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Ashok Radhakissoon: «Qu’est-ce qui est injurieux ou pas»

6 janvier 2009, 17:22

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Ashok Radhakissoon, légiste et ancien membre de l’Information and Communication Technology Authority (ICTA), et qui a participé à la rédaction de l’Information and Communication Technologies Act (2001), revient sur l’arrestation du journaliste Nadarajen Pillay.

Tous s’accordent à commenter l’arrestation du journaliste Nadarajen Pillay. Certains disant qu’il s’agit d’un abus de pouvoir et d’autres soutenant que c’est légitime. Quelle est votre lecture de ce cas?

Sur un principe de base, toute communication ou message à travers un appareil téléphonique tombe sous la juridiction de l’Information and Communication Technology Authority (ICTA). Tout comme un message causant préjudice à autrui dans un journal est passible de poursuites au civil, un message téléphonique pouvant nuire à quelqu’un fait partie d’un ensemble d’offenses spéciales prévues par l’Information and Communication Technologies Act (2001). La loi donne à l’ICTA le rôle de limiter les abus à travers les messages transitant par téléphone ou Internet.

Comment définir ces abus?

Ces abus existent à trois degrés: des messages à caractère injurieux, des messages pas à caractère injurieux mais pouvant causer une nuisance et finalement des messages menaçant la sécurité de l’Etat. Si la police pense qu’il y a assez d’éléments pour arrêter quelqu’un sous un de ces chefs d’accusation, il peut le faire. La peine maximum dans le cas où la personne est reconnue coupable peut être une amende de Rs 1 million ou 5 ans de prison. Dans le cas présent, j’imagine que la police a agit dans le deuxième cas de figure, notamment les messages pouvant causer nuisance (Ndlr: Section 46 (f) (ii)), comme dans le cas de la députée Maya Hanoomanjee récemment.)

Dans le cas de Maya Hanoomanjee, il s’agissait d’une personne qui récidivait constamment. Or ici, il s’agit d’un message dont la nature est sujette à plusieurs interprétations, d’où la position de certains de dire qu’il y aurait excès de zèle des autorités…

La dimension «d’injure» ou de «nuisance» est sujette à plusieurs interprétations. Dans un cas récent, un employé de la municipalité de Beau-Bassin/Rose-Hill a perdu son cas en Cour, où il disait être victime d’insultes d’un de ses collègues par téléphone. La Cour a finalement statué que le niveau de langage utilisé était un standard courant dans le quotidien des activités de cette personne. Dans le cas du journaliste de la Mauritius Broadcasting Corporation, il s’agit à la poursuite de venir présenter le dossier. Il n’est pas dit que la Cour s’alignera sur l’interprétation de la police. C’est un débat purement subjectif. Qu’est-ce qui est insolent ou pas, qu’est-ce qui est injurieux ou pas. Mais je tiens aussi à dire que dans tout Etat de droit, il y a un chef d’Etat qui représente le pays. Avant de faire un commentaire sur le poste, et non la personne, il faut faire preuve de respect. Car au regard la position du Premier ministre, la police doit utiliser les provisions prévues par la loi. Comme pour le commun des mortels d’ailleurs. Et c’est à la justice de trancher.

C’est le deuxième cas, tombant sous cette offense, à être médiatisé en moins de six mois. Pensez-vous que cela aidera à conscientiser la population sur l’utilisation des appareils téléphoniques et les responsabiliser, de même que la police qui avait été critiquée lors du cas de Maya Hanoomanjee?

Quand nous avons libéralisé les ondes et que nous avons conduit la communication avec un grand «C», permettant les gens de s’exprimer librement sur les ondes, la loi a aussi été prévue pour agir en cas d’abus. Les équipements sont aujourd’hui partout dans la société mauricienne et il faut qu’ils servent ce à quoi ils étaient prévus et non pas à des abus. Peut-être que de véhiculer ces cas aidera à conscientiser les gens. Et les conséquences peuvent être lourdes. Est-ce que cela aidera à ce que la police réagisse plus promptement? Je pense que c’est comme dans d’autres cas. Il y a des cas où l’enquête est bouclée plus vite. Car tous les éléments sont disponibles et cela facilite le travail de la police. Je ne peux qu’espérer que la police fait preuve de la même diligence pour toute personne. Si elle réagit plus vite dans le cas de certaines personnes par rapport à d’autres, la police sera condamnable.

 

Amrish BUCKTOWARSING