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J?ai eu des relations avec ma fille

28 août 2005, 00:00

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Traiter des pères incestueux est un sujet délicat, car on a tendance à prendre parti contre ces individus ou à se livrer à du voyeurisme. Il n?empêche que la lecture de ces deux témoignages est perturbante. Mais si elle peut déboucher sur une réflexion et réaffirmer ? si besoin était ? en chacun de nous la nécessité absolue de ce tabou, alors elle n?aura pas été vaine. Pour préserver l?anonymat des protagonistes, nous n?avons gardé que quelques détails indispensables. Avec leur accord, nous les avons désignés par les prénoms de trois des frères Dalton pour les hommes et de deux des s?urs Brontë pour les filles. Ces prénoms « neutres » permettent de cacher toute référence ethnique de nos interlocuteurs. Deux précisions : Émilie a aujourd?hui 24 ans et prépare un D.E.A. en France. Elle suit une thérapie depuis trois ans après avoir souffert d?une très longue dépression, avec tentative de suicide. D?après son père, le suivi psychologique semble lui faire du bien, ses études marchant. William, 46 ans, est psychiatre et psychanalyste dans une capitale européenne. Son amitié avec Joe et Jack, qu?il a comme patients, date de leurs années de collège.

Joe et Jack sont en thérapie. Témoigner de leur transgression d?un interdit moral et légal fait partie d?une prise de parole nécessaire à leur guérison. Il n?est nullement question ici de les excuser, mais d?essayer de comprendre les raisons qui peuvent pousser des adultes à passer à l?acte. Comment devient-on père incestueux ? Selon le psychiatre et psychanalyste William et la psychologue Sarah Dieazanacque, les cas de Joe et de Jack présentent des caractéristiques que l?on retrouve dans de nombreux cas d?inceste. D?abord, la confusion des rôles et places de chacun. « Un père doit remplir son rôle de père et une fille celui de fille », résume William. Si les rôles ne sont pas bien définis, cela entraîne des « dérapages » qui peuvent mener à l?inceste. « Le père représente toujours une fascination pour sa fille. C?est au père de dire non et de poser les limites », explique Sarah Dieazanacque. « Il est celui qui permet à l?enfant de comprendre que le fantasme de l?inceste doit rester à ce niveau et il est celui qui permet cette identification distincte des rôles. » Dans nos deux cas, cette distinction n?a jamais été claire, Joe et Jack traitant leurs filles comme des partenaires sexuelles égales. « Il n?y a pas de différence de génération entre eux », constate Sarah Dieazanacque. Ainsi, en couchant avec les copines de sa fille pour la rendre jalouse, Jack se met sur le même plan qu?elle. « Il est évident qu?il a lui-même des comptes personnels à régler. Par exemple, comment peut-il penser que sa fille va le protéger du monde cruel ? », s?interroge Sarah Dieazanacque. On note dans les deux cas, l?absence physique de la mère-épouse. « Quand la mère-épouse ne remplit pas son double rôle, il y a un vide qui doit être comblé. D?où une situation où la fille va séduire le père et où ce dernier fera de même », explique William. « Mes deux patients étaient conscients du vide affectif causé par l?échec de leur vie de couple et ils ont accepté cette mise à l?écart de la femme légitime. Pourquoi n?ont-ils pas choisi d?avoir des liaisons avec d?autres femmes hors de leur maison ? L?échec sentimental fait que l?on recherche la sécurité, d?où leur désir inconscient de se sentir protégés du monde du dehors et d?être désirés par plus jeunes qu?eux. » Cette absence de la femme légitime fait que la relation désirée avec elle, est transposée sur la fille, appelée à devenir également la femme-amante. Le fait que Jack « vive » avec sa fille à Singapour montre, selon Sarah Dieazanacque, qu?il transfère sur elle le manque de sa vraie femme. Mais, inconsciemment, tous deux savent qu?ils ne peuvent pas aller jusqu?au bout de leur « égoïsme » : cette relation « in-humaine » ne doit surtout pas porter des fruits : d?où la prise de contraceptifs par les deux filles-amantes. Un fait enfin que l?on retrouve dans presque tous les cas d?inceste : le déni ou banalisation de l?acte. « Les deux patients étant en thérapie, ils arrivent à s?approprier leur acte avec moins de difficulté, explique William. Mais, malgré tout, ils tentent de s?excuser en avançant qu?il n?y a pas eu de violence, qu?il y avait consentement. » La tendresse est une parade souvent utilisée par des adultes incestueux pour atténuer un acte qu?ils vivent mal. « De nombreux pères ou beaux-pères qui passent à l?acte mettent toujours en avant leur tendresse et leur douceur lors de l?acte », rappelle William. Le père incestueux est avant tout un malade, quelqu?un en grand manque de maturité affective, ajoute le médecin. « Coucher avec sa fille est aussi quelque part, l?affirmation de sa virilité et de sa jeunesse auprès de quelqu?un qu?on veut initier à l?acte sexuel. Un père émotionnellement et sexuellement ?mûr? sait résister à la séduction de sa fille. Il ne cherche pas non plus à la rendre jalouse en séduisant ses copines », assure William. Les deux professionnels soulignent que les deux patients sont « sur la bonne voie » de la thérapie, mais que « ce sera long et difficile ». « Quand j?étais avec ses copines, je rêvais que c?était avec elle que j?étais. Pour les avoir, c?était un jeu d?enfant. C?est fou comment les adolescentes s?intéressent aux hommes mûrs et friqués. Il m?est arrivé de réserver un bungalow pour passer un week-end avec sa meilleure amie. »

Jack : « J?ai bousillé ma fille » « J?ai 50 ans et je travaille à l?étranger pour une multinationale. J?ai divorcé. J?ai couché avec ma fille Charlotte. Cela a commencé quand elle avait treize ans. J?ai toujours été son complice. Je passais par une période difficile professionnellement et sentimentalement, car ma femme me trompait. J?avais été récupérer ma fille dans une boum et nous sommes rentrés en voiture. Son parfum m?a enivré et je me suis mis à la tripoter à un arrêt. We ended up in the backseat, malgré elle. Elle ne m?a pas adressé la parole après pendant au moins trois mois. Sa mère n?a rien remarqué. C?est de là que date mon alcoolisme. Une année après, alors qu?elle allait avoir 15 ans, je l?ai surprise, un après-midi à la maison, en train d?embrasser un de ses copains. Le gars s?est enfui après que je lui ai donné une claque. Elle m?a reproché mon geste, en pleurant. Je l?ai consolée et nous avons terminé au lit. Cette fois, je sais qu?elle y a pris plaisir, malgré elle. Charlotte a ensuite refusé que je vienne dans sa chambre ou que je sois seul avec elle. Je me suis alors vengé en couchant avec ses copines, pour lui prouver que je pouvais lui faire mal. Quand j?étais avec ses copines, je rêvais que c?était avec elle que j?étais. Pour les avoir, c?était un jeu d?enfant. C?est fou comment les adolescentes s?intéressent aux hommes mûrs et friqués. Il m?est arrivé de réserver un bungalow pour passer un week-end avec sa meilleure amie. Je savais que cette dernière allait tout raconter à Charlotte. Ma fille me l?a reproché et je lui ai dit qu?elle savait ce qu?il fallait faire pour que je cesse avec ses amies. Pour ses 17 ans, nous avions organisé un super barbecue, où elle avait invité tous ses amis. J?ai flirté avec l?une d?entre elles toute la soirée. À un moment, elle m?a pris à part et m?a dit que je lui faisais perdre toutes ses amies et fuir ses petits amis. Je lui ai répondu qu?il n?y avait que moi dans sa vie et que j?étais jaloux de ses galants. Elle avait alors éclaté de rire ! Cette nuit-là, elle m?a ouvert la porte de sa chambre? Durant les vingt mois qui ont suivi, je me suis glissée huit fois dans sa chambre et ne m?en allais qu?au petit matin. Elle m?a dit qu?elle m?en voulait terriblement, mais ne pouvait se refuser à moi. Je me souviens qu?elle allait avoir 18 ans et nous avons été quinze jours à Singapour. Là, nous avons vécu comme mari et femme. Elle me disait toujours qu?elle adorait être avec moi, mais qu?elle se sentait mal la nuit? Il lui arrivait souvent de pleurer, mais elle ne disait rien. J?avoue que je ne me rendais pas compte que cela pouvait la détruire, puisque je n?ai jamais été violent avec elle. Il n?y avait que de la tendresse. Cela ne pouvait être assimilé à un viol. C?était limpide pour moi. Je pensais vraiment vivre une « vraie » relation d?amour. Elle me prouvait que j?existais et que j?étais un homme. Elle me permettait de dépasser l?échec qu?avait été le départ de ma femme, qui avait choisi, peu avant, d?aller vivre avec son ami. Ma thérapie m?a permis de me rendre compte comment j?ai bousillé ma fille. Elle m?a toujours haï d?avoir brisé l?interdit de l?inceste, mais, en même temps, comme j?étais son père, elle n?a jamais pu me dire non? Comme elle et moi souffrions de l?absence d?une mère et d?une femme, nous avons comblé ce manque à deux. Je ne me justifie pas. Rentré de Singapour, je l?ai forcée à se mettre à la pilule, car j?étais frustré avec un préservatif. Je l?ai également forcée à porter des dessous sexy. Cela m?excitait de la voir dans son uniforme de collège et de savoir qu?elle portait des dessous coquins. Elle, qui avait eu jusque-là un parcours scolaire sans tache, a alors vu ses résultats chuter de manière dramatique. Je me rends compte aujourd?hui comment elle souffrait de notre relation, mais qu?elle ne pouvait me dire non. Ma femme étant partie avec son mec. Charlotte et moi avons alors vécu seuls à la maison, amants. Une overdose d?antidépresseurs Elle a dû redoubler sa HSC, avec des résultats lamentables. Ses profs avaient mis cela sur le départ de sa mère ? moi aussi, je l?avoue. J?ai décidé de l?aider pour ses études. Je me suis investi à fond pour elle, mais elle semblait refuser tout effort d?étudier. C?est aujourd?hui que je comprends que c?était sa manière de me dire son mal-être, de me dire « Stop ! » Elle a raté lamentablement ses examens. Je ne savais plus quoi faire de ce côté. Mais, chaque soir, je lui montrais comment elle était importante pour moi. Je me souviens que certaines fois, à mon retour du boulot, je la trouvais triste, les yeux rougis. Je mettais cela sur le fait qu?elle ne rencontrait personne, qu?elle était enfermée toute la journée à la maison. Je n?avais rien vu venir? Je n?éprouvais pas la moindre gêne de notre situation, car j?étais dans une sécurité affective, loin du monde cruel? Et puis, j?ai dû aller deux semaines à l?étranger pour le travail. Elle m?a accompagné à contrec?ur. La journée, elle s?enfermait dans la chambre sans même aller faire du shopping, ne rencontrant personne. Comme elle se sentait mal un soir, nous avons fait appeler le médecin de l?hôtel, qui m?a dit qu?elle était déprimée. Comme tout le personnel de l?hôtel, il l?avait prise pour ma jeune épouse. Charlotte a pris des antidépresseurs. À notre retour à Maurice, elle a refusé tout contact physique. Après trois nuits, je l?ai obligée à se donner à moi. Elle m?a supplié, mais je n?ai rien voulu entendre. Et je suis allé au boulot au matin. Lorsque je suis rentré chez moi en début de soirée, je l?ai découverte inerte au lit. L?autopsie a conclu à une overdose d?antidépresseurs. Même si elle est partie sans me laisser un mot, le message était clair. J?avais tout foutu en l?air? J?ai démissionné de mon poste et accepté une offre dans une multinationale à l?étranger. Je suis en cure depuis maintenant trois ans et je n?ai toujours pas retrouvé de paix intérieure. Je me considérais comme n?importe quel père de famille et rien ne pouvait me différencier d?un autre. Je commence seulement à me réconcilier avec moi-même. Je me dis que je suis un salaud. Je survis grâce au fait que je m?investis totalement dans mon travail, devenu mon refuge. J?espère guérir vite, mais je sais que je porterai jusqu?à ma mort mon péché, la perte de Charlotte. »

Joe : « Je suis quelqu?un de normal qui est tombé amoureux de sa fille » « J?ai 52 ans et je suis cadre supérieur dans une importante entreprise. Je vis séparé de mon épouse depuis trois ans et demi. Je suis en thérapie depuis quatre ans. Je n?ai qu?un seul enfant, une fille, que nous appellerons Émilie. Je lui ai dit : « Tu vois ma fille, ce que je viens de faire avec toi, celui que tu aimeras et épouseras le fera encore mieux. » Je sais que je l?ai fait parce que je l?aime et lui voulais son bien. Elle venait d?avoir 18 ans et j?avais voulu être le premier, moi, son père, qui avais toujours compté pour elle ; elle qui avait toujours compté pour moi. Tout a débuté entre nous alors qu?elle allait avoir 17 ans. Ma femme et moi n?avons qu?un enfant. Et ma fille et moi avons toujours entretenu des liens très solides. Elle a toujours été MA fille et MA préférée. Je l?ai toujours chouchoutée et nous avons toujours été très complices, une complicité qui a toujours un peu énervé ma femme. À son adolescence, je l?ai souvent mise en garde contre tous ces jeunes qui lui couraient autour, car il faut savoir qu?elle est très belle. Elle venait souvent me parler de ses copains et je lui disais toujours de bien faire attention. Il m?est même arrivé de menacer verbalement certains de ces crétins qui tentaient de la séduire et d?aller plus loin? Je me souviens avoir ressenti du désir pour elle quand elle allait avoir 17 ans. Nous avions été dans notre bungalow et, pour la première fois, je l?ai vraiment vue à moitié nue. J?ai ri tout haut, car j?avais du mal à croire ce que je ressentais. Comme elle avait deux autres de ses amies qui bronzaient avec elle, j?ai voulu croire que c?était les deux autres la cause de mon émoi, mais je savais au fond de moi que c?est ma douce Émilie qui me faisait cet effet. Les choses en seraient restées là si mon épouse n?était pas partie suivre un long stage à l?étranger. Nous étions à la maison un samedi soir et Émilie, maintenant âgée de 17 ans, est venue me montrer les vêtements qu?elle avait achetés. Elle était très belle et séduisante dans un superbe ensemble. Je savais très bien que j?étais mal À un moment, je l?ai complimentée pour la fermeté de ses seins et je ne sais plus comment, nous nous sommes retrouvés enlacés dans le fauteuil, échangeant un baiser passionné et des caresses. Nous avons ensuite rigolé, nous disant qu?il ne fallait pas que cela se reproduise? Je me suis tenu loin d?elle pendant toute l?absence de ma femme. Elle recherchait mon contact, même si elle semblait gênée. Je savais très bien que j?étais mal, que ce n?était pas bien? Deux mois plus tard, nous avons dîné ensemble et bu pas mal de vin rouge. Elle avait réussi son bac. Cela s?est terminé par des baisers et des caresses intimes. J?avoue avoir eu terriblement envie d?elle et elle de moi. J?étais amoureux de ma fille et elle de moi. C?était notre secret. « Je me souviens d?avoir ressenti du désir pour elle quand elle allait avoir 17 ans » Nous avons récidivé plusieurs fois, mais avons toujours « arrêté à temps ». Peu après son 18e anniversaire et avant son départ pour les études, je lui ai dit comment je l?aimais, même si c?était interdit. Elle partageait mes sentiments et m?a avoué qu?elle souhaitait que je sois son « premier amant ». Elle s?était préparée à cela et, m?a-t-elle dit, elle prenait la pilule depuis deux mois. Nous avons pris beaucoup de vin, car je me sentais comme un adolescent allant à son premier rendez-vous. Ce fut de loin la meilleure partenaire que j?ai jamais eue. Nous étions vraiment un. Nous avons récidivé plusieurs fois avant son départ. Je l?ai accompagnée à l?étranger. La séparation fut très difficile. Rentré au pays, ce fut très dur pour moi. On se téléphonait presque tous les jours. J?ai su que nous étions foutus quand je la taquinais sur ses éventuels petits amis. Elle ne cessait de me dire qu?elle avait essayé de sortir avec d?autres, mais leur compagnie la rendait malade et elle ne pensait qu?à moi. Je me suis abstenu durant la première année de lui rendre visite quand je passais en Europe, prétextant toujours être entre deux avions et accompagné de collègues. Finalement, comme nous ne pouvions nous intéresser à quiconque d?autre, j?ai rencontré, lors d?un déplacement professionnel à l?étranger, William, un ami psychiatre, à qui j?ai avoué mon mal-être. J?étais prêt pour la thérapie et depuis, je profite de chaque passage professionnel en Europe pour faire un saut chez lui. Je suis sur la bonne voie de la guérison. C?est en me rendant compte du fait qu?Émilie ne pouvait pas trouver quelqu?un d?autre que j?ai voulu me soigner. De son côté, Émilie suit également une thérapie. Nous ne nous voyons plus, car j?ai peur de rechuter? Je souffre du fait qu?elle soit la plus secouée des deux, étant dépressive depuis notre « rupture ». J?avoue que je savais que je faisais quelque chose de mal, mais j?ai toujours cru que notre amour allait dépasser cela. Je suis quelqu?un de normal qui a eu le malheur de tomber amoureux de sa fille. Je veux guérir, mais je sais que cela prendra du temps? »

QUESTIONS À Sarah Dieazanacque Psychologue « Une confusion de la place et du rôle de l?adulte » Selon l?anthropologue Claude Levi-Strauss, le tabou de l?inceste est le seul à se retrouver dans presque toutes les sociétés humaines. Comment certains franchissent-ils cette ligne rouge ? L?inceste se retrouve dans l?inconscient collectif et ce tabou existe dans pratiquement toutes les sociétés. Pour faire simple : le père est celui qui, en général, porte l?autorité morale et légale. De cette autorité découle l?identité de l?enfant. Lorsqu?il y a inceste, la construction de cette identité est fortement compromise. Maintenant, il est clair que tout passage à l?acte incestueux découle d?une confusion très forte de la place et du rôle de l?adulte. L?adulte qui oblige l?enfant à une activité sexuelle n?est plus dans son rôle. Des études ont souligné le fait que de nombreuses personnes qui commettent l?inceste ont elles-mêmes été abusées. Si elles ne sont pas aidées, elles ne peuvent pas envisager de donner de l?affection à un enfant autrement. Souvent cela pousse à la pédophilie. Quels sont les facteurs qui favorisent le passage à l?acte ? D?abord l?isolement social, avec une famille instable. À Maurice, les cas d?inceste que j?ai rencontrés ont été aggravés par la promiscuité. Les adultes concernés sont souvent le père, l?oncle, le grand-père, le compagnon de la mère? Le passage à l?acte est facilité quand il y a promiscuité, un enfant livré à lui-même et une carence affective. Un enfant en quête d?affection est une proie facile quand il rencontre le désir d?un adulte. Les enfants concernés ont en général, moins de six ans, ou sont pré-adolescents (12-13 ans). La majorité (60 % des cas) concerne des relations incestueuses père-fille ou beau-père-fille. Un autre facteur favorisant le passage à l?acte : la loi du silence autour de l?abus. La victime, surtout quand elle est très petite, n?a pas toujours conscience que c?est mal. Plus grande, elle culpabilise. Les adultes font également pression ou jouent sur le registre du chantage affectif : « Si tu parles, ta maman aura une crise cardiaque ! » ou « J?irai alors en prison ». Devant cette lourde responsabilité que représente l?écroulement de l?univers familial, la victime se tait. Je note que, trop souvent, on entend peu les mamans dans ces affaires. Quelles sont les conséquences sur les victimes et sur les agresseurs ? C?est simple : on n?en sort jamais indemne ! Tout peut paraître normal, mais les symptômes peuvent « ressortir » dix ou vingt ans après. Pour que le traitement de la victime ait les meilleures chances de réussite, il faut que la thérapie débute le plus tôt possible. L?enfant victime, s?il ne parle pas, va finir par s?y habituer, estimant que cette relation est « normale ». Le suicide est la plus grave des conséquences sur les victimes, car irréversible. La victime souffrira de troubles de l?estime de soi et va souvent remettre en cause son droit d?exister. Elle est dépressive, souffre souvent d?anorexie, est poussée par des tendances suicidaires. Elle présente également des troubles au niveau de la sexualité : elle est soit très séductrice, soit, au contraire, très froide. À l?âge adulte, elle court le risque de déparentabilité. Il est difficile pour une victime de faire confiance aux adultes. L?agresseur doit également suivre une patiente et longue thérapie. L?inceste est-il réservé à une classe sociale ? Sûrement pas ! Comme partout ailleurs, il est réparti dans toutes les classes sociales et dans toutes les communautés. Mais c?est vrai que comme tout est entouré d?un épais silence, on entend plus de cas venant de certains milieux que d?autres.