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Haut risque de crise cardiaque pour les Mauriciens de 35 ans
27 avril 2013, 14:50
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Haut risque de crise cardiaque pour les Mauriciens de 35 ans
(For English abstract on hypertension and early heart arrest, click here)
Au milieu des années 2 000, le Dr Oomar Uteem affirme qu’un Mauricien sur deux décédera d’une maladie cardiovasculaire. Sa déclaration laisse sceptique. Elle est d’ailleurs reléguée aux oubliettes jusqu’à ce qu’Oomar Uteem meurt lui-même d’une crise cardiaque après un éreintant match de football. Il n’avait que 39 ans.
Sa mort, en 2007, va vite être considérée comme exceptionnelle, car on ne meurt pas d’une crise cardiaque à 39 ans. Du moins, c’est ce qu’on pensait alors.
Plus maintenant, car l’exception devient de plus en plus la règle. Le Centre de cardiologie de Pamplemousses se voit de plus en plus dans l’obligation de pratiquer des opérations à cœur ouvert sur des Mauriciens d’environ 35 ans pour leur éviter une mort certaine.
«En général, c’est à partir de 65 ans en Europe, 60 ans aux Etats-Unis et en Australie et 50 ans en Inde qu’on pratique des opérations à cœur ouvert pour éviter une crise cardiaque», affirme le chirurgien cardiologue Suresh Bhagia.
Ce cardiologue qui vient d’être recruté par le Trust Fund For Specialised Medical Care a exercé au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, en Nouvelle-Zélande et en Inde avant de prendre de l’emploi à Maurice.
Expliquant les raisons du développement prématuré des maladies cardiovasculaires à Maurice, le Dr Bhagia affirme:
«Ce n’est nullement en raison d’une consanguinité ou d’un défaut génétique quelconque. Cette hypothèse est dangereuse à plus d’un titre, car bon nombre de personnes à risque se disent, face à cette supposition, qu’il n’est nullement nécessaire de prendre des précautions. Elles sont convaincues qu’elles attraperont ces maladies dites non transmissibles qui courent dans leurs familles».
Le Dr Bhagia explique, ci-dessous, les raisons qui, selon lui, sont responsables de ce phénomène d’hypertension, de diabète et de problèmes cardiaques prématurés dans une interview exclusive à l’express et lexpress.mu.
Il y explique entre autres comment éviter d’être hypertendu à 18 ans, diabétique à 20 ans et cardiaque à 35 ans.
Haut risque de crise cardiaque pour les Mauriciens de 35 ans
Questions au Dr Suresh Bhagia, Maître Chirurgien, Fellow of the Royal College of Surgeons (FRCS), chirurgien cardiaque et vasculaire.
Docteur, vous avez exercé en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, en Nouvelle-Zélande avant de prendre de l’emploi chez nous où vous avez déjà opéré plusieurs patients cardiaques. Quelle différence y a-t-il entre les cardiaques d’ici et ceux d’ailleurs ?
Une grande différence. A Maurice, c’est à partir de l’âge de 35 ans qu’on pratique des opérations à cœur ouvert sur des patients atteints de problèmes cardiovasculaires pour leur éviter des crises cardiaques. En Europe, de telles opérations sont pratiquées à partir de 65 ans, aux Etats Unis et en Australie à partir de 60 ans et en Inde à partir de 50 ans. Cela démontre que les Mauriciens développent des problèmes cardiovasculaires et des complications cardiaques comparativement à un très jeune âge.
On affirme souvent que c’est dû à un problème génétique et de consanguinité à Maurice. Partagez-vous ce point de vue ?
Absolument pas ! Je ne crois pas que c’est en raison d’une consanguinité ou d’un défaut génétique. On constate ce même problème d’hypertension, de diabète et de maladie cardiovasculaire, par exemple, dans la communauté des Juifs noirs d’Israël, les Beta Israël, connus également sous le nom de Falashas. Ils sont arrivés en Israël dans les années 70 et 80 venants d’Ethiopie. Il y a un fort taux de diabète et de maladie cardiovasculaires chez les jeunes Falashas vivants en Israël. Pourtant ces Juifs noirs ne pratiquent pas l’endogamie sur sept générations alors que leurs compatriotes les Juifs blancs se marient entre cousins germains et n’ont pas la même prévalence de problèmes cardiovasculaires et de diabète. Les parents des Beta Israël qui sont restés dans leurs petits villages des montagnes du nord de l'Ethiopie n’ont pas, mais là pas du tout, des problèmes de diabète et de maladie cardiovasculaire. On a le même cas de figure au sein d’une autre communauté de juifs noirs en Israël, les Yéménites. On note que ces Juifs noirs d’Israël se différencient de leurs aïeux qui n’ont pas migré par un style de vie différent en termes d’alimentation, de sédentarité et de stress.
Pouvez-vous énumérer les changements de style de vie qui ont été néfastes à la santé des Mauriciens et des Juifs noirs par exemple ?
Je vous citerai les trois principaux facteurs qu’on retrouve dans tous les groupes ethniques qui ont de sévères problèmes de santé – diabète, hypertension et problèmes cardiaques – à travers le monde. Il y a d’abord un changement draconien dans les habitudes alimentaires. Les fastfoods, les aliments préparés et hyper raffinés contenant une forte quantité de sel, une consommation excessive de matières grasses riches en mauvais cholestérol, une cuisine basée sur les fritures où la cuisson au four où à la vapeur est totalement absente. Egalement absente la consommation des crudités, des fruits et des légumes. Ajoutez à cela une consommation d’alcool et le tabagisme et vous avez une recette qui tuera à coup sûr dès 35 ans.
En deuxième lieu vous avez un style de vie sédentaire non seulement avec le travail au bureau ou à l’usine, mais également en raison de l’utilisation des motocyclettes, des voitures, des autobus et des taxis. L’exercice physique est quasiment absent de ce mode de vie de moto, boulot, dodo.
En troisième position vous avez une vie remplie de stress dans un monde pris dans l’engrenage d’une forte compétition.
Jetez un coup d’œil sur les photos de vos grands-parents ou des générations passées à Maurice et cherchez parmi, des enfants et des adultes obèses. Vous n’en trouverez pas. Par contre, prenez une photo d’une famille contemporaine et comptez le nombre de personnes obèses. Vous serez étonné de constater le nombre d’enfants obèses que nous avons aujourd’hui. Et la situation s’empire de jour en jour à Maurice.
Pouvons-nous renverser la tendance ?
Bien sûr que oui. Il n’est jamais trop tard. Changez de style de vie, éliminez tout ce que j’ai cité plus haut comme néfastes à la santé et faites des exercices régulièrement. Au moins trois fois par semaine. 20 minutes de marche rapide par session suffiront amplement. Je dis bien marche rapide et non une promenade de 20 minutes.
Combattez le stress à travers la méditation, par exemple. Ne fumez pas et ne buvez pas, si vous buvez, il faut un maximum de deux verres par jour pour un homme et un verre par jour pour une femme.
Comme vous voyez, la recette pour éviter la crise cardiaque à 35 ans est simple. Il suffit de mettre un peu de bonne volonté et beaucoup de discipline. Le ministère de la Santé offre des thérapies pour aider ceux qui veulent cesser de fumer. Il faut en profiter.
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