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Chine : «L’échec des autorités est retentissant»
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Chine : «L’échec des autorités est retentissant»
Persécuté par les autorités chinoises qui cherchent à le faire taire, le célèbre artiste prodémocrate Ai Weiwei est parvenu à opérer un extraordinaire retournement de situation en sa faveur. Détenu dans un lieu secret pendant quatre-vingt-un jours en avril, il a été relâché cet été pour se voir, fin octobre, infliger une amende du fisc équivalent à 1,7 million d’euros.
En guise de protestation, des milliers de Chinois se sont spontanément mobilisés pour lui faire parvenir de l’argent. Au dernier décompte, en l’espace d’une semaine, plus de 20 000 personnes ont versé 705 000 euros, le plus souvent via Internet, au célèbre concepteur du stade olympique en «nid d’hirondelle» - aujourd’hui devenu un porte-drapeau du mouvement démocratique chinois.
Dans une interview accordée à Philippe Grangereau, correspondant à Pékin du quotidien français Libération, Ai Weiwei explique que ce sont surtout des jeunes de 20 à 30 ans qui lui envoient de l’argent. « Des jeunes qui passent beaucoup de temps sur Internet et qui me connaissent bien », ajoute-t-il. «  Le harcèlement dont je suis la cible, qu’il s’agisse de cette histoire d’impôts, de mon incarcération par la police, tout ça est une manipulation. Les autorités pensaient avoir gagné, mais leur échec n’en est aujourd’hui que plus retentissant. Mais bien évidemment, elles peuvent toujours me faire disparaître ou m’emprisonner », poursuit l’artiste qui signale par ailleurs que la menace est toujours présente. «Le danger est là, même quand on ne s’y attend pas. J’ai été surpris d’être arrêté en avril. Ils n’avaient aucun mandat et j’ai pourtant été incarcéré. Ils m’ont remis en liberté de la même manière, sans la moindre procédure légale. Tout peut donc arriver ».
Mais va-t-il payer cette amende le 16 novembre, comme l’exigent les autorités ? « Le problème est que si je paie ce qu’on me demande, cela revient à reconnaître mon délit de fraude fiscale. Mais si je refuse, ils peuvent me faire condamner à plus de sept ans de prison. Je n’ai pas encore décidé ce que j’allais faire », répond-t-il.
Et de conclure en ces termes : «  Il n’y a pas d’égalité entre les citoyens, il n’y a toujours pas de liberté d’expression, pas d’indépendance judiciaire et pas d’élections libres. Il n’y aura pas de progrès tant que cette question essentielle ne sera pas résolue. Mais il faut aussi que la société soit prête à accepter la démocratie et qu’il y ait une réelle demande populaire pour qu’elle arrive. Je ne sais pas quand le fruit sera mûr. Mais je suis sûr que ce jour viendra ».
Photo (Reuters) : Ai Weiwei, à l''''entrée de son studio, lundi à Pékin.
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