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Ashwin Dookun, ex-Chairman de la CNT : « J’ai accepté le poste de chairman de la Sicom »

30 septembre 2013, 10:05

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Ashwin Dookun, ex-Chairman de la CNT : « J’ai accepté le poste de chairman de la Sicom »

Il y a deux mois et demi, Anil Bachoo l’éjectait de la CNT. Aujourd’hui, Ashwin Dookun s’apprête à rebondir dans l’une des plus riches compagnies du pays, la State Insurance Company of Mauritius. Interview en tous risques.

 

 

C’est parce que vous avez un ministre et la police sur le dos que vous cherchez une bonne assurance- vie ?

 

Qui vous a dit que je cherchais une assurance-vie ?

 

La rumeur vous nomme à la présidence de la puissante Sicom…

 

(Hésitant) Vous savez, les rumeurs… Je n’avais rien demandé, moi.

 

Etes-vous oui ou non le prochain président du conseil d’administration ?

 

Cette décision ne m’appartient pas, mais oui, je ne vais pas vous mentir, on m’a proposé le poste et j’ai accepté.

 

Ce monsieur « On », quel est son vrai nom ?

 

Ai-je vraiment besoin de le préciser ? (Sourire)

 

Vous commencez quand ?

 

J’étais censé débuter mi-juillet, juste après ma mise à pied de la CNT [le 15 juilletdernier, ndlr]. Entre-temps, j’ai eu des ennuis avec l’Adsu. Vous connaissez l’histoire, ils ont trouvé chez moi des graines de gandia. Cette affaire a retardé ma prise de fonction.

 

Retardé ou annulé ?

 

J’espère être en poste dans le courant du mois d’octobre. Je connais des ministres qui ont fait de la prison, ce n’est pas trois graines de gandia qui vont tout remettre en cause.

 

Le jardinage, c’est une passion familiale ?

 

(Rire) Mon grand-père était effectivement planteur, il a fait fortune en cultivant des pommes d’amour et du gingembre. Moi, je n’ai pas la main verte, je ne plante rien, ni légume, ni gandia. Je suis fumeur, mais de cigarettes seulement. Ces graines, je l’ai déjà dit, ne m’appartenaient pas. Il y avait un mariage dans la famille, des invités ont eu la mauvaise idée de ramener ces graines sous mon toit. Qui, je ne sais pas. J’ai accueilli une cinquantaine de personnes venues de France, d’Angleterre et du Sri Lanka. Comme par hasard, l’Adsu débarque. Ils tombent sur les graines et menacent d’embarquer tout le monde à la station de Curepipe. Là, j’ai préféré dire qu’elles m’appartenaient, que quelqu’un me les avait données.

 

Revenons à la Sicom. Vous dites que vous n’étiez pas demandeur. Comment ça s’est passé ?

 

Juste après mon départ de la CNT, on m’a fait trois propositions. Je ne m’y attendais pas, ce n’était pas dans mes plans. « Choisis », voilà ce qu’on m’a dit, et en étant assez insistant. Sur ces trois postes, deux étaient placés sous la tutelle de Rashid Beebeejaun, le choix a donc été vite fait.

 

Quel est le problème avec Rashid Beebeejaun ?

 

(Long silence)… Disons que nous avons déjà travaillé ensemble et que je n’en ai pas gardé un souvenir impérissable.

 

Résumons : le 15 juillet, Anil Bachoo vous débarque. Le 16, le Premier ministre vous rembarque. C’est ce qui s’est passé ?

 

Presque. Comme quoi, au sein d’un gouvernement, le n°1 et le n°4 peuvent avoir des divergences de vue.

 

Khushal Lobine, l’actuel chairman de la Sicom, est-il au courant de votre nouveau plan de carrière ?

 

(Il se redresse sur sa chaise) Attendez, attendez ! Je n’airien contre Khushal, c’estun ami.

 

Ça vous arrive souvent de piquer le job des copains ?

 

Je ne vole rien à personne. Khushal préside deux conseils d’administration, celui de la Sicom et celui de la Wastewater Management Authority. Le connaissant, je suis sûr qu’il partagera de bon coeur (sourire).

 

Avez-vous déjà pris contact avec la directrice de la Sicom, Karuna Bhoojedhur-Obeegadoo [l’épouse du députéMMM, ndlr] ?

 

Non, pas encore. Sincèrement, je ne suis pas inquiet. La Sicom n’est pas la CNT, sur le board il n’y a que des professionnels. A la CNT, il fallait composer avec les yesmen du ministère du Transport, avec ceux qui n’ont jamais d’avis sur rien, ceux qui ne pensent qu’à travers les instructions qu’ils reçoivent. « Oui monsieur, biensûr monsieur, sa ki ou pe dir samem. » Cette attitude, on a vu ce que ça a donné : onze morts dans un accident de bus, onze autres lors d’une après-midi de grosse pluie. A la Sicom, je sais que ce sera différent. Je suis impatient de commencer.

 

Quelles sont vos compétences en matière d’assurances ?

 

Je ne suis pas un spécialiste, je le reconnais. (Surun ton ironique) Vous savez, je ne suis qu’un petit pharmacien qui possède par ailleurs un MBA en marketing.

Vous pensez que cela me disqualifie ? Je ne suis pas du même avis. On ne demande pas au chairmande la Sicom d’être un expert en assurances, plutôt un guide, une tour de contrôle, celui qui montre le chemin et qui veille au respect des procédures.

 

Elle en est où la tour de contrôle avec ses démêlés judiciaires ?

 

Il y a deux plaintes contre moi. La première est connue : Anil Bachoo me poursuit pour diffamation criminelle suite à mes propos dans un journal concurrent. La semaine dernière, une seconde plainte a été déposée contre moi. Le Central Procurement Board m’accuse d’avoir terni sa réputation. L’affaire sera entendue en Cour suprême jeudi prochain. J’espère qu’ils ont bien préparé leur dossier car j’ai quelques arguments qui risquent de leur déplaire.

 

Deux plaintes, trois graines, ça commence à faire beaucoup vous ne trouvez pas?

 

Vous n’imaginez pas à quel point j’ai hâte d’aller au procès. Voir la tête de M. Bachoo quand le tribunal prendra connaissance de certains documents sera un pur moment de bonheur. Rien que d’y penser, je suis déjà tout excité. Ma seule crainte, c’est que le DPP me prive de ce plaisir. Mais j’ai bon espoir. Après tout, il s’agit de la réputation d’un vice-Premier ministre, je pense qu’on ira au procès.

 

C’est donc officiel : entre M. Bachoo et vous, ça ne s’arrange pas…

 

Je dois quand même rendre hommage à son sens de l’autodérision. M. Bachoo, il faut le savoir, a choisi comme avocat Rama Valayden. Ce même Rama Valayden, en 2004, poursuivait en justice un certain Anil Bachoo. Et que lui reprochait-il ? En gros, la même chose qu’à moi. Un comble.

 

Ça va se terminer comment, vos histoires ?

 

La fin, on la connaît, M. Bachoo est un préretraité. Mais comme tous les tyrans, il a horreur qu’on lui tienne tête. Je l’ai fait quand j’étais à la CNT, et il sait que je ne n’ai pas tout dit, alors il essaie de m’intimider pour que je me taise. L’intimidation, l’arme des faibles, c’est tout ce qu’il lui reste. S’il croit qu’il me fait peur… « Jo dar gaya so mar gaya », celui qui a peur a perdu d’avance. Il faudra bien que le Parti travailliste finisse par ouvrir les yeux sur le pouvoir de nuisance de M. Bachoo. Demandez aux pur-sang travaillistes ce qu’ils en pensent… Tous vous diront que si l’on veut prendre une bonne raclée en 2015, M. Bachoo a la recette. Cet homme nous fait un tort énorme. Ce n’est pas seulement moi qui le pense, mais la majorité du Conseil des ministres.

 

Parce qu’évidemment, un pharmacien de 36 ans a ses entrées au Conseil des ministres…

 

Je suis né rouge… (On coupe)

 

Comme Bozo le clown ?

 

(Il fait mine de ne pas entendre) J’ai grandi rouge. LeParti travailliste est ma secondefamille. En famille,on parle. Et s’il y a un sujetqui fait l’unanimité en cemoment, c’est bien la capacitéde nuisance de M.Bachoo [Sollicité à plusieurs reprises pour un entretien, Anil Bachoo a systématiquement décliné l’invitation, ndlr].

 

Entretien réalisé par Fabrice Acquilina