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Christian Raboude : « De nombreux Rodriguais ne mangent pas à leur faim »
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Christian Raboude : « De nombreux Rodriguais ne mangent pas à leur faim »
? Quelle est votre analyse de la situation politique ?
La situation politique à Rodrigues est confuse. Nous avons un gouvernement avec seulement 9 membres. Cela parce que daniel Spéville, un élu de l’opposition a changé de camp. La minorité OPR qui comptait six membres à l’Assemblée régionale, a démissionné. La minorité comprend maintenant deux membres du Front Patriotique de Rodrigues et un membre indépendant. Nous nous retrouvons donc avec une assemblée non représentative d’une bonne majorité de la population soit 45 % de la population alors qu’une assemblée doit refléter les différentes tendances dans un pays. Le mieux pour Rodrigues, c’est d’aller directement vers des élections régionales anticipées au plus vite pour la population et le gouvernement régional.
? Partagez-vous l’avis de Nicolas Von Mally, qui dit que l’OPR est train de bafouer la démocratie et l’autonomie.
Il a également suggéré d’apporter des amendements à la constitution pour que la proportionnelle ne permette pas aux partis élus d’avoir une majorité confortable à l’Assemblée régionale. Qu’en pensez-vous ?
Je suis d’accord avec Nicolas Von Mally  qu’il faut revoir le système de la proportionnelle.
C’est la source du problème car le système actuel crée l’instabilité. Le transfugisme, les élections à répétition. Je crois que ce serait mieux de mettre en place une commission avec un juge pour revoir tout le système de l’Assemblée régionale pour approfondir l’autonomie. Je suis contre une approche piecemeal. En ce qui concerne la démission en bloc de l’OPR à l’Assemblée et a-t-il a bafoué la démocratie ? Cela fait débat vu que le MR a gagné les dernières élections mais on peut se demander si en changeant en cours de route un Chef commissaire qui a été plébiscité par une majorité de l’électorat sans passer par les urnes si cela ne peut être considéré aussi comme avoir bafoué la démocratie ? C’est cela qu’on entend par démocratie, je crois que c’est le système qu’il faut changer.
? Le centre carrefour a joué un rôle majeur dans l’accès de Rodrigues au statut d’autonomie. Etes-vous satisfait de l’orientation prise par les deux anciens Chefs commissaires : Serge Clair et Johnson Roussety sur l’orientation politique, économique et sociale ou faut-il un sursaut de la part des Rodriguais pour faire avancer et consolider davantage l’autonomie. Si recul, il y a, pourquoi selon-vous ?
Le Faar et Centre carrefour vont continuer à jouer leur rôle pour la consolidation de l’autonomie. D’ailleurs nous nous rencontrons à intervalles réguliers pour voir ce qui empêche le Rodriguais de mieux se prendre en charge et les faiblesses de l’Assemblée régionale. Je dois vous dire que nous ne partagions pas toujours l’avis des Chefs commissaires qui ont dirigé Rodrigues parce que nous sommes différents : nous ne sommes pas des politiciens. Mais l’essentiel, c’est qu’il y a une volonté pour que Rodrigues se développe.
? Vous avez dans le passé émis des réserves sur la Rodrigues Water Company (RWC), une compagnie mise en place pour une meilleure gestion de l’eau dans l’île. Avez-vous changé d’avis ?
Nous maintenons nos réserves sur le RWC, nous pensons qu’il faudrait plutôt une agence pour le développement de l’eau qui tombe sous la responsabilité de l’AR.
Nous avons dit qu’il n’était pas nécessaire de créer une compagnie. Il faut au préalable assurer d’abord que chaque Rodriguais ait un peu d’eau. Il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs. Cela dit, il faut une bonne réforme institutionnelle qui va tenir compte de la gestion et de la production de l’eau.
? Outre la délinquance juvénile qui commence à gagner du terrain dans l’île, la « Police Family and Protection Unit » de Rodrigues a enregistré plus de 30 cas d’abus sexuels sur des enfants de 12 à 17 ans et deux cas de viol sur des enfants. Comment réagissez- vous devant cette situation ?
Nous sommes très préoccupés par la délinquance. Il y a quelque chose qui s’est brisé quelque part. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de politique pour l’épanouissement saine de notre jeunesse, hormis quelques activités sportives. Il faut des programmes pour mieux aider nos jeunes à se prendre en charge. Il faut un programme d’éducation à l’autorité parentale car ils ont aussi leur responsabilité.
? Et en ce qui concerne les grossesses précoces, les statistiques du ministère de la Santé pour 2009 indiquent que 665 accouchements ont eu lieu dans les hôpitaux à Maurice et à Rodrigues et des adolescentes de 18 ans parmi. Alarmant ?
C’est inquiétant pour Rodrigues car la grande majorité de la population, c’est des jeunes et les filles sont les plus vulnérables.
Mais il me semble qu’il y a des cas qui ne sont pas enregistrés et, à mon avis, il faut un sursaut à tous les niveaux à Rodrigues.
Les ONGs et le gouvernement doivent se mettre autour d’une table pour trouver les meilleures stratégies possibles pour résoudre ce problème.
? Les Mauriciens se plaignent du coût de la vie qui prend chaque jour l’ascenseur. Comment cela se passe à Rodrigues ?
Effectivement, beaucoup de Rodriguais sans emploi ne mangent plus à leur faim.
Et cela est fortement ressenti parmi les pêcheurs depuis qu’on a divisé l’île en quatre zones pour les allocations et également pour ceux qui travaillent dans d’autres secteurs comme l’artisanat où la concurrence est rude. Je ne suis pas un prophète de malheur mais si cette situation persiste, je ne serais pas étonné que cela débouche sur une crise sociale sans précédent dans l’île car les Rodriguais, (ceux au bas de l’échelle surtout), ne supportent plus de porter seuls le fardeau de la misère car ils arrivent diffi cilement à joindre les deux bouts.
Propos recueillis par Jocelyn ROSE
 
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