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Alain Gordon-Gentil : «La Galerie nationale sera aménagée dans l’Hôpital militaire»

19 avril 2011, 09:56

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? Quelles sont les attributions de la cellule Culture et Avenir au Bureau du Premier ministre ?

La mission de Culture et Avenir est de mettre en place de nouveaux projets culturels qui s’inscrivent dans la durée. Mais aussi aider à une expression artistique ouverte.

Il ne faut pas se voiler la face : nous avons, nous autres Mauriciens, un étrange rapport avec nos artistes. Nous les aimons de loin, nous les considérons comme des amuseurs, des dilettantes.

Notre rôle est de soutenir, de donner les moyens à ce travail de se faire dans les meilleures conditions possibles. Une chose décrit parfaitement nos rapports avec les artistes. Regardez le problème des droits d’auteurs.

Même des organismes publics pensent qu’en diffusant l’oeuvre d’un chanteur par exemple, c’est le chanteur qui leur est redevable. Ce n’est qu’un exemple, mais il en dit long.

? En quoi vous différenciez- vous de l’action du ministère des Arts et de la Culture ?

Quand le Premier ministre a voulu qu’une cellule s’occupant de culture tombe sous l’égide de son bureau, je pense que le message ne pouvait être plus clair. Nous mettons en place des projets, nous les coordonnons.

Mais sans l’aide pratique du ministère de la Culture, tous ces projets resteraient à l’état de projets.

Nous sommes en complémentarité parfaite et d’ailleurs, nous avons organisé ensemble plusieurs événements marquant les fêtes de l’Indépendance.

Chacun était à sa place et la mission a été accomplie.

Sans cette énorme logistique du ministère des Arts et de la culture, peu d’événements pourraient avoir lieu.

? La cellule parraine des manifestations, notamment Toi ki toi de Komiko ou Mauritius, mis en scène par Denis- Claude Koenig, qui sera joué en juin. Comment s’effectuent vos choix de parrainage ?

Notre critère d’aide le plus logique est la qualité et l’originalité de ce qui est proposé. Pour la pièce Toi ki Toi, c’est une oeuvre créée spécialement dans le cadre de la célébration de l’Indépendance.

C’est peut-être la première fois que l’Etat, en tant qu’acteur culturel, commandite une pièce de théâtre.

J’ai demandé à Miselaine Duval d’écrire une pièce sur le thème de la liberté et du fait d’être Mauricien.

Pour Mauritius, c’est une pièce qui s’est jouée aux Etats-Unis. Lorsque le directeur de cette troupe est venu me voir pour me dire qu’il montait cette pièce ici, j’ai estimé qu’il fallait l’encourager.

Un jour il faudra bien qu’on se demande pourquoi le théâtre mauricien s’est à ce point évanoui. Je suis certain que la venue de professeurs d’art dramatique de conservatoires internationaux pourrait nous aider à faire redémarrer nos activités théâtrales. Il nous faut plus de troupes. Nous essayons d’aider ceux qui veulent se lancer ou qui existent déjà.

? L’une de vos premières actions a été de coordonner les célébrations de l’Indépendance et de la République. Avez vous le sentiment d’avoir donné un nouveau souffle à ces festivités ?

D’abord une précision.

Culture et Avenir n’a pas coordonné les célébrations des fêtes de l’Indépendance.

Nous avons apporté notre contribution par des actions culturelles, qui se sont greffées sur celles existantes.

A travers des contacts dans les milieux artistiques, et surtout avec l’aide de certaines chancelleries étrangères, notamment l’Australie, l’Inde, l’Afrique du Sud et les Etats-Unis, nous avons voulu offrir aux Mauriciens des événements de qualité.

Toutes ces activités étaient gratuites. Il est important que l’art soit accessible à tous.

Je ne crois pas dans les livres blancs ou les grands séminaires ou encore les projets pharaoniques qui ressemblent plus à des opérations immobilières qu’à des actions culturelles. Une politique culturelle sans artistes ayant les outils pour mener à bien leur création ne rime à rien. L’artiste doit être au centre de toute action.

? La galerie d’art existait déjà de nom mais n’a jamais eu de lieu d’exposition. Est-ce aussi l’une de vos missions : la doter d’une adresse ?

La Galerie nationale sera dans le bâtiment de l’Hôpital militaire, le plus vieux bâtiment officiel du pays, construit à l’époque de la colonie française. C’est un bâtiment d’une grande beauté qui sera aménagé pour accueillir la galerie d’art.

La salle principale permettra de voir, en un seul lieu, un panorama complet de la peinture mauricienne. Pour la première fois, nous pourrons admirer dans une seule salle, les oeuvres de tous les peintres mauriciens depuis Xavier le Juge jusqu’aujourd’hui.

Une autre salle sera consacrée aux expositions temporaires et celles que nous ferons venir de l’étranger : Inde, Afrique du Sud, Réunion, France et Chine.

Cette salle accueillera aussi, bien sûr, les peintres professionnels mauriciens qui demanderont à y exposer.

Toujours dans la Galerie nationale, une troisième salle, d’une soixantaine de places, sera aménagée pour les projections de films/documentaires, ou pour les lancements de livres. Ce sera une salle multifonctions pouvant aussi accueillir des conférences autour de l’univers culturel.

Enfin, une dernière salle très spacieuse sera réservée aux enfants et à leur initiation aux arts plastiques.

Chaque jour, nous recevrons des écoliers invités à découvrir la galerie. Après la visite classique, il y aura des animateurs professionnels qui leur feront découvrir les arts plastiques à travers des ateliers.

Si l’on imagine toucher 50 enfants par jour en leur facilitant l’accès à l’art, on peut commencer à rêver : de ces milliers d’enfants naîtront des vocations…

? A intervalle régulier, on entend parler de l’équipe de cinéastes américains qui viendra tourner un film sur Toussaint Louverture à Maurice. Un tournage que vous avez rendu possible, selon le PM. Quand est ce que l’équipe arrive ? Qu’est-ce que cela rapportera à Maurice ?

D’abord, la première partie de votre question concernant le temps et l’envergure du projet. Le PM en a parlé deux fois dans deux lieux totalement appropriés, le jour de la célébration de l’abolition de l’esclavage au pied du Morne et la deuxième fois, au cours d’une cérémonie au Centre Nelson Mandela.

Et puis, sur le fond, amener une équipe d’Hollywood à venir tourner un fi lm ici est une entreprise quasiment impossible. Nous sommes à 20 000 km des studios d’Hollywood, neuf Américains sur dix ne connaissent même pas l’existence de notre pays.

Voilà d’entrée, les positions de discussions.

Quand vous avez enlevé tous ses obstacles, il reste l’aspect financier des choses. L’industrie du cinéma américain, comme son nom l’indique, répond à la logique industrielle avant de répondre à une quelconque logique artistique. Nous en sommes actuellement au montage financier du film, qui va tourner autour de Rs 1,2 milliard.

Si tout se passe bien, dans six mois nous passerons à la deuxième phase, qui va être les contrats avec le réalisateur, les acteurs et l’équipe du film. Même si on sait dans les grandes lignes ce que va être la distribution du film, rien n’est officiellement fait.

Si tout se passe bien, le tournage débutera vers le mois de mars de l’année prochaine. Il devrait durer environ quatre mois. Le film verra l’embauche de plus d’un millier de personnes, allant des menuisiers pour la construction des décors aux peintres, en passant par les couturiers aux tôliers, maçons. Sans compter les figurants du film qui, selon le script, dépassera le millier de personnes.

Il y a ensuite la notoriété de Maurice. Dans ce domaine il s’agit de faire le breakthrough ! Le jour ou une équipe d’Hollywood démontre aux gens des grands studios que Maurice offre tout ce qu’il faut pour tourner des films, un pas immense aura été franchi. C’est pour cela que nous avons mis en place une logistique très performante pour recevoir l’équipe américaine qui a passé plus de 15 jours chez nous pour les repérages. Ils sont partis enthousiasmés de ce que Maurice a à offrir. Ce film pourra être le vrai tremplin de cette industrie cinématographique mauricienne que nous voulons depuis si longtemps installer.

Propos recueillis par Aline GROËME-HARMON