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Le Mauricien de l’année: l’inspecteur Rujub couronné pour sa détermination

28 décembre 2012, 00:00

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Le Mauricien de l’année: l’inspecteur Rujub couronné pour sa détermination

C’est un exemple à suivre. Un fonctionnaire dévoué, efficace et plus que tout, déterminé, dit-on, à aller au bout de ses enquêtes. Comme celle sur l’affaire «Gro Derek». Lui, c’est l’inspecteur Rujub, l’homme de l’année 2012 de l’express.

Depuis qu’il est sorti de l’ombre, l’inspecteur Rujub affirme que le regard des gens qu’il croise a changé. «Nous avons droit à leur respect, mon équipe et moi. Certains qui faisaient jadis le lien entre la police et la corruption nous font aujourd’hui plus confiance», confie-t-il.

L’homme n’est ni Hercule ni James Bond. Il ne porte pas de blouson en cuir qui lui donnerait l’allure d’un vrai dur. C’est un homme des plus humbles, fils d’un marchand de toiles dans un magasin à la rue La Corderie, Port-Louis, et d’une mère femme au foyer.

Un simple inspecteur. Mais il est celui qui a fait tomber plusieurs têtes dans une affaire qui l’a propulsé au-devant de l’actualité : l’affaire Gro Derek.

C’était après qu’il a récemment pris les rênes de l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) de Plaine-Verte.

Qui est Assaad Rujub ? Il a 37 ans, mais on lui donnerait facilement dix ans de moins. «A un si jeune âge, c’est un garçon très humble, direct, dévoué et très capable», commente un de ses supérieurs, le Deputy Commissioner of Police (DCP) Vinod Appadoo. Ce «garçon» compte en fait 18 ans au sein de la force policière.

C’est vers mi-2012 qu’il prend la direction de l’ADSU de Plaine-Verte, après avoir fait des études avancées. Quelques jours plus tard, joli coup de filet : une double saisie d’héroïne à Pereybère et à Daruty, d’une valeur marchande de Rs 180 millions.

Tout commence avec l’arrestation d’Ashish Dayal le 12 juillet. Puis, survient une série d’autres arrestations. Dix au total : Rudolph Dereck Jean Jacques le 27 juillet. Bruno Casimir le 4 août, Hayesan Madarbacus le 24 août, Moosa Beeharry le 31 août, Antoine Désiré Fricheler Azie le 4 septembre, Jimmy Alexi et Jimmy Marthe, dit Colosso, le 11 septembre, Roukesh Hemraz, dit Ronnie le 7 octobre, Daramdev Balkissur le 15 octobre et Danilo Fabrice François le 25 octobre. C’est dire que l’affaire est des plus complexes ! Comment est-il parvenu à un tel dénouement ? Loin de tirer une gloire personnelle de cette affaire, l’inspecteur ne parle qu’en termes de «nous». Nous, c’est son équipe, l’ADSU de Plaine-Verte.

C’est aussi «le soutien de mes chefs hiérarchiques, dont le Commissaire de police et les DCP, qui ont fait que j’ai pu mener à bien cette enquête». L’inspecteur Rujub ajoute qu’il y a également une part de chance. Car «depi lontan l’ADSU ti ena renseignement lor sa rezo la, kouma lezot enkor. Me seki blok nou, seki san prev pa kapav fer nanye». C’est justement lorsqu’il prend la barre de l’ADSU qu’il parviendra à réunir suffisamment de preuves.

Comment ? Grâce à des pistes qui lui ont permis d’obtenir le feu vert de ses chefs pour déclencher des opérations sur le terrain.

«Intelligence is the life blood of all investigations, and mainly in drug cases», lâche-t-il, un brin philosophe.

Mais le chemin menant à ces arrestations n’aura pas été de tout repos. L’inspecteur Rujub évoque, par exemple, un incident auquel son équipe et lui-même ont eu à faire face à Roche-Bois. «On est parti pour une perquisition chez Jimmy Alexi. Nous avons reçu des jets de pierres à notre arrivée. Heureusement, il n’y a pas eu de blessés parmi nous», raconte-t-il. Hormis cet incident, il affirme n’avoir subi aucune «pression interne ou externe» dans le sillage de cette affaire.

«Sur le terrain, Assaad a toujours gardé son sang- froid. Il ne répond pas aux provocations et trouve toujours une solution dans les situations les plus difficiles, sans pour autant mettre notre vie en péril», commente un collègue et ami d’enfance.

Un autre de ses supérieurs, le DCP Ravin Sooroojbally, est d’avis qu’il est un officier « extraordinaire, dévoué et intègre». Autant d’éloges qui sont loin de monter à la tête du principal concerné. Lui, veut aller plus loin encore.

Car, en tant qu’homme qui se donne à fond dans son travail, comme le souligne le DCP Vinod Appadoo, il veut mettre un frein définitif au trafic de drogue dans l’île. «Seul, je ne pourrai le faire. Avec les autres équipes de l’ADSU, la lutte contre la drogue est un combat perpétuel. L’affaire Dereck Jean-Jacques n’est que le sommet de l’iceberg», reconnaît l’inspecteur Rujub.

Ce dernier se donne les moyens de ses ambitions : après qu’il a intégré la force policière en 1994, il obtient, par la suite, un BSc in Police Studies. Un laissez-passer qui lui a permis de poursuivre son cheminement académique avec un Bar Course en Angleterre. Son LLB en poche, Assaad Rujub projette d’exercer un jour comme avocat.

Mais, pour l’heure, en tant qu’inspecteur, il a à coeur de faire avancer ses enquêtes. Au point de lancer un appel au public : «Je reste disponible pour quiconque aurait des informations dans l’affaire Gro Dereck, comme dans d’autres trafics de drogue. Je donne la garantie que je remettrai ceux qui y sont impliqués entre les mains de la justice». Faut- il croire en lui ? «Il y a une majorité de policiers qui font leur travail consciencieusement et Rujub est l’un d’eux», commente Ally Lazer, président des travailleurs sociaux de Maurice. A la maison, Assaad Rujub est d’ailleurs considéré comme le pilier de la famille, depuis la mort de son père, il y a quatre ans.

C’est un homme «sans embrouilles», lâche Dharmarajen Murugan, chargé de la communication de la police. Un homme solidaire des décisions prises par la force policière. Même lorsque des transferts, dits punitifs, y sont décriés.

Par Ally Lazer, par exemple. Qui estime que «zordi, mem si ou fer ou travay byen dan lapolis, bizin touzour ena transfer pinitif». La réplique d’Assaad Rujub viendra tout naturellement, sans balbutiement aucun : «Je ne pense pas qu’on puisse associer le terme punitif à cette pratique. Nous les policiers, nous savons pertinemment que nous pouvons être transférés à tout moment, sans pour autant perdre notre rang.» L’inspecteur ajoute que, de toute façon, un transfert permet «de s’enrichir de nouvelles expériences, contribuant à la polyvalence de l’officier muté». Décidément, il n’y a pas une once d’amertume chez cet homme, qui a le coeur à l’ouvrage.

Il faut dire que ce métier le fascinait dès l’enfance. Émerveillé par l’uniforme bleu de la police, que portait fièrement son oncle. C’est à l’école Villiers René qu’il finit le cycle primaire.

Puis, place à des études secondaires aux collèges Hassan Raffa à Terre-Rouge et à la SSS Razack Mohamed à Port-Louis. Un beau jour, alors qu’il attend les résultats du HSC, il apprend qu’il figure parmi les nouvelles recrues de la force policière.

La soif d’apprendre ne le quitte pas pour autant. A l’école de police à Beau- Bassin, le jeune Assaad, alors âgé de 19 ans, sort du lot.

Des 500 recrues, il se classe premier dans la filière académique traitant du Droit et des pièces à conviction.

Que de chemin parcouru depuis. Désormais, même si, à 37 ans, il peut être perçu comme étant trop jeune, il sait faire montre d’autorité. D’ailleurs, l’air sévère, il rappelle qu’il n’y a aucune dérogation au travail pour les fêtes de fin d’année. Car, «pas de congé pour la police jusqu’au 5 janvier». Oui, chef !