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[En fil rouge] Ordination épiscopale de Mgr Jean-Michaël Durhône: un passage de témoin dans la continuité…
Par
- Marie-Annick Savripène
- Dev Ramkhelawon
- Sumeet Mudhoo
- Stewelderson Casimir
- Marie Claire Lassémillante
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[En fil rouge] Ordination épiscopale de Mgr Jean-Michaël Durhône: un passage de témoin dans la continuité…
Troisième Mauricien en 55 ans d’Indépendance, après Mgr Jean Margéot en 1969 et Mgr Maurice Piat en 1993, Mgr Jean-Michaël Durhône sera ordonné douzième évêque de Port-Louis cet après-midi au sanctuaire de Marie Reine de la Paix, tout comme ses prédécesseurs. Cet évènement majeur pour le diocèse de Port-Louis et pour le pays devrait réunir la foule des grands jours après trois mois d’une transition, selon un rituel bien huilé propre à l’Église catholique.
Le jour J est arrivé. L’île Maurice accueille aujourd’hui le nouvel évêque du diocèse de Port-Louis, qui succède à deux géants du 20e siècle, qui auront marqué de leur empreinte la vie de l’Église et du pays. Au moment de sa nomination à l’épiscopat, on découvre chez Mgr Jean-Michaël Durhône un profil assez similaire à celui de Mgr Piat : même âge (50 ans), peu connus en dehors du giron de l’Église, ex-enseignants et formateurs, responsables des vocations et proches collaborateurs de leur prédécesseur.
Cependant, les similitudes s’arrêtent là... Chaque évêque aura son propre cheminement et ses charismes propres et un épiscopat se construit au fil des années en marchant dans les pas de son prédécesseur mais aussi en dessinant son propre parcours. Demain, Mgr Maurice Piat, évêque émérite (à la retraite), n’aura plus voix au chapitre dans les affaires courantes. À quelqu’un qui lui demandait quels étaient ses projets, il répondait, il y a quelques jours, «avoir fait le choix de ne pas choisir». Il aura attendu presque huit ans depuis qu’il a soumis sa démission au pape François, comme tout évêque à 75 ans, en continuant à conduire son troupeau comme un bon Berger et laissant au nouvel évêque un diocèse animé par un clergé uni et des laïcs dynamiques...
Par ailleurs, Mgr Durhône prend demain la charge du diocèse et annoncera sans doute les noms de ses proches collaborateurs dont les postes ont été dissous à sa nomination. Pendant ce temps, le «collège de consulteurs» l’a accompagné dans cette transition, vécue comme un marathon, où sortant de sa discrétion légendaire, il a enchaîné les rencontres avec ceux qu’il est appelé à côtoyer et à servir, conscient du riche bilan que lui laisse son prédecésseur.
Mais il évoque déjà les grands défis qui l’attendent – vocations, éducation, pauvreté, familles éclatées, violence, drogue… une jeunesse en désarroi dans un pays multiculturel et multireligieux et un contexte politique et social en turbulence. Dès sa nomination, Mgr Durhône a exprimé son désir d’être l’évêque de «tous les Mauriciens», insistant sur ses origines multiraciales et son désir d’unité. Il sait qu’il aura le soutien inconditionnel de ses confrères prêtres, des religieux et laïcs engagés au service de l’Église, si l’on tient compte des applaudissements chaleureux qui ont accompagné sa nomination.
Choix d’un évêque
Justement, pourquoi lui et pas quelqu’un de plus charismatique ? Réponse : on ne pose pas sa candidature, on ne fait pas campagne pour être évêque, nous répond-on. Ce n’est pas une compétition, et encore moins une promotion, mais un appel à un nouveau ministère plus exigeant, avec plus de responsabilités mais en percevant le même salaire que celui du prêtre.
L’évêque démissionnaire indique au nonce apostolique les noms de prêtres qu’ils jugent aptes à ce ministère. Le nonce s’informe sur chacun d’eux en s’entretenant avec les personnes les plus à même de les connaître – prêtres, religieux ou religieuses et «laïcs reconnus pour leur sagesse». À chacun, il est demandé explicitement : «Tel prêtre vous paraît-il apte à être évêque ?» Le nonce consulte aussi le président ou des membres de la Conférence épiscopale. Ce n’est ni un sondage, ni un portrait-robot de l’évêque idéal. Des trois noms proposés, il donne son avis au pape à qui appartient la nomination. L’évêque nommé est libre d’accepter ou de refuser.
Transition administrative
Le cardinal Piat, secondé par le collège des consulteurs, a administré le diocèse jusqu’aujourd’hui quand Mgr Durhône en prendra la charge avec pleins pouvoirs au cours de l’ordination épiscopale. Ce collège de six à 12 prêtres, nommés pour cinq ans, est composé des pères Jean-Maurice Labour, vicaire général, Gérard Sullivan, vicaire général, Hervé G. de St Pern, Gérard Mongelard, Pierre Piat, Michel Moura, Jean-Claude Véder et Georgy Kenny.
En cas de vacance du siège épiscopal, ce collège nomme un administrateur diocésain pour diriger le diocèse jusqu’à l’installation d’un nouvel évêque. De plus, l’évêque est tenu, pour la validité de certains actes administratifs, comme la vente de certains biens immobiliers, de prendre l’avis du collège des consulteurs.
Dimension régionale
Seul un évêque, accompagné de deux autres, peut ordonner un évêque. Mgr Durhône le sera donc par le cardinal Maurice E. Piat, évêque émérite de Port-Louis, assisté de Mgr Alain Harel, président de la Conférence épiscopale de l’océan Indien (CEDOI) et évêque de Port-Victoria, Seychelles et Mgr Tomasz Grysa, Nonce apostolique pour la région. Cette ordination réunit donc l’Église régionale et sera suivie dans la semaine par une rencontre de la CEDOI.
Les autres évêques ayant fait le déplacement sont Mgr Gilbert Aubry (évêque émérite de Saint-Denis de la Réunion), Mgr Pascal Chane Teng (évêque nommé de Saint-Denis de la Réunion), Mgr Fabien Raharilamboniaina (président de la Conférence épiscopale malgache et évêque de Morondava), Mgr Denis Wiehe, évêque émérite de Port-Victoria, Seychelles, Mgr Robert Le Gall, archevêque émérite de Toulouse et le père Luc René (administrateur du vicariat apostolique de Rodrigues).
Témoignages
<p style="text-align:center"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/temoignages_1.jpg" width="620" /></p>
<p><strong>Père Jacques-Henri David, Curé de St-Michel, Grand-Gaube: «Passons à l’autre rive» Marc, 4.35.</strong></p>
<p><em>«L’arrivée de Mgr Jean-Michaël Durhône invite à un nouveau passage «à l’autre rive». J’ai été ordonné en 1988 par Mgr Jean Margéot qui nous transmettait son souci d’une Église incarnée dans la société. L’arrivée de Mgr Maurice E. Piat sera une invitation à passer vers l’autre bord dans la continuité pour accompagner le peuple mauricien. Je suis l’un de ces prêtres qu’il a accompagnés au service des vocations. Nommé évêque, il a maintenu cette relation complice avec nous pour approfondir la foi des adultes par la catéchèse et la compassion pour les pauvres, les exclus et les blessés de la société. La traversée continue avec Mgr Durhône, qui guidera certainement l’Église vers d’autres rives tout en maintenant le cap de ses prédécesseurs. Je l’ai connu jeune prêtre plein de sagesse à Port-Louis et je souhaite que comme évêque, il dévoile cette sagesse pour inspirer d’autres sages dont notre pays a besoin.»</em></p>
<p><strong>Père Gérard Mongelard, Curé de Sainte-Hélène: «The right person in the right place»</strong></p>
<p><em>«J’ai été le premier prêtre ordonné par le cardinal Maurice E. Piat le 1er août 1993, quelques mois après son ordination comme évêque. Après 30 ans de cheminement, je voudrais souligner sa capacité à discerner chez ses prêtres des aptitudes propres et à investir dans leur formation pour leur confier des missions selon leur charisme. Il a su mettre «the right person in the right place» et former beaucoup de laïcs à qui il a confié des missions pour épauler les prêtres. Proche de son peuple, il n’a pas hésité à aller à contre-courant pour servir les plus pauvres et les marginalisés. Il laisse à son successeur, qui est certes confronté à de grands défis dans notre monde secoué par des turbulences, tout ce qu’il a semé… dans divers jardins. Ce dernier aura le soutien nécessaire pour en cueillir les fruits tout en les entretenant et en plantant les siens pour assurer la continuité.»</em></p>
<p><strong>Père Yudesch Arnachellum, Vicaire à St-Esprit, Bel-Air:</strong> <strong>«Un vrai berger à l’écoute du peuple mauricien»</strong></p>
<p><em>«J’ai connu le cardinal Piat depuis mon baptême en1999. Mais avant, dans l’appel décisif à la cathédrale, il m’a appelé par mon prénom Yudesch et j’ai répondu «Me voici.» Ensuite, ce «Me voici» a résonné en moi comme l’appel du Seigneur à le suivre dans mes engagements à la paroisse du Saint-Sacrement à Cassis. Mgr Piat, un homme de grande sagesse et d’écoute, a été un père qui m’a fait confiance et m’a encouragé. J’ai beaucoup appris de sa façon de faire résonner la musique de l’Évangile dans ses prises de position, en dénonçant les injustices et en étant proche du peuple mauricien sur les questions de la famille, l’éducation et la drogue. Je rends grâce pour ce vrai Berger qui a su conduire la barque de l’Église à Maurice. Le pape François a bien choisi son successeur. Mgr Durhône est un homme de paix et d’écoute et je crois qu’il sera un bon pasteur pour continuer la mission et mener l’Église à bon port avec douceur et modestie.»</em></p>
<p><strong>Cadress Runghen, diacre marié, et son épouse Ragini: «Motiver les laïcs au service de leurs frères»</strong></p>
<p><em>«Ragini et moi connaissons le cardinal Maurice Piat depuis les années 1980, quand il était responsable de la formation au Thabor. Il nous a accompagnés dans notre cheminement de couple. Nous étions au Groupe A de Cassis dans le combat contre la drogue et j’étais infirmier à la prison. En 1988, le cardinal Margéot lance le projet de réhabilitation des toxicomanes et nous partons en formation à Rome. Ragini deviendra ensuite la coordinatrice du groupe A qui engendrera Lakaz A, maison d’accueil de jour pour tous les marginalisés. En 1993, Mgr Piat continuera à soutenir ce combat et ouvrira ensuite les portes de l’Évêché aux parents d’enfants tombés dans l’enfer de la toxicomanie ; ils les écoutera, priera et pleurera avec eux. Il sera présent aux côtés des prisonniers, surtout pour les fêtes – à Melrose à Noël et à la prison des femmes à Pâques. Par ailleurs, il m’a appelé à devenir diacre marié après un long cheminement et l’accord de Ragini. Le cardinal Piat a eu cette intuition de motiver des laïcs au service de leurs frères. Mgr Durhône suivra certainement dans ses pas car, jeune prêtre à Port-Louis dans les années 2000, il avait regroupé des travailleurs sociaux par rapport à la drogue. Les prisonniers attendent déjà sa visite. Je suis certain que la relève est assurée…»</em></p>
<p><strong>Marjorie Carpen, du service finances du Diocèse: «Un bilan financier sain à son successeur»</strong></p>
<p><em>«J’avais 26 ans quand j’ai rejoint en 1991 le département Finances de l’évêché. J’ai eu la chance de côtoyer feu le cardinal Jean Margéot alors que le cardinal Maurice E. Piat était évêque coadjuteur. J’ai donc débuté, encadrée par deux grands hommes d’Église, et du pays. L’équipe, majoritairement composée de femmes, accomplit sa mission sous la houlette de l’économe diocésain, le père Adrien Wiehe, en soutenant l’évêque et le clergé dans le financement de tous les projets pastoraux. Ce travail fait avec sérieux et intégrité a été mon engagement de chrétienne au service du diocèse. Feu le cardinal Margéot avait légué un diocèse en bonne santé financière au cardinal Piat. Ce dernier, après 32 ans et tant de projets réalisés, confie à son successeur Mgr JeanMichaël Durhône un bilan financier sain. Je lui souhaite de pouvoir réaliser ses projets pastoraux et lui donne l’assurance de notre dévouement au quotidien.»</em></p>
<p><strong>Patricia Adèle-Félicité, secrétaire générale de Caritas: «La pauvreté, un de ses défis à relever»</strong></p>
<p><em>«J’ai eu l’immense grâce d’avoir connu le cardinal Maurice E. Piat en 1989 quand j’ai commencé mon cheminement à Caritas dans ma paroisse à Roche-Bois. Il était alors responsable du Centre de formation au Thabor où j’ai pu suivre presque tous les parcours de formation de développement personnel, social et spirituel qui ont fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Quand j’ai été appelée à contribuer au Synode en l’an 2000 où l’une des orientations phares était l’option préférentielle pour les pauvres, sa confiance et son soutien inconditionnel à la mission de Caritas m’ont marquée. Je n’ai pas eu l’occasion de travailler directement avec Mgr Durhône, mais comme le service de la charité est le troisième pilier de l’Église, je suis certaine que la pauvreté sera un de ses défis à relever. D’ailleurs, deux jours après son ordination, il accueillera une délégation des Caritas de l’océan Indien avec les autres évêques de la CEDOI.»</em></p>
<p><strong>Sœur Maud Adam, Franciscaine Missionnaire de Marie à Madagascar: «Le Seigneur écrit droit dans les lignes courbes»</strong></p>
<p><em>«Mgr Jean-Michaël Durhône, humble, effacé, disponible, est bien son portrait depuis toujours. Je l’ai connu en 1984 à la catéchèse extrascolaire dans la paroisse de la Visitation. Il était au collège St Joseph mais retrouvait humblement les jeunes des petits collèges dans sa soif d’approfondir sa foi. J’étais présente à son ordination pour la retransmission en direct à la MBCTV comme coordinatrice des médias du diocèse. Je l’ai retrouvé en 2016, dans le projet Kleopas et j’ai constaté son savoir-faire et son enthousiasme à le proposer. Ensuite, je lui ai confié un jeune en recherche de vocation aujourd’hui séminariste quand il était responsable des vocations. J’ai travaillé avec les cardinaux Margéot et Piat dans le combat contre la drogue et les médias respectivement. Mgr Durhône est un grand cadeau du Seigneur pour conduire son peuple. Son cheminement l’aidera à reprendre le flambeau de ses prédécesseurs.»</em></p>
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