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Catherine Ritter: «Une vraie politique de Réduction des Risques doit tenir compte des prisons»
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Catherine Ritter: «Une vraie politique de Réduction des Risques doit tenir compte des prisons»

Le médecin en et consultante  en santé carcérale, invité à Maurice par le Collectif Urgence Toxida (CUT) évoque le problème de la présence des drogues en prison ainsi que la question de Réduction des Risques.
Parlez-nous brièvement de vous et de l’objet de votre visite à Maurice…
Je suis ici dans le cadre de la conférence organisée par le Collectif Urgence Toxida sur la Réduction des Risques (RdR) (NdlR : conférence qui s’est tenue les 20, 21 et 22 août derniers). Je suis venue parler de la problématique des substances en prison et de la RdR. Pour ma part, en tant que médecin, j’étais attachée en clinique dans le milieu carcéral et je travaille maintenant comme consultante free-lance, notamment dans la formation. J’ai travaillé en Suisse et en Allemagne essentiellement, et c’est ici ma première expérience dans un pays non européen.
Pourquoi la RdR est-elle particulièrement pertinente dans ce même milieu ?
Il n’y a pas vraiment de recherches disponibles sur les conditions en prison. Il y a également beaucoup de non-dits, de choses qui restent cachées par rapport à ce milieu. La prison est surtout le théâtre d’un phénomène de concentration de personnes à problèmes, dont les usagers de drogue. En tant que marginaux, ils n’ont pas accès aux mêmes soins qu’à l’extérieur. Selon le principe d’équivalence, la prison devrait être une continuité de la santé publique. Or, ce n’est pas toujours le cas. La preuve, 12 pays seulement ont mis sur pied un programme d’échange de seringues dans le milieu carcéral.
Vous avez profité de votre passage à Maurice pour visiter la prison de Beau-Bassin et avez eu un échange avec le personnel des prisons locales. Comment avez-vous vécu ces expériences ?
Au cours de ma visite à Beau-Bassin, le commissaire des prisons, Jean Bruneau, m’a proposé d’animer un cours pour son personnel. Déjà, quand on parle de la santé en prison, on doit la voir sous deux aspects. Celle du détenu, certes, mais aussi celle du personnel. On ne peut pas mettre en place un programme pour les détenus sans penser au personnel. D’autant que la RdR en prison est un concept nouveau à Maurice. Le personnel que j’ai rencontré a montré beaucoup d’intérêt et a posé des questions relativement à la méthadone et autres traitements, au cannabis en prison, à l’échange des seringues. La façon de manipuler les seringues usagées, la procédure de protection vis-à-vis de soi-même et l’élimination des seringues sont autant de points que nous avons évoqués.
Parlez-nous de la politique des «quatre piliers» appliquée en Suisse dans le cadre de la RdR.
Dans le cadre de la lutte contre la drogue, la RdR a été inscrite, il y a deux ans, dans la loi suisse, afin de proposer une politique au niveau national. De ce fait, il n’y a pas de retour en arrière possible. Mais même là, l’échange de seringues n’est pas en vigueur dans toutes les prisons. Les quatre piliers en question concernent la prévention, la RdR, les traitements diversifiés et la répression ou régulation du marché. Les idées principales derrière cette politique sont de contrôler la consommation et de donner le traitement qui convient en fonction des substances injectées.
Des suggestions pour la politique de RdR à Maurice ?
Un pays progressiste comme le vôtre, qui veut une vraie politique de RdR, doit tenir compte des prisons. Faire partie du personnel qui y travaille implique d’être méprisé. D’où l’importance d’accorder à ces personnes plus de compréhension, car ce sont des gens de terrain, qui observent chaque jour certaines réalités.
Propos recueillis par Ludovic AGATHE
(l’express iD, mardi 27 septembre)
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