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Jacques Achille: un journaliste dans l’âme pour «remettre le VIH/Sida au coeur de l’actualité»
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Jacques Achille: un journaliste dans l’âme pour «remettre le VIH/Sida au coeur de l’actualité»
N’ayant manifestement pu se débarrasser du virus de la presse, l’ancien rédacteur en chef du défunt «Week-End Scope» a accepté un nouveau challenge dans le social, en devenant le responsable de com chez PILS. Jacques Achille, qui sera un collaborateur des pages sociales de «l’express», regrette que nos jeunes ne sont plus vraiment conscients des réalités du VIH/Sida alors que la situation demeure alarmante à bien des égards. Entretien.
Jacques Achille, après de longues années comme journaliste, puis rédacteur en chef de «Week-End Scope», vous êtes passé dans une agence de com (Circus) et maintenant vous êtes responsable de communications stratégiques chez Prévention information et Lutte contre le Sida (PILS). Quelles sont vos nouvelles responsabilités ?
Je rejoins une action déjà en marche qui engage PILS et plusieurs de ses partenaires, des organisation non gouvernementales (ONG) et, des instances gouvernementales, entre autres. Cette action, à laquelle je vois s’atteler, avec conviction et foi, les personnes qui sont en place, vise la préservation de la vie et l’amélioration de la qualité de vie. La mouvance présente vient rappeler à tout un chacun que le VIH/Sida reste d’actualité et qu’il nous concerne tous indistinctement. Dans ce contexte, la prévention par la dissémination d’information, le plaidoyer, la lutte contre la stigmatisation et la discrimination, la communication stratégique pour contribuer au changement restent prioritaires. Des messages qu’il faudra, comme dans le passé, pouvoir et savoir rendre audibles et visibles afin de contribuer au changement espéré.
On a tendance à mélanger les genres. Le journalisme est fondamentalement différent de la communication, n’est-ce-pas ?
La différence est, effectivement, fondamentale. Les canaux par lesquels les informations sont diffusées sont similaires et différents, mais le journalisme et la communication sont des genres qui ne peuvent pas et ne doivent pas être mélangés ou confondus. Puisque les missions sont clairement différentes. Tout journaliste qui rejoint le monde de la communication entre dans un nouveau domaine et il en est de même pour les communicants qui font le choix de passer de l’autre côté. Cette transition peut souvent être complexe parce qu’il s’agit, dans une large mesure, de se réinventer en fonction des objectifs sur lesquels la personne fait le choix de s’aligner. Selon la ligne éditoriale de sa rédaction, le journaliste travaille pour informer son audience sur les sujets qui font l’actualité de manière neutre. Dans le monde de la communication, il s’agit de faire entendre un message précis pour mettre en lumière et faire évoluer la profitabilité, une marque, un produit, un projet, une manière de penser ou autre.
Quels sont les réflexes journalistiques que vous avez dû mettre de côté pour devenir un communicant au sein du secteur privé mauricien ? La transition a-telle été facile pour le vieux routier de la presse que vous avez été ?
Après 29 ans dans la presse, la transition, puisque imposée, a été complexe. Il n’y a pas eu que les réflexes que j’ai dû mettre de côté. C’est avant tout une manière d’être, de faire, de penser, et parvenir à développer et accepter ma nouvelle identité. Comme vous êtes bien placé pour le savoir, le journalisme engage celui qui le pratique dans presque tous les aspects de sa vie et il ne décroche jamais, qu’il le veuille ou pas. Il recherche le newsworthiness dans tout et souvent les conversations sont liées au métier puisqu’en société certaines personnes nous voient presque exclusivement comme des journalistes. Précédemment, j’étais dans les premières lignes de certains des grands événements qui ont marqué le pays. Il m’a fallu apprendre à prendre mes distances de l’actualité, ne plus réagir au quart de tour en apprenant une nouvelle et à garder mon appareil photos pour d’autres types de photos qui me plaisent beaucoup. Évidemment il y a des réflexes, une rigueur, des principes, une manière d’analyser, inculqués par le journalisme, desquels je ne me sépare pas et qui restent mes repères dans ce que j’ai à faire.
Cette fois-ci vous passez de communicant pour les entreprises du privé (où la notion de profitabilité est centrale) pour une ONG comme PILS qui œuvre dans le social. Un autre changement drastique pour vous...
Ce changement précis est voulu et est une suite logique dans mon choix de carrière. J’ai découvert PILS à sa naissance en 1996, dans un contexte où certaines thématiques comme le VIH/Sida, la toxicomanie, les droits humains, la question des genres, etc. m’interpellaient fortement. Ce sont des domaines que j’avais appris à connaître directement sur le terrain lors des reportages et des interviews que je réalisais. À un moment, j’ai senti le besoin de pouvoir aborder ces thèmes, surtout le VIH, avec d’autres outils, et j’ai eu des formations approfondies à Maurice et en Afrique du Sud sur ce sujet. Ce qui m’a plus tard permis de coanimer des sessions de formation pour des journalistes de la région de l’océan Indien et de la région subsaharienne, où j’ai aussi collaboré avec les médias et les parlementaires de la région au sein du SADC Parliamentary Forum et de l’Editors Forum, entre autres instances. Plus récemment, j’ai eu l’opportunité de renforcer ma collaboration avec la Aids and Rights Alliance for Southern Africa (ARASA) où nous avons aidé à concevoir et tester un nouveau tool kit pour que les journalistes de la région puissent traiter des sujets liés à la santé reproductive et les droits, de même que l’autonomie et l’intégrité corporelle de manière positive. Entretemps, j’ai eu un cheminement parallèle avec PILS et plusieurs autres ONG en restant dans mon rôle de journaliste et dans les limites que me permettait le code d’éthique.
Qu’est-ce qui vous a poussé dans le social ? N’est-ce pas pour vous une façon de renouer avec le journalisme, le terrain, les acteurs de la vie sociale ?
Avant d’entamer mes études, j’avais voulu être journaliste sans trop en comprendre les implications. Je suis resté dans ce métier par conviction. Puisque je reste convaincu que les journalistes sont des acteurs du changement qui ont la capacité d’impacter positivement sur le développement du pays et la qualité de vie de tout un chacun. M’inspirant des énergies qui émanent des équipes qui m’entourent désormais, j’espère avoir une contribution à ce même niveau. Et cela nécessite une compréhension du terrain puisque l’humain reste au centre de tout. C’est ce qui explique effectivement mon choix. Cependant, pour faire la transition de la presse au social, je ne pouvais être allé à meilleure école que Circus ! Dans cet univers si particulier, intensément humain et créatif, j’ai appris à être stratégique et à penser autrement.
Quelles seront vos priorités au sein de PILS ?
Travailler en équipe en interne et avec les partenaires engagés pour remettre le VIH/ Sida au cœur de l’actualité et les conversations à différents niveaux. C’est l’une des priorités ressenties alors que les actions déjà en place doivent se poursuivre au niveau de la sensibilisation, de l’encadrement, de l’accompagnement, entre autres. À Maurice comme dans plusieurs parties du monde, après le gros tapage suscité par le VIH dans les années 80 jusque dans les années 2000, il s’en est suivi un silence parce qu’il a fallu concentrer les actions vers des populations plus exposées, dites populations-clés. En l’absence de campagnes nationales soutenues, les autres segments de la population ne se sont plus sentis interpellés et certains, dont les jeunes, ne sont plus au courant des réalités liées au VIH alors que nous restons tous directement concernés.
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