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L''après-Ben Laden peut enhardir les taliban pakistanais
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L''après-Ben Laden peut enhardir les taliban pakistanais
La mort d''''Oussama ben Laden ne devrait pas affaiblir les taliban du Pakistan malgré leurs liens avec Al Qaïda et pourrait même les inciter, pour venger le dirigeant islamiste, à intensifier leurs actions contre un Etat doté de l''arme nucléaire.
Durant la décennie où l''homme le plus recherché du monde vivait dans la clandestinité, Al Qaïda a établi de solides liens avec les activistes des zones tribales pachtounes jouxtant l''Afghanistan, notamment avec les Tehreek-e-Taliban (TTP) ou taliban pakistanais, qui avaient fait allégeance à Ben Laden. Ehsanullah Ehsan, porte-parole des TTP, a déclaré que les liens des taliban avec Al Qaïda étaient intacts et que l''élimination de Ben Laden par un commando américain serait vengée.
"Nous étions unis avant, nous avons les mêmes buts et les mêmes ennemis. Al Qaïda, les taliban (...) vengeront la mort d''Oussama ben Laden", a-t-il dit par téléphone d''un lieu secret. Si le Pakistan a parfois soutenu des activistes en Afghanistan et dans la partie indienne du Cachemire, les taliban sont les ennemis jurés des forces de sécurité du pays. "Le problème, ce n''est pas Al Qaïda, ce sont les taliban", selon un diplomate arabe en poste à Islamabad. "La menace tient au fait qu''Al Qaïda exploite ces activistes locaux."
Menace persistante
Au Pakistan, la plupart des taliban sont des Pachtounes issus des zones tribales semi-autonomes proches de la frontière afghane, où l''islam radical constitue depuis des générations un cri de ralliement contre les étrangers. La région a hébergé durant les années 1980 des activistes musulmans comme Ben Laden qui combattaient les Soviétiques.
Nombre d''écoles religieuses ont été bâties avec des fonds pakistanais et saoudiens pour fournir des recrues. Lorsque le Pakistan a été pressé d''appuyer la riposte des Etats-Unis à l''extrémisme islamique après les attentats du 11 septembre 2001, les activistes pakistanais se sont mis à voir des ennemis dans ces forces armées. Un tournant a eu lieu en juillet 2007 avec une opération sanglante des forces de sécurité visant à évincer des hommes armés d''une mosquée d''Islamabad.
Les activistes ont intensifié leurs attentats suicides et autres attaques en prenant peu à peu le contrôle de la vallée de Swat, au nord-ouest de la capitale. Les forces de sécurité pakistanaises ont repris en main plusieurs zones, dont la Swat. Mais les taliban pakistanais, dont le nombre de combattants se situe entre 30.000 et 35.000 répartis dans une nuée de factions, restent très menaçants. Ils ont tué dans le Nord-Ouest des centaines de dirigeants tribaux alliés au gouvernement, frappé l''armée dans ses camps ou postes de province et dans ses QG. "L''idéologie d''ensemble vient d''Al Qaïda. C''est le programme djihadiste mondial transnational (...) Sous le parapluie d''Al Qaïda opèrent différentes équipes d''activistes", dit Abdul Basit, chercheur au Pakistan Institute for Peace Studies. "La disparition de Ben Laden ne changera pas sensiblement la dynamique globale dans la guerre contre le terrorisme ou l''activisme taliban."
Champ d’action élargi
Un commando des forces spéciales américaines a abattu Ben Laden le 2 mai dans son repaire d''Abbottabad, à une cinquantaine de kilomètres d''Islamabad. Selon l''une de ses trois femmes arrêtées ensuite par les autorités pakistanaises, il ne quittait pratiquement jamais son refuge entouré de grands murs. Du fait de son isolement, il avait peu de moyens d''organiser des attaques et son élimination ne devrait pas avoir d''impact notable, estime le journaliste pakistanais Rahimullah Yusufzai. Les taliban pakistanais ont surtout constitué une menace intérieure mais certains signes font penser qu''ils cherchent à élargir leur champ d''action sous la bannière d''Al Qaïda. En 2009, un attentat suicide commis par un Jordanien sur une base américaine dans la province afghane de Khost a causé la mort de sept employés de la CIA. Une vidéo diffusée après l''attentat montrait son auteur assis aux côtés du chef des taliban pakistanais, Hakimullah Mehsud. L''Américain d''origine pakistanaise arrêté l''an dernier à New York après avoir tenté de faire sauter un véhicule à Times Square a déclaré devant un tribunal qu''il avait été initié au maniement d''explosifs par les taliban du Pakistan.
"Il existe une étroite coopération entre les taliban pakistanais et Al Qaïda parce que sont les principaux protecteurs d''Al Qaïda dans les zones tribales", note l''expert pakistanais Ahmed Rashid. Le fait que Ben Laden se cachait "sous leur nez" a mis dans l''embarras les dirigeants civils et militaires du Pakistan, qui font face à un refroidissement de leurs relations avec Washington ainsi qu''à une avalanche de critiques intérieures. Les taliban pakistanais, prêts à venger la mort de Ben Laden, pourraient y voir le moment idoine pour frapper un gouvernement déjà affaibli par les difficultés économiques. "Les TTP vont sans doute passer à l''attaque", dit Hamid Gul, ancien responsables des renseignements. "Nous en paierons le prix."
(Source : Reuters)
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