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Interview du Père Jocelyn Grégoire

13 décembre 2008, 13:39

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Ne craignez-vous pas que la FCM ne soit en train d’ethniciser la question créole comme d’autres ont donné un caractère sectaire aux revendications hindoues ou musulmanes?

Non, nous n’ethnicisons pas le débat. C’est la réalité de notre pays qui commande notre action. L’arc-en-ciel a sept couleurs différentes. Chaque couleur a sa spécificité. C’est en juxtaposant ces couleurs qu’on a un joli arc-en-ciel. Dans une mosaïque culturelle, ce sont les pièces distinctes qui donnent un chef-d’œuvre.

N’est-ce pas compromettre la possibilité d’une nation mauricienne?

Ce serait une aberration de croire qu’il faut tout mettre dans un même panier. Dans un melting-pot, les fruits perdent leur saveur. Si on veut être sérieux avec le mauricianisme, il faut reconnaître l’identité de chacun… L’essentiel, c’est de ne pas s’écarter des principes fondamentaux. En ce qui concerne la population créole, il faut qu’elle se mette debout. L’ultime but étant la construction de la nation mauricienne.

Qu’est-ce qui vous motive dans cette lutte?

C’est mon côté altruiste. Je veux pouvoir un jour faire face à mon Seigneur et savoir que répondre lorsqu’il me demandera ce que j’ai fait pour mes frères humains.

Pourrait-on vous voir un jour vous engager en politique?

Non. La politique m’intéresse en tant que citoyen. Mais faire partie d’une formation politique, ce n’est pas dans mes fonctions.

On dit aussi que vous étiez intéressé par la fonction de président de la République…

Encore une fois, c’est non. Dans le principe, j’ai parlé de l’égalité des chances. J’ai parlé de la chance d’avoir un créole à la Présidence. Je suis prêtre. J’aime ma prêtrise. Et j’aimerais mourir prêtre. J’ai dit oui à la prêtrise et c’est jusqu’à la mort.

Quelles sont les prochaines étapes de la FCM?

La FCM est née de l’éveil de la conscience, elle-même procédant des sessions d’évangélisation à partir de 1994. Graduellement, l’évolution se fait du statut de victime à la nécessité de se prendre en charge. Le créole se doit de réaliser que ce qu’il fait, ce n’est pas pour lui mais pour ses enfants. Il y a aussi cette nécessité de comprendre que l’autre n’est pas un ennemi. Il faut apprendre de l’hindou sa nature de bosseur, du musulman son esprit de solidarité alors que nous, les créoles, nous sommes beaucoup plus individualistes. On ne contribue pas assez au bonheur du voisin qui vit dans la même cité que nous.

Quelles sont alors les qualités du créole?

C’est son esprit d’ouverture. La majorité des créoles étant chrétiens, on retrouve chez eux une grande facilité à pardonner. C’est un peuple qui ne garde pas rancune. Il n’a pas l’esprit vindicatif.


Calendrier
Après un peu plus d’une année d’existence, la Fédération des créoles mauriciens (FCM) intensifie son travail de terrain et de réflexion. Le 26 octobre 2008, elle proposait une ébauche de son manifeste à la suite d’un séminaire réunissant les différents responsables des cellules de la fédération. Le manifeste sera présenté mi-2009. Si le processus est long, c’est aussi parce que les dirigeants du mouvement comptent «faire remonter les informations du bas vers le haut.» L’objectif est de parvenir à un manifeste qui puise du principe participatif et de l’empowerment des créoles. C’est, pour les animateurs du FCM, une manière de faire participer et de responsabiliser les créoles.