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Les déclarations papales sur le préservatif suscitent un tollé

19 mars 2009, 01:00

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Les déclarations papales sur le préservatif suscitent un tollé

Les critiques se multiplient dans le monde, après la déclaration du pape Benoît XVI  sur l''''utilisation du préservatif pour endiguer la propagation du sida.

Dans l''avion qui le conduisait mardi en Afrique, le souverain pontife a déclaré que la distribution de préservatifs n''était pas un moyen de lutte contre la pandémie mais qu''au contraire elle aggravait le problème.

Militants de lutte contre le sida, médecins et hommes politiques ont dénoncé le caractère peu scientifique et dangereux de cette position et son absence de réalisme."S''il ne nous appartient pas de porter un jugement sur la doctrine de l''Eglise, nous estimons que de tels propos mettent en danger les politiques de santé publique et les impératifs de protection de la vie humaine", a déclaré le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Eric Chevallier.

Pour Quentin Sattentau, professeur d''immunologie à l''université d''Oxford, "cela représente un grand pas en arrière en matière d''éducation sanitaire, c''est totalement contre-productif et risque d''entraîner une augmentation des contaminations par le VIH en Afrique et ailleurs". Il a ajouté « qu’il existe un vaste corpus de témoignages publiés démontrant que l''utilisation du préservatif réduit le risque de contamination par le VIH mais n''entraîne pas  d''augmentation de l''activité sexuelle", a-t-il dit.

Interrogé sur les critiques, le père Federico Lombardi,  porte-parole du Vatican, a répondu que le pape maintenait  "la position de ses prédécesseurs". L''Eglise enseigne que  la fidélité au sein du mariage hétérosexuel et  l''abstinence sont les meilleurs moyens d''endiguer le sida.
Le Vatican affirme que le préservatif peut entraîner une augmentation des comportements à risques, ce que  contestent de nombreux scientifiques, à l''instar de Kevin  De Cock, directeur du département VIH/sida à  l''Organisation mondiale de la Santé. "Nous disons que les  préservatifs sont très efficaces pour prévenir la  transmission du VIH s''ils sont utilisés correctement et
régulièrement", a-t-il expliqué dans une interview.

L''abstinence et la réduction du nombre de partenaires sont aussi nécessaires, a-t-il ajouté en saluant les groupes religieux, notamment catholiques, qui s''emploient à fournir des traitements aux séropositifs des régions les plus pauvres et les plus reculées du monde.

Le monde compte quelque 33 millions de séropositifs et le sida a déjà tué 25 millions de personnes. "Tout ce qui réduira le sida sur un continent en crise tel que l''Afrique doit être le bienvenu", a réagi Adeleke Agbola, juriste au Nigeria, le pays le plus peuplé d''Afrique.

"Lorsque le pape dit que (les préservatifs) ne sont pas bons, c''est comme s''il disait que voyager en avion n''est pas sûr à 100% et qu''il faut donc ne plus le faire", s''insurge le Dr Pat Matemilola, coordinateur du Réseau des Personnes vivant avec le VIH/sida au Nigeria.

Le New York Times écrit dans un éditorial que le pape n''est pas crédible lorsqu''il "déforme des conclusions scientifiques" sur le préservatif.

Pour la ministre belge de la Santé, Laurette Onkelinx, "de tels propos, tenus par le chef de l''Eglise, au XXIe siècle, en dépit des recommandations unanimes du monde scientifique en la matière, sont le reflet d''une vision doctrinaire dangereuse". Dans un communiqué, elle souligne que "ces déclarations pourraient anéantir des années de prévention et de sensibilisation et mettre en danger de nombreuses vies humaines".

En France, l''ancien Premier ministre Alain Juppé a estimé que "ce pape (...) vit dans une situation d''autisme total". "Aller dire en Afrique que le préservatif aggrave le danger du sida, c''est d''abord une contre-vérité et c''est inacceptable pour les populations africaines et pour tout le monde", a-t-il dit sur France Culture. Les propos du pape constituent "presque un meurtre prémédité", a estimé le député européen Daniel Cohn-Bendit dans le cadre de l''émission Questions d''Info LCP-France Info-AFP.

Des signes de désaccord ont surgi au sein même de l''Eglise catholique. "Quiconque est séropositif et est sexuellement actif, quiconque a plusieurs partenaires, doit protéger les autres et lui-même", a déclaré Hans-Jochen Jaschke, évêque auxiliaire de Hambourg.

(Source : Reuters)