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Hôtellerie en zone rouge : les pistes pour un nouveau souffle

7 juin 2013, 07:51

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Hôtellerie en zone rouge : les pistes pour un nouveau souffle
Les réservations sont en baisse. Les arrivées touristiques d’Europe n’augurent rien de bon. Les hôteliers broient du noir. Comment dynamiser ce secteur ? Différents experts dans ce domaine nous en parlent…
 
 
Les réservations pour les mois de juin et de juillet accroissent l’inquiétude des hôteliers. Car les établissements hôteliers risquent d’être remplis à seulement 46 % en moyenne, alors que le taux de remplissage des trois dernières années variait entre 48,5 % et 50 %, estime l’Association des hôteliers et de restaurateurs de l’île Maurice (AHRIM). «La situation devient d’autant plus compliquée pour le taux de remplissage, qu’à ce jour, nous prévoyons une perte de 2 % pour les mois de juin et de juillet par rapport à ces deux mois l’année dernière», souligne Jocelyn Kwok, Chief Executive Officer de cette association.
 
Son explication : «Les hôtels souffrent, avec ce qui se passe en Europe». Gaëtan Siew, qui est régulièrement sollicité par des clients pour des projets touristiques a, lui, une lecture différente de ce qui se passe dans ce secteur. L’ancien président de l’Union internationale des architectes évoque notamment l’inadéquation criante entre l’offre et la demande.
 
En effet, des grands hôtels cinq étoiles aux petits pensionnats familiaux, Maurice possède environ 12 000 chambres. Constitué de 117 établissements, le parc hôtelier campe 42 des 320 kilomètres de littoral que compte le pays. Leur taux d’occupation moyen est de 65 %, ce qui fait qu’à n’importe quel moment, 4 000 chambres sont inoccupées. 
 
A ce contexte, il faudrait ajouter les hôtels qui sont en difficulté. Deux hôtels du groupe réunionnais Apavou, à savoir La Plantation et Indian Resort, font eux face à des problèmes d’endettement. Le Movenpick et Le Flamboyant ont été rachetés. L’hôtel de Port Chambly a une nouvelle administration et deux hôtels de Mauritours à Rodrigues, Les Cocotiers et Pointe Venus, sont à vendre. Pourtant, 12 nouveaux projets d’hôtels dans le pipeline. «Si seulement deux tiers des chambres sont remplies, la logique veut que l’on optimise celles qui existent déjà. Alors pourquoi en construire encore ? D’autant plus que le produit est fatigué et la concurrence en hausse. Et, pour l’instant, il n’y a pas de Plan B», réagit Gaëtan Siew. 
 
Les solutions pour booster le secteur ? Pour survivre, certains hôtels ont décidé de baisser leurs tarifs. Une pratique qui n’est pas vue d’un bon œil par l’Association of Inbound Operators (Mauritius). «Il ne faut certainement pas se ruer vers une braderie tous azimuts, si l’on veut préserver l’image de qualité de la destination touristique mauricienne. Il faut garder les tarifs au même niveau et améliorer le service davantage», estime Bruno Lebreux, président de cette association et directeur de Concorde Travel Agency.
 
Selon lui, il faut surtout baisser le prix des billets d’avion le plus rapidement possible sur toutes les destinations afin d’éviter que la baisse au niveau des arrivées touristiques ne se poursuive. Car, dit-il, ces tarifs sont bien trop élevés par rapport à ceux des Maldives et des Seychelles, nos principaux concurrents dans la région.  Et d’ajouter qu’il faut aussi revoir le concept et la formule de l’accès aérien. Ceux-ci doivent être prioritaires.
 
Jocelyn Kwok relève pour sa part que la seule bonne nouvelle est la performance sur les marchés émergents, notamment l’Inde et la Chine. Mais il est impératif que les efforts des autorités et de l’industrie hôtelière par rapport au service aérien et à la desserte de nouvelles lignes s'accélèrent, ajoute-t-il. 
 
Pour Gaëtan Siew, une des solutions serait, par exemple, de miser sur la classe moyenne mauricienne qui constitue un créneau prometteur pour les hôteliers. «Selon une formule que les comptables et économistes trouveront, il doit avoir un moyen pour permettre à cette classe moyenne d’avoir accès à des biens immobiliers sur la plage», commente-t-il.
 
Innovateur, l’architecte argue que les retraités étrangers pourraient représenter un gisement extrêmement riche pour le tourisme mauricien, à condition d’innover. Il pense notamment à la création d’une offre qui leur permettrait de partager leur savoir-faire professionnel avec les villages avoisinants. «Les retraités sont de plus en plus en jeunes physiquement et mentalement. Ils sont souvent socialement et écologiquement responsables. Ce genre de tourisme de découverte a des intérêts moins prédateurs que d’autres», affirme Gaëtan Siew.  
 
Et, pourquoi ne pas reconvertir des hôtels de manière à offrir des facilités de «destressing, detox et de convalescence au lieu de persister à vendre les plages et le bronzage» ? Outre d’exploiter le filon des assurances médicales, une telle réinvention créerait un éventail de nouvelles professions. Sans compter les opportunités marketing. «Pourquoi être concurrents alors les hôtels pourraient être complémentaires ?» s’interroge Gaëtan Siew. 
 
Maurice peut aussi aspirer à devenir une référence dans des domaines clés de façon à exporter son savoir faire. L’architecte relève qu’au lieu de se débattre pour obtenir du Foreign Direct Investment, le pays devrait surtout chercher à attirer le «Foreign Direct Intelligence». Car, dit-il, chaque boulot «hi-tech» génère 4,3 emplois auxiliaires. «Maurice pourrait devenir une plateforme pour les industries créatives liées aux nouvelles technologies», suggère-t-il. Alors que, pour l’heure, sur les 23 000 étrangers résidant à Maurice, seuls 9 000 sont issus de milieux dits professionnels. L’architecte cite l’exemple de Singapore qui avait, dans le cadre de la création de son pôle «Biopolis», distribué 1 000 passeports à des médecins et informaticiens.
 
Mais les acteurs du secteur seront-ils à la hauteur ? Pour l’instant, ils semblent terrassés, selon notre intervenant, par «le poids du passé et la peur de l’avenir». 
 

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