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Mare-Chicose: la vie à proximité des collines de déchets
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Mare-Chicose: la vie à proximité des collines de déchets
Sur la route traversant Cluny en direction d’Eau-Bleue, dans la région de Mare-Chicose, l’âme est envahie par un sentiment bizarre de quiétude et de tristesse. Des maisons abandonnées, la boutique du coin qui a fermé ses portes. Entre-temps, le centre d’enfouissement a dépassé de loin son niveau de saturation, alors que des travaux se poursuivent pour créer davantage d’espace afin de contenir plus de déchets. Le bruit constant des gros camions qui passent déposer leurs ordures au centre d’enfouissement, une bonne partie des déchets se déversant le long de la route et une odeur nauséabonde suffisante pour provoquer des nausées... Autrefois magnifique, ce petit village, devenu fantôme, n’abrite que de rares habitants pas encore été relogés ailleurs et ceux qui viennent travailler dans leur plantation.
Veerbhadrasen Auree, l’enseignant devenu planteur
Sur son vaste terrain, de petits bassins créés et bien séparés les uns des autres par des rochers, avec un petit canal d’eau qui les traverse. Actuellement, il est couvert de terre sèche. À l’autre extrémité du canal, des bananiers et des légumes tels que des concombres. Cependant, après de fortes pluies, la partie de terre sèche se transforme en cressonnière, raconte Veerbhadrasen Auree.
Originaire d’Eau-Bleue, Veerbhadrasen Auree a déménagé à Cluny, en raison du manque de facilités de base, telles que le transport public. «Je devais marcher longtemps jusqu’au village de Cluny pour aller à l’école quand j’étais enfant, car les bus y ont toujours été rares. Après notre déménagement là-bas, l’accessibilité aux infrastructures s’est améliorée. Au fil du temps, en raison des difficultés auxquelles les gens étaient confrontés pour vivre ici avec l’odeur nauséabonde, le bruit constant et la pollution environnementale dus à la décharge de déchets, la plupart des habitants ont quitté les lieux pour être relogés ailleurs.»
Aujourd’hui âgé de 64 ans, Veerbhadrasen Auree est retraité, après une longue carrière en tant qu’enseignant de marathi dans différentes écoles. Marié, il est père de trois enfants, un fils et deux filles, dont l’une a suivi ses traces en devenant enseignante. Fait intéressant, n’ayant pas quelque chose de constructif à faire pendant ses loisirs après la retraite, il a décidé de se consacrer presque à plein temps à la plantation. «Le terrain appartient à l’une de mes cousines. Étant donné qu’il s’agit d’une mare sur laquelle, pendant la saison des pluies, rien d’autre ne peut être cultivé, j’ai pensé pourquoi ne pas en faire une cressonnière. J’ai donc décidé de louer le terrain à bail de ma cousine et bientôt, je l’achèterai», explique-t-il.
La première étape a été d’organiser, d’investir dans le matériel nécessaire et de préparer le terrain pour la plantation. Veerbhadrasen Auree a donc décidé de se tourner vers son bon ami Aneerood Boocha, âgé de 69 ans et vivant à proximité, qui s’est lui aussi consacré à la plantation après sa retraite. «Étant donné que je possède les connaissances et les compétences nécessaires, je me suis engagé. Nous avons créé les bassins, mis en place des points d’entrée pour que l’eau se répartisse dans tous les bassins... Tous les deux, nous avons labouré la terre nous-mêmes pour équilibrer le niveau partout et assurer une distribution égale de l’eau. Ensuite, nous nous sommes concentrés sur la plantation.»
Ainsi, après la pluie, la récolte est abondante, affirment les deux hommes. Pour donner un sens à leur passe-temps, ils ont choisi de vendre le cresson récolté au marché de Rose-Belle, à un prix abordable. «Nous arrivons ici à 1 heure du matin, avec notre lampe rechargeable que nous accrochons à un petit poteau. Ensuite, nous récoltons le cresson. Nu gagn 2 000, 2500 ou mem 3 000 paké bred. À 7 h 30 du matin, nous arrivons sur le marché et les vendons à un prix abordable, de sorte que nous avons un maximum de clients et les écoulons rapidement, puis nous rentrons chez nous pour nous reposer. C’est un passe-temps amusant pour nous qui ajoute également de la valeur à notre vie et est constructif», confie Veerbhadrasen Auree.
Par ailleurs, face à la cherté de la vie, il est primordial de protéger le lieu contre tout vol potentiel de produits alimentaires. «Plusieurs fois, des gens sont entrés dans le champ pour voler tout le cresson, ainsi que d’autres légumes comme les concombres et les giraumons. Nous avons dû investir dans des mesures de sécurité.» Pour l’ancien enseignant, se connecter à la nature peut être thérapeutique pour les jeunes, bien qu’il constate que beaucoup ne sont pas intéressés par cette activité. Néanmoins, à 64 ans, il n’arrête jamais d’apprendre ou de transmettre des leçons de vie, en particulier à Ousha Lobin, 31 ans, qui s’intéresse à cette activité et s’y consacre aussi avec Veerbhadrasen Auree.
Chandani, l’âme du village fantôme
Juste derrière l’arrêt de bus d’Eau-Bleue, se situe la modeste maison de Chandani, âgée d’une soixantaine d’années. Vêtue de ses bottes, d’une robe et d’un pull, elle nous accueille en s’occupant de ses plantes. Chandani est parmi les quelques habitants qui vivent encore dans la localité, avec son frère Ishwaduth, l’épouse de ce dernier et ses enfants. Son quotidien consiste à cuisiner, nettoyer la cour, s’occuper des tâches ménagères et prendre soin de ses plantes.
Dans la cour, on aperçoit des boîtes en métal et des bidons vides. De l’autre côté de la route, des ordures tombées des camions roulant vers le centre d’enfouissement de Mare-Chicose dégagent une forte odeur nauséabonde. Pourquoi Chandani continue-t-elle d’habiter ce village fantôme ? «J’attends que ma maison soit prête, puis je déménagerai.» Où ? «À Rose-Belle, tout comme d’autres familles qui ont quitté la région en raison de la pollution provenant de la décharge.» Entre les déplacements par autobus tôt le matin deux fois par semaine pour se rendre au supermarché afin d’acheter des produits alimentaires, le bruit et l’odeur nauséabonde des ordures autour, Chandani garde l’espoir d’une vie meilleure.
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