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Le folklore de la rue Desforges, bientôt une tombe à fleurir…

8 juillet 2009, 00:00

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Le folklore de la rue Desforges, bientôt une tombe à fleurir…

Imaginez une soirée où la rue Desforges serait déserte, sans vie, sans aucune animation. C’est ce qui arrive, depuis ce 8 juillet, avec l’évacuation des marchands ambulants qui y exercent.

Passer par la rue Desforges, à Port-Louis, pour y acheter un kebab, une grillade ou encore un briani dans la soirée est profondément ancré dans le folklore mauricien. C’est devenu au fil des années, un véritable fast-food géant. Pour beaucoup l’antichambre du Caudan Waterfront…

Mais voilà, cette unique partie de la capitale, qui respire la vie jusqu’à très tard dans la nuit, ne sera bientôt qu’un simple souvenir. La mairie de la capitale a pris la décision de faire évacuer les marchands qui y opèrent dans un autre lieu, à la rue Remy Ollier.

Depuis l’annonce de cette décision, cette ambiance propre à la rue Desforges s’essouffle. L’inquiétude d’un avenir incertain a pris le dessus. La frustration qui s’est engouffrée chez les marchants accouche d’un agacement palpable quand le sujet est abordé avec eux.

Ces commerçants restent méfiants… Ils ne veulent pas vraiment communiquer sur cette menace qui plane sur eux. «Ah bon? On doit partir d’ici?», lâchent les premiers marchands, le visage affichant une évidente irritation, rien qu’à l’idée qu’on effleure le sujet.

Et s’armant de patience, la conversation aidant, les langues se délient. Ils nous crachent, enfin, cette profonde frustration. «Cela fait plus d’une décennie que nous exerçons ici, à la rue Desforges. Et sans aucune explication plausible, on nous demande de partir», s’indigne Fezhal Ehoordin. «Pour aller où? A la rue Remy Ollier. Mais, il n’y a rien là-bas! Nou pe al mor laba », se fâche-t-il.

Petit à petit cette frustration, qui découle de la décision de la mairie de Port-Louis, laisse place à un discours beaucoup plus humain. «C’est notre gagne-pain. Je fais vivre ma famille grâce à ce boulot à la rue Desforges. Ils ne réalisent pas qu’ils mettent en péril le gagne-pain de toute une famille en voulant nous éjecter d’ici», s’indigne Fezhal Ehoordin.

Mais, il n’y a pas que les marchands qui appréhendent cette expulsion. Les consommateurs qui trouvent en la rue Desforges un moyen pratique de se trouver quelque chose à manger, tard dans la nuit, sont tout aussi secoués par l’éventualité que cette foire de la restauration rapide et pratique ne disparaisse. «C’est facile de venir ici. En plus, la nourriture est bonne et variable selon les budgets.» C’est le discours qui revient sans cesse chez de nombreuses personnes rencontrées.

C’est vrai, la rue Desforges, ses marchands, son ambiance, sa chaleur, son parfum particulier –devenu un rendez-vous incontournable pour les Mauriciens –, ne sera qu’un souvenir dans très peu de temps. Encore un patrimoine, un pilier du folklore, qui s’efface… dans une certaine indifférence.

Pour d’autres, c’est un peu plus d’ordre dans le chaos de la nuit port-louisienne. Tout, en fin de compte, n’est que relatif. Sauf pour ceux qui vivent des expériences de vie intenses au contact de certaines réalités…