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Ils ont peur des fantômes

28 août 2012, 00:00

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C’est une histoire difficile à comprendre. Elle naît d’une rencontre. D’un hasard. Et pourtant, ce n’est pas qu’une histoire. C’est ce que vivent des milliers de Mauriciens. Cette histoire, elle se conte d’elle-même. Ils vous disent. Ils vous implorent. Vous qui avez un peu de pouvoir. Ayez du coeur.

«Ne m’appelez pas. Lorsqu’il résonne ce téléphone, je prends peur. Qu’est-ce qu’il me veut ? Qu’est-ce que je lui dois à ce numéro qui s’affiche sur mon écran de téléphone ? Il a ces chiffres. Et moi, combien de chiffres je te dois ? Ne m’appelez plus. Je n’aime pas ces numéros que je ne connais pas. Vous me terrorisez, tout ce que vous êtes, des numéros. Comment vous dire que je n’ai pas les moyens de vous payer… Comment vous dire que je ne peux répondre à votre appel ?

Je n’aime pas le facteur. Pourquoi est-ce qu’il existe ? Il n’apporte des nouvelles que mauvaises pour des gens comme moi. Ce n’est pas de sa faute, bien sûr. Mais, il apporte des lettres. Qui disent toutes qu’on a un retard de paiement. Evidemment, vous me direz que c’est ma faute d’avoir acheté ce que je ne peux me permettre. Je suis d’accord. Mais qui a fait miroiter tout cela devant nous ? Ce n’est pas de votre faute. Est-ce que j’ai le droit de dire que ce n’est pas de la mienne non plus ? Mais je vous dois de l’argent…

Ne sonnez pas à ma porte. Qui êtes-vous ? Vous venez probablement réclamer quelque chose de moi. Permettez-moi d’être absent. De faire semblant de ne pas exister. Frappez encore et plus fort. Je n’ouvrirai pas. Je vous parle dans ma tête. ‘Monsieur, laissez-moi ne pas être. Vous devez avoir des problèmes comme les miens. Vous me comprenez, n’est-ce pas ?’ Et il m’a répondu : ‘Je vous comprends, mais, maintenant, que vous avez ouvert la porte, je dois vous remettre cette correspondance. Il faut payer, monsieur’. Payer, c’est tout ce que j’ai envie de faire. Mais, où trouver l’argent ? J’ai déjà emprunté à tout le monde. Vers qui vais-je me tourner ? Vers ceux pour lesquels je vais donner une croix ? Ils s’en foutent de moi. Alors, je vous demande, ne m’envoyez pas de facteur, ni de lettre, et surtout ne frappez pas à ma porte. Et n’envoyez pas d’émissaires chez moi.

Est-ce que je peux faire semblant de ne pas exister ?» Nous sommes dans le bus. Nous marchons dans les rues. Nous croyons être malheureux ou être en difficulté. Nous nous inventons des histoires. Mais, pour la plupart d’entre nous, nous ne savons pas comment faire pour devenir transparents.

C’est histoire de ceux qui ont peur du facteur, de la sonnerie, du téléphone, de ceux qui cognent à la porte…

Ce n’est certainement pas votre histoire.