Voilà dix ans maintenant qu’une équipe de formateurs de Cité Barkly offre la chance à d’anciens recalés du «Certificate of Primary Education» de repasser cet examen, des années après.

Il n’y a pas d’âge, dit-on, pour apprendre. Le Centre of Learning de Caritas, à Cité Barkly, a fait sienne cette devise à travers des classes axées sur le programme du Certificate of Primary Education (CPE), destinées aux adultes. Il s’agit d’un projet qui a vu le jour il y a dix ans, sous la houlette de Jean-Noël Adolphe. Depuis, beaucoup de bénéficiaires de ces classes sanctionnées par l’examen national ont réussi à se construire une nouvelle vie.

Lorsque l’aventure commence pour l’équipe de formateurs de Cité Barkly, il y a une décennie, certains d’entre eux s’occupaient déjà d’enfants de la localité tandis qu’ils encadraient, parallèlement, les parents. En ce faisant, ils réalisent la nécessité de mettre sur pied un projet de classes de CPE destiné exclusivement aux adultes. D’une durée de trois ans, les cours ainsi initiés sont dispensés par des volontaires qui sont principalement des enseignants d’expérience.

Chaque année, depuis, ils reçoivent une quinzaine d’inscriptions. Les formateurs précisent toutefois que contrairement aux cours d’alphabétisation traditionnels, ils prennent des personnes dont le parcours scolaire s’est arrêté au minimum en Standard III et qui ont déjà appris à lire, écrire et compter. Il n’empêche qu’avec le passage du temps et le manque de pratique, explique Viken Vadeevaloo, l’un des formateurs qui accompagne les adultes depuis l’année de lancement du projet, «la majorité d’entre eux ont presque tout oublié ; il faut refaire toute la base». Les enseignants observent également «que certains parents venaient plutôt pour fréquenter des gens, se faire des amis et ne terminaient pas les trois années». À partir de ce constat, ils lanceront par la suite le programme «Learn for Fun» à l’intention d’adultes qui suivraient, certes, le programme du CPE, mais avant tout pour le plaisir, afin d’accroître leurs connaissances générales. «C’est un programme plus léger, pour éviter que certains parents commencent puis laissent tomber en plein milieu des cours», fait remarquer letravailleur social.

Qu’en est-il des bénéficiaires? Marie-Christine Dit-Jacques est l’une des success stories de ce projet.À 47 ans, elle a fréquenté l’école primaire mais n’a pu prendre part aux examens du CPE parce qu’elle était malade. «Mo finn res lakaz pandan boukou lane ziska laz 16 an», se souvient-elle.Dès que son état de santéle lui permet, Marie-Christine prend de l’emploi dans une usine de tricot, se marie et réussit à envoyer ses deux enfants à l’école. Il y a dix ans, alors que le projet de cours pour adultesvenait d’être lancé, Marie-Christine aidait déjà les enfantsde la région à traversle centre de Caritas. Quandon l’approche au sujet de laformation, elle décide, après réflexion, de se jeter à l’eau.

«Monn boukou esite parski mo pa ti kone kouma sa ti pou pase. Me monn fer li pou mo mem ; mo ti anvi bouze, fer enn pa dan mo lavi pou avanse», confie la mère defamille. En effet, poursuit-elle,«Li ti difisil pou mwa gagn enn travay a lepok ; mo ti pe fer servant me apre, monn resi gagn enn lot travay ki finn permet mwa avoy mo bann zanfan lekol.»

Aujourd’hui, avec le recul, la quadragénaire réalise que l’obtention du CPE lui a indéniablement permis de progresser dans la vie, elle qui travaille désormais dans une usine où elle a pour responsabilité de peser des ingrédients. Solidaire, elle accompagne aussi les adultes qui se joignent à la formation, les encourageant à persévérer.

Depuis l’année dernière, le Centre of Learning de Caritas a décidé de restructurer les cours pour adultes et de prendre, notamment, moins de personnes en s’assurant qu’elles soient plus présentes, régulières et assidues. Un système de «streaming» a de plus été introduit en vue de séparer les élèves de différents niveaux en deux classes.

L’une des nouvelles recrues, Natalie Thomas, suit la formation, justement, depuis 2013. À 48 ans, cette habitante de Trèfles raconte avoir pris part aux examens du CPE lorsqu’elle était encore à l’école primaire mais y avoir échoué. «Monn dekourazear ledikasyon apre sa.Lontan, kan nou pa ti konnlir, profeser ti met nou derierdan klas. Kan mo bann zanfanti vinn kestionn mwa, moti pe dir zot pa demann mwa,mo enn zero dan aprann»,se rappelle Natalie. Celle-ci, comme d’autres dames qui ont pourtant déjà une certaine maturité d’esprit, se retrouve en proie à de la frustration.

Ses enfants étant aujourd’hui âgés de 18 et 24 ans, Natalie a pris la décision de se lancer. «Mo espere bondiefer mwa resi sann fwa la»,lance-t-elle, pleine d’espoir mais également de motivation.«Bizin kapav pa dekouraze.Mo tia kontan ouver mo prop restoran parski mo kontan kwi. Pou sa, mo bizin konn lir, ekrir, konte. Li pou enn lavantaz pou mwa», faitelle ressortir.

Les volontaires étant toujours les bienvenus, Viken Vadeevaloo précise que pour aider les adultes, ils doivent répondre à trois principaux critères : avoir, au moins un niveau de Form V, être à l’aise avec les adultes et prêts à s’engager. Le travailleur social indique néanmoins qu’«en général, les bénévoles restent par passion ; grâce à la satisfaction que leur apportent les réussites».Il est à noter que l’équipe de formateurs arrive à mener en moyenne quatre à cinq bénéficiaires jusqu’aux examens chaque année.

Le regard tourné vers l’avenir, Viken Vadeevaloo affirme : «Ces élèves sont de vrais exemples. Il suffit d’y croire, deprendre l’initiative de réaliser lesrêves de ces adultes qui un jouront eu 11 ans et n’ont pas pu poursuivre leurs études.»

Infos pratiques

Si vous habitez la région de Beau-Bassin-Rose-Hill, vous avez jusqu’au 31 janvier pour vous inscrire en tant que bénéficiaire du programme de trois années qui mène aux examens du «Certificate of Primary Education» (CPE). L’inscription tout comme les cours sont gratuits. Les élèves doivent toutefois s’acquitter des frais d’examens. Pour des informations supplémentaires, appelez aux numéros suivants :464 1262/ 5-250 1100/ 5-498 8400.