loi, il n’y a pas de syndicat. Cependant, à la BoM, il existe toujours la Bank of Mauritius Employees’ Union que le Gouverneur de la banque et ses adjoints tentent de mettre de côté. De ce fait, la décision de la BoM d’imposer un option form est, selon nous, illégale.
Que reproche-t-on à Chidanand Rughoobar ?
La façon de faire de la Banque par rapport aux allégations frivoles à l’encontre de l’ancien président du syndicat est condamnable. Si cela n’est pas de la persécution ou de la répression, c’est quoi alors ? Chidanand Rughoobar, l’ancien président de la Bank of Mauritius Employees Union (BOMEU) devra faire face à un comité disciplinaire pour répondre à six charges, fabriquées de toutes pièces. Principalement, la BoM lui reproche de ne pas avoir signé le dit option form. La banque lui a d’abord réclamé une réponse écrite dans un délai de dix jours pour éviter un comité disciplinaire, dans une lettre datant du 29 mai 2023 – livrée au domicile de Chidanand Rughoobar par un huissier ! Je dois mentionner qu’à cette date, ce dernier avait pris congé pour prendre part à des examens en ligne et son congé avait été approuvé. Le 7 juin 2023, donc dans le délai prescrit, M. Rughoobar a répondu au secrétaire-adjoint de la banque, M. Kowlessur. Mais il s’avère que la BoM avait déjà décidé de procéder au comité disciplinaire car aucune raison n’a été donnée pour informer l’ancien président du syndicat si sa réponse était satisfaisante ou pas. À noter que le présent premier gouverneur adjoint avait, en 2012, poursuivi la BoM en tant qu’ancien employé pour des injustices causées par le Hay Group Report, qu’on peut lire sur le site de la banque.
«La façon de faire de la banque par rapport aux allégations frivoles à l’encontre de l’ancien président du syndicat est condamnable. Si cela n’est pas de la persécution ou de la répression, c’est quoi alors ? »
Quelles sont les conséquences pour un employé qui ne signe pas l’«option form» ?
Aucune ! Le nom dit tout. La loi n’exige ni n’impose de signer un formulaire d’option. Si un employé ne le signe pas, implicitement il rejette ce qu’on lui propose. Les changements dans un contrat de travail prennent effet avec le consentement et de l’employeur et de l’employé(e). Sinon c’est du pur esclavagisme ou même de la dictature moderne. La loi ne prévoit aucune sanction pour ceux qui refusent de signer un option form. Cependant, l’employé continue à travailler sous son ancien contrat et, dans le cas de Chidanand Rughoobar, c’est un contrat à durée indéterminée. Alors s’il n’y a pas de sanction, il n’y a pas d’indiscipline, donc aucune raison d’enclencher un tel comité. C’est une perte de temps et surtout d’argent pour la BoM. C’est aussi une forme de violence silencieuse à l’égard de l’ancien président. Je pense que la Banque a mieux à faire que de dépenser l’argent public pour des raisons futiles. À noter qu’une seule sitting de ce genre de comité peut coûter à la banque environ Rs 300 000…
Ce n’est pas la première fois que M. Rughoobar fait l’objet de tracasseries de la BoM. D’ailleurs, son syndicat n’y est plus reconnu. Est-ce une situation normale ?
Tout cela a commencé au moment où la BOMEU a fait une demande auprès de l’Employment Relations Tribunal (ERT) pour mettre en place un Joint Negotiating Committee – cela, après avoir fait de multiples demandes formelles, restées non-abouties auprès de l’employeur. C’est là où tout a commencé à dégénérer. La banque reprochait à l’ancien président d’être la source des fuites d’information dans le rapport annuel 2021 lors d’une des séances à la ERT – alors que le rapport avait été déjà rendu public. Chidanand Rughoobar a été blanchi après ! Le pire s’est imposé après que l’ERT a tranché et rayé l’affaire, et que la BOMEU n’a pas été reconnue par la banque.
Comment normaliser la situation ?
Le syndicat a fait une nouvelle demande de reconnaissance à la Banque à la suite du verdict de l’ERT en mars 2022, mais à ce jour, aucune suite. La BoM fait toujours la sourde oreille. Je fais un appel aux membres du board de la BoM de revoir cette situation. Le dialogue est très important entre le management et le syndicat dans une institution, et surtout dans une telle que la Banque centrale.
Que pense faire votre fédération ?
On portera l’affaire devant le ministre du Travail et le Bureau international du travail. La décision du gouverneur de la Banque va à l’encontre de la Convention 87 du BIT que Maurice a ratifiée.
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