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«Un Mauricien pourrait être élu Grand Maître…la nationalité n’a rien à y faire»
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«Un Mauricien pourrait être élu Grand Maître…la nationalité n’a rien à y faire»
Obédience qui s’est greffée sur l’histoire de Maurice depuis 1778, le Grand Orient de France (GODF) a entériné ses liens étroits, en juillet 2023, par le biais d’une étape mauricienne lors de son tour des villes de France pour célébrer les 250 années de son appellation. Mais où en est-elle en 2023 ? Jacques Helary, Grand Maître Adjoint (Maçonnisme et Juridictions) et Amaresh Ramlugan, (premier Mauricien élu au Conseil de l’Ordre) font la lumière sur quelques pans de cette nouvelle ère.
Qu’exprime le GODF en faisant ce bouquet final à Maurice ?
Jacques Helary (J. H.) : Lorsqu’il s’est engagé sur la commémoration des 250 ans de l’appellation du GODF, Georges Sérignac, le Très Respectable Grand Maître, a souhaité que le GODF communique, non pas pour détruire quoique ce soit et surtout pas le secret de notre ordre, mais simplement sur qui nous sommes réellement. D’abord, c’est dans une œuvre, un engagement de communication et d’expression de la réalité de ce qu’est réellement la franc-maçonnerie et en particulier le GODF. Finir à Maurice, et non pas par un événement parisianiste, était important. C’est comme en francmaçonnerie ; tout est mêlé, l’intellect, le sentiment, le besoin du sacré. L’île Maurice est une terre de force de la franc-maçonnerie historique et de vivacité sereine, calme, mais active.
C’est la première fois aussi qu’une équipe s’engage autour de notre ère sur une action forte et le fait est que ce n’est pas comme dans les autres régions du monde où se sont beaucoup des expatriés, professionnels ou autres. C’est la première fois qu’un représentant mauricien de la franc-maçonnerie entre et agit au Conseil de l’Ordre. C’est une reconnaissance aussi de ce qu’il a fait dans le passé et aujourd’hui.
Quelle est la contribution du GODF à Maurice ?
Amaresh Ramlugan (A. R.) : Le GODF, à travers sa présence depuis 1778, avec la première loge La Triple Espérance, a continué à façonner l’île Maurice. Et beaucoup ne le savent pas. Il y a eu les grands tribuns comme sir Seewoosagur Ramgoolam, le Premier ministre et le premier gouverneur général de Maurice ; Louis Rivaltz Quenette, un clerc de l’Assemblée et un érudit francmaçon, et Louis Léchelle, le premier maire de Port-Louis qui a été vénérable maître à huit reprises, entre autres. À travers la franc-maçonnerie du GODF, l’île Maurice est devenue ce qu’elle est maintenant. Il y a souvent eu une mauvaise perception dans le passé. Cette manifestation publique nous permet d’expliquer ce qu’est la francmaçonnerie, et de pouvoir la dé-caricaturer. Et aussi de porter, hors de l’obédience et des loges, les valeurs de la franc-maçonnerie à Maurice.
Les familles de maçons qui sont là depuis des siècles, qu’ont-elles fait ?
J. H. : L’accès à votre démocratie, à votre statut entièrement indépendant a été autorisé par les maçons de toutes les familles. Certains maçons sont peut-être restés ancrés dans le besoin de participer activement, durablement, dans les opérations de gestion. Le GODF n’a pas besoin de gens au pouvoir. Ce n’est pas notre objet ; ce n’est pas notre optique ; ce n’est pas notre regard. Mais il faut aussi reconnaître que dans ce territoire, c’est bien la francmaçonnerie qui a aidé, comme dans d’autres plus tard, à façonner cette réussite. Cela aurait pu être une révolution, mais elle a été une révolution sereine, et beaucoup de francs-maçons étaient impliqués.
Y a-t-il des sanctions au GODF?
J. H. : La loge peut prendre des sanctions pour un phénomène grave d’attitude dans l’atelier. Après, quand on est maître, en tant qu’élu de la loge, c’est-à-dire cadre du bureau de la loge, il peut y avoir des sanctions qui sont prises soit par le congrès régional soit par la justice interne du GODF. Et là, ça peut être un avertissement ou il peut y avoir un non-lieu. Il y a une enquête poussée qui aboutit à des défauts de comportements dans l’atelier comme des défauts de comportement dans la société civile, je ne parle même pas de choses historiquement pénales.
Aujourd’hui, nous sommes un reflet de la société. Notre composition, c’est celle de la société actuelle. Il y a des actes graves qui peuvent être commis, notamment par des violences faites aux femmes et aux enfants. Chez nous, il y a une rigueur absolue. Évidemment, ce n’est pas nous qui menons l’enquête. Mais si la justice de la République dit que cette personne est condamnable et elle est condamnée, en dernier recours, nous prendrons des mesures d’exclusion. Et puis sur l’appartenance à des associations, des partis prônant la ségrégation ou la différence raciale, entre autres. Notre chambre judiciaire interne y est très vigilante.
Où en est le GODF sur la mixité ?
J. H. : Depuis 2010, c’est la même démarche pour les hommes et pour les femmes. Le Droit Humain est une obédience qui est née mixte. En gros, toutes les autres obédiences ont été créées sexuées. On nous reproche d’avoir été longtemps, et cela fait aussi partie des caricatures, masculine. Mais depuis des années, les choses couvaient. Le Convent de 2010 a formalisé le besoin et l’intérêt humain de passer à la mixité. Nous sommes la seule obédience masculine où les loges peuvent initier les femmes. On ne peut pas parler d’obédience mixte parce que c’est tout nouveau.
La proportion aujourd’hui, en 13 ans, c’est que sur 54 000 membres, 6 000 à 7 000 sont des sœurs. Et elles passent par les mêmes fourches caudines, je vais dire, contrairement à d’autres structures auxquelles il arrive à certains de nous associer, comme les sectes. Il est plutôt difficile d’y rentrer et plus facile d’en sortir.
Le GODF à l’ère digitale pour un Grand Maître adjoint qui est informaticien…
J. H. : Le problème a été à la réouverture après le confinement. J’étais au Conseil de l’Ordre, il y a trois ans, et ça a été délicat parce que nous avons des travaux en tenue qui sont très ritualisés et cela se passe dans une ambiance qui doit être physique. Quand certains ont voulu que les tenues, c’est-à-dire les réunions officielles des ateliers, se passent en visio, cela n’a pas été autorisé par le Conseil de l’Ordre du moment, parce qu’il y avait aussi la protection de l’image et du secret d’appartenance. Nous ne savons pas, quand on se réunit sur Zoom ou autres, où finissent les données, notamment les données d’image. Par contre, l’évolution de la technologie nous permet de faire des réunions. J’avais proposé à ma loge qu’on appelle cela des «venues», ce qui était paradoxal parce qu’on ne venait pas. Quand nous avons pu enfin nous réunir,
Un Mauricien pourrait-il être un Grand Maître du GODF?
J. H. : Un conseiller de l’Ordre, issu de nos 17 régions, peut se présenter. La nationalité n’a rien à y faire. C’est un système démocratique où chacun est élu. La région élit son délégué, son ou ses conseillers de l’Ordre. Après, c’est le Conseil de l’Ordre qui décide en son sein qui est élu.
* Suite de l’entretien de Jacques Helary paru il y a un mois.
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